Cardinal Sandri: «Rien n’est perdu avec la paix, tout est perdu avec la guerre»

Le cardinal Sandri rencontre l'archevêque métropolitain de Philadelphie des Ukrainiens, lors du 50e anniversaire de l'Eparchie gréco-catholique, aux États-Unis, le 22 juin 2019. (Vatican Media)Le cardinal Sandri rencontre l’archevêque métropolitain de Philadelphie des Ukrainiens, lors du 50e anniversaire de l’Eparchie gréco-catholique, aux États-Unis, le 22 juin 2019. (Vatican Media)

Cardinal Sandri: «Rien n’est perdu avec la paix, tout est perdu avec la guerre»

Dans un discours à l’Assemblée plénière de la Congrégation pour les Églises orientales, ce 18 février au Vatican, le Cardinal Sandri a lancé un vif appel aux dirigeants internationaux, les exhortant à maintenir la paix en Ukraine.

Claire Riobé – Cité du Vatican

Au cours de son intervention durant l’Assemblée plénière, le Cardinal Sandri, Préfet de la Congrégation des Eglises orientales, s’est exprimé sur la situation particulièrement préoccupante des chrétiens d’Ukraine. Le pays est en proie ces dernières jours à une montée de violences, sur fond de craintes d’une attaque de Moscou. 

La Congrégation, actuellement chargée de mettre en lien le Pape avec les Églises orientales catholiques, dispose d’une autorité exclusive sur les catholiques d’Albanie méridionale, de Bulgarie, de Chypre et de Grèce. Dans son allocution en présence du Saint Père, le cardinal Sandri a d’emblée souhaité exprimé sa solidarité envers ses «frères et sœurs en Ukraine», violemment affectés par les tensions en cours.

Reprenant des mots de Benoit XVI, le Cardinal Sandri s’est ensuite exprimé sur l’avenir de l’Europe en cas de conflit. «Le monde civilisé devra-t-il se réduire à un champ de mort ? Et l’Europe, si glorieuse et florissante, courra-t-elle, presque submergée par une folie universelle, jusqu’au gouffre, face à un véritable suicide ?», a-t-il lancé.

«Rien n’est perdu avec la paix, tout est perdu avec la guerre »

Face aux menaces de nouvelles souffrances et de nouveaux conflits pour les catholiques d’Europe orientale, le cardinal Sandri a ensuite exhorté les dirigeants mondiaux être animés par un devoir de conscience et refuser la guerre. «Réfléchissez à votre très grave responsabilité devant Dieu et devant les hommes», a-t-il avertit. «De vos résolutions dépendent la quiétude et la joie d’innombrables familles, la vie de milliers de jeunes, le bonheur même des peuples, que vous avez le devoir absolu de procurer.»

Le Préfet pour la Congrégation des Eglises orientales a enfin exprimé son désir de voir le Seigneur «inspirer des décisions sages pour l’humanité» aux dirigeants. «Rappelez-vous que rien n’est perdu avec la paix, tout est perdu avec la guerre ! (…) Dans le temps présent et futur, puissiez-vous être appelés bienheureux, parce que vous avez construit la paix, et vous avez transformé les lances et les armes d’aujourd’hui en faucons et instruments de prospérité et de bien-être pour les peuples.», a-t-il conclu. 

Ce 18 février, des bombardements sont en cours à l’est de l’Ukraine sous contrôle des forces gouvernementales, ont indiqué des sources sur place à l’AFP, dans la matinée.

Source: VATICANNEWS, le 18 février 2022

Liban, recteur de Harissa: que le monde entier entende la prière du Pape

Sanctuaire Notre-Dame du Liban à Harissa, surplombant la Méditerranée, au nord de Beyrouth. Sanctuaire Notre-Dame du Liban à Harissa, surplombant la Méditerranée, au nord de Beyrouth.  

Liban, recteur de Harissa: que le monde entier entende la prière du Pape

C’est avec la richesse des particularités du pays du Cèdre, mais aussi avec la préoccupation dans leur cœur pour les conditions de vie de la population, que les chefs religieux du Liban rencontrent le Pape au Vatican le 1er juillet pour une journée de prière, réflexion et dialogue. 

Fausta Speranza – Cité du Vatican

L’événement est prévu le 1er juillet pour «marcher ensemble», comme l’a souligné le préfet de la Congrégation pour les Églises orientales, le cardinal Leonardo Sandri, lors d’une conférence de presse au Vatican. L’image choisie comme logo de l’initiative représente la statue de Notre-Dame de Harissa, qui veille sur le Liban. Avant de partir pour Rome, pour sa part, le patriarche d’Antioche des maronites, le cardinal Bechara Boutros Raï, a déclaré que les chefs religieux ne se rendent pas au Vatican «en portant uniquement les plaintes des chrétiens, mais celles de tous les Libanais. Nous apportons la cause du Liban, la cause de la liberté, du dialogue et de la coexistence islamo-chrétienne».   

Le programme de la journée

«Le Seigneur Dieu a des projets de paix. Ensemble pour le Liban», thème de la journée de réflexion et de prière pour le Liban à laquelle participent les principaux responsables des communautés chrétiennes présentes dans le pays. Il est prévu que le Pape et les chefs des Églises et des communautés ecclésiales se rendent à pied de la Maison Sainte-Marthe à la basilique Saint-Pierre en début de journée, après le moment de bienvenue et de salutation dans le hall de la résidence où ils sont invités du soir du 30 juin au matin du 2 juillet. Plusieurs moments de prière mais aussi de discussion ont été organisés: dans la salle Clémentine, ils rencontreront autour d’une table le Pape, le nonce apostolique au Liban, Mgr Joseph Spiteri, qui fera office de modérateur, et les dix chefs des communautés chrétiennes: du côté catholique, le patriarche d’Antioche des maronites, le cardinal Bechara Boutros Raï, le syrien catholique Ignace Youssef III Younan, le melkite Youssef Absi, l’évêque chaldéen Michel Kassarj et le vicaire apostolique latin, Mgr César Essayan.

La prière et l’appel du cœur

Depuis le Liban, terre d’anciennes communautés chrétiennes où le pourcentage de chrétiens vivant aux côtés de communautés musulmanes est le plus élevé par rapport aux pays arabes voisins, même si leur nombre est en baisse, un appel sincère est lancé à la population, épuisée par la pauvreté endémique, l’impasse politique et la crise de la pandémie, mais riche de foi et de confiance dans le Pape, comme le souligne le père Khalil Awan, recteur du sanctuaire de Notre-Dame du Liban à Harissa.

Le Liban, une Terre Sainte

«70 % de la population se trouve aujourd’hui sous le seuil de pauvreté au Liban et les produits de première nécessité font défaut», assure-t-il. À propos de la situation politique, il affirme que la dynamique de la corruption et des intérêts particuliers prévaut tant à l’intérieur du pays qu’au niveau international. «L’espérance est intense, explique-t-il, que l’attention que le Pape porte au Liban puisse représenter un appel entendu par le monde». Père Awan rappelle aussi ce qu’il appelle la belle coexistence entre chrétiens et musulmans au Liban, soulignant que ce n’est pas au niveau de cette relation que se situent les problèmes mais au niveau du mécontentement face à l’impasse sociale. Le recteur du sanctuaire qui surplombe Beyrouth évoque aussi le Liban comme une Terre Sainte; Jésus a vécu au sud du Liban, et le pays du Cèdre raconte l’histoire de nombreux saints au fil des siècles.

18 confessions religieuses coexistent

Une profonde gratitude pour toute l’attention du Pape François pour le Liban, pour cette journée de prière et pour toutes les initiatives -comme l’envoi d’aides concrètes ou l’envoi du secrétaire d’État, le cardinal Piero Parolin, à Beyrouth pour la journée de prière du 4 septembre 2020- est également relevé par le père Miled Tarrabay, procureur maronite de Rome, qui met l’accent sur la richesse des confessions religieuses au Liban: 18 religions sont reconnues par la Constitution au Liban. Il insiste aussi sur la valeur de la coexistence dans le respect mutuel et l’échange qui -souligne-t-il- est unique dans la région. C’est aussi pour cette raison, rappelle-t-il, que le Pape Jean-Paul II a parlé du Liban comme d’un pays qui n’est pas seulement une réalité territoriale mais un message au monde. Le père Tarrabay réitère enfin l’importance du choix du Pape François de maintenir les projecteurs sur ce qui se passe au Liban aujourd’hui car la société -dit-il- est profondément blessée par une série ininterrompue de tragédies.

Mais la prière et la confiance ne manquent pas pour que le dialogue puisse prévaloir au Liban comme dans le monde qui, rappelle-t-il, souffre du terrorisme fondamentaliste et d’autres formes de refus du dialogue.

L’Église d’Antioche des Maronites

Selon la tradition, l’Église maronite, qui tire son nom du saint fondateur de la Communauté Saint-Maron, faisait à l’origine partie des Églises dites autocéphales, c’est-à-dire ne dépendant pas directement de l’un ou l’autre siège patriarcal (Rome et Constantinople). Persécutés par les Byzantins ainsi que par les Jacobites, les Maronites se sont réfugiés dans les montagnes du nord du Liban et se sont progressivement répandus dans tout le pays. L’historiographie officielle de l’Église maronite, cependant, rejette la thèse des origines monothélites et soutient la soumission dès le début à l’Église de Rome.

Quoi qu’il en soit, c’est après les croisades que les liens de l’Église maronite avec le trône pontifical de Rome se développent de manière continue; des liens consacrés par la fondation du Collège maronite à Rome en 1584. En 1736, le concile de Louaizé renforce la «latinisation» de l’Église maronite, qui conserve sa liturgie en syriaque et en arabe. De nombreuses communautés présentes sur le territoire libanais, au-delà de l’Église maronite, se définissent comme «antiochiennes», c’est-à-dire qu’elles se réfèrent au siège historique d’Antioche, ville située aujourd’hui en Turquie, après que la France ait cédé la Cilicie syrienne en 1939 en échange de la neutralité d’Ankara pendant la Seconde Guerre mondiale.

Autres communautés chrétiennes

Le pourcentage de chrétiens au Liban par rapport à la population musulmane est le plus élevé par rapport à ceux enregistrés dans les pays arabes voisins, bien que leur nombre soit malheureusement en baisse. À partir du 18e siècle, la présence de l’Église romaine s’est accrue grâce à ses missionnaires et de nouvelles communautés se sont développées, comme les Grecs catholiques, les Syriaques et les Chaldéens catholiques.

Au XIXe siècle, les différentes Églises protestantes ont également commencé à créer de nouvelles communautés. La création à Beyrouth, en 1866, du Collège protestant syrien, qui deviendra plus tard l’Université libano-américaine de Beyrouth, attire de nombreux jeunes chrétiens de différentes confessions orientales. Les Églises dites melkites -grecques orthodoxes- sont celles qui tirent leur obédience du patriarcat de Constantinople.

Ce schisme entre les deux grands sièges patriarcaux de Rome et de Constantinople sera aggravé par la quatrième croisade au XIIIe siècle, puis consacré par la chute de Constantinople aux mains des Turcs ottomans. La communauté qui comprend les Levantins, c’est-à-dire les Libanais ou les Syriens ou les Palestiniens d’origine européenne qui n’ont pas rejoint l’une des églises orientales existantes, est appelée latine. 

Source: VATICANNEWS, le 1er juillet 2021

Messe pour la commémoration du génocide des Arméniens

Le cardinal Sandri ici lors d'une célébration au monastère de San Lazzaro, au large de Venise, en septembre 2018, avec la Congrégation arménienne mekhitariste. Le cardinal Sandri ici lors d’une célébration au monastère de San Lazzaro, au large de Venise, en septembre 2018, avec la Congrégation arménienne mekhitariste.  

Messe pour la commémoration du génocide des Arméniens

Le cardinal Leonardo Sandri, préfet de la Congrégation pour les Églises orientales, participera ce samedi à une messe pour le 106e anniversaire du début du génocide des Arméniens.

Le 24 avril de chaque année est la date de la mémoire arménienne, de ce que les Arméniens appellent « Medz Yeghern » et que la communauté internationale connaît comme «le premier génocide du XXe siècle».

Chaque année, le 24 avril, toutes les communautés arméniennes du monde se réunissent pour prier en mémoire d’un million et demi de martyrs.

La communauté arménienne de Rome fera de même avec une Sainte Messe en rite arménien, qui sera célébrée au Collège Pontifical Arménien, ce samedi 24 avril à 11h00, en présence du cardinal Leonardo Sandri, Préfet de la Congrégation pour les Églises orientales, et des représentations diplomatiques de la République d’Arménie auprès du Saint-Siège et de la République italienne.

La cérémonie sera présidée par Mgr Raphaël Minassian, archevêque des Arméniens catholiques d’Arménie, de Géorgie, de Russie et d’Europe orientale. L’homélie sera prononcée par le cardinal Leonardo Sandri.

À l’issue de la messe, un acte de commémoration aura lieu devant le Khachkar érigé à la mémoire des victimes du génocide arménien.

Source: VATICANNEWS, le 22 avril 2021

Cardinal Sandri: que saint Maron intercède pour le bien du Liban

Solennité de saint Maroun, chaque 9 février. Solennité de saint Maroun, chaque 9 février.  

Cardinal Sandri: que saint Maron intercède pour le bien du Liban 

Une messe a été célébrée par le cardinal Leonardo Sandri, préfet de la Congrégation pour les Églises orientales, à Rome mardi 9 février, mémoire liturgique de ce moine chrétien syriaque, patron des catholiques maronites, ayant vécu entre le IV et Vème siècle. 

Lors de la Divine Liturgie en rite antiochien maronite célébrée le 9 février à Rome en l’église du Collège maronite de Rome, pour la fête du fondateur de l’Église maronite, le moine saint Maron, le cardinal Leonardo Sandri, préfet de la Congrégation pour les Églises orientales, a tourné ses pensées vers le Liban, où, au Ve siècle, Maron a donné vie à une congrégation monastique et spirituelle.

Mobilisation nationale et internationale

Dans son salut aux fidèles, le cardinal a rappelé la terrible explosion du 4 août dans le port de Beyrouth et les efforts du peuple libanais qui, «bien que courbé par la crise économique, sociale et politique, a tout mis en œuvre pour répondre aux besoins des plus touchés: nettoyer les rues, accueillir les sans-abri, distribuer des produits de première nécessité, réparer hôpitaux et écoles».

«Il y a eu une course à la sensibilisation, avec des visites internationales visant à donner de l’espérance, des appels, des mots d’encouragement, ainsi qu’une course à la solidarité concrète de la part des institutions et des particuliers, des fondations, des Libanais de la diaspora et de bien d’autres», a ajouté le cardinal Sandri.

L’attention du Pape

Dans les deux dimensions, celle de la parole et celle de la charité, le Saint-Père en personne et le Saint-Siège sont apparus au premier plan: interventions, audiences générales et angélus, jusqu’au long passage consacré au Liban dans le discours du Pape au corps diplomatiquelundi 8 février. Le cardinal a par ailleurs demandé à Saint Maron d’intercéder pour qu’«en particulier ceux qui sont appelés à prendre des décisions pour le bien du Pays du Cèdre soient éclairés». Il a ensuite cité les paroles du Pape: «Il est donc nécessaire que tous les responsables politiques et religieux, mettant de côté leurs propres intérêts, s’engagent à poursuivre la justice et à mener de véritables réformes pour le bien des citoyens, en agissant de manière transparente et en assumant la responsabilité de leurs actes».

Le Liban, précurseur de Fratelli Tutti

Le préfet de la Congrégation pour les Églises orientales a également énuméré tout ce qui avait été fait pour le Liban, la visite en tant qu’envoyé spécial du Pape du cardinal Secrétaire d’État, Pietro Parolin, un mois après la tragédie du 4 août, l’aide aux bourses, la subvention extraordinaire après l’explosion, la session extraordinaire de la ROACO -la Réunion des œuvres d’aide aux Églises orientales- consacrée au Liban. Pour le cardinal Sandri, ce sont là «les signes d’une Église vivante qui veut vivre dans les rues du monde aux côtés de ses fils et de ses filles et de tous les hommes et femmes de bonne volonté, reproduisant en pratique cette image du bon samaritain» que François a indiqué dans Fratelli Tutti. Le pays du Cèdre est «un témoin et un précurseur de l’encyclique, par sa capacité de coexistence entre différents, chrétiens et musulmans de différentes affiliations et confessions», a noté le cardinal Sandri. 

Trésor de la foi pour l’Orient chrétien

Il a ensuite expliqué l’histoire de Mar Maroun et de l’֤Église maronite, née de son témoignage chrétien, et jalonnée de moments d’épreuves et de souffrances qui l’ont de plus en plus purifiée, lui faisant garder le trésor de la foi.

Le cardinal a confié au saint l’Église maronite, le Liban et tous ses enfants dispersés dans le monde. «Obtenez par votre prière la fin des souffrances aggravées par la pandémie et donnez-nous tous un cœur purifié et ardent afin que, malgré les nombreuses épreuves, nous réalisions que la perle précieuse, le Seigneur Jésus, ne nous a jamais été enlevée et que nous ne voulons pas nous éloigner de Lui par nos choix».

Saint Maron fait partie des saints des Églises «chalcédoniennes», il est aussi fêté par l’Église orthodoxe le 14 février.

Source: VATICANNEWS, le 10 février 2021

Syrie et Irak : le cardinal Sandri exhorte à «donner un avenir aux jeunes»

Messe célébrée dans l'église de Mar Toma (quartier occidental de Mossoul) après la défaite de Daech (archives juillet 2018)Messe célébrée dans l’église de Mar Toma (quartier occidental de Mossoul) après la défaite de Daech (archives juillet 2018)  (ANSA)

Syrie et Irak : le cardinal Sandri exhorte à «donner un avenir aux jeunes»

Le préfet de la congrégation pour les Églises orientales évoque la prochaine visite du Pape François en Irak. S’agissant des chrétiens syriens et irakiens, il rappelle combien ces communautés souffrent de voir leur culture ensevelie sous des décennies de conflit. 

Alessandro Di Bussolo et Antonella Palermo- Cité du Vatican

Se réunir en modalité virtuelle pour faire le point sur la situation très problématique vécue par divers pays du Moyen-Orient, encore aujourd’hui confrontés aux guerres et aux migrations qui en découlent, est l’un des éléments de préparation au voyage apostolique du Pape François en Irak en mars prochain. Le cardinal Leonardo Sandri, préfet de la Congrégation pour les Églises orientales, explique les raisons de ce qui promet déjà d’être un acte historique et courageux, précurseur de chemin de dialogue et de réconciliation:

«Vendredi dernier, dans sa méditation de l’Avent, le prédicateur de la Maison pontificale nous a rappelé les paroles du prophète Isaïe: “Consolez, consolez mon peuple”. Pour moi, cette visite du Pape représente un énorme geste de consolation pour tous ces pays et ces peuples qui ont souffert – en particulier l’Irak – de la guerre, des persécutions et de l’émigration, en devant tout laisser derrière eux ; je pense surtout aux populations chrétiennes mais aussi à celles de toutes les religions et confessions. Les victimes ont pour dénominateur commun d’être des enfants de Dieu qui ont été injustement et cruellement réprimés. C’est vraiment un geste extraordinaire de la part du Pape qui voulait le faire depuis si longtemps.

 Je me souviens que lors de la réunion de la Roaco (Réunion des Œuvres d’Aide aux Églises Orientales) en 2019, le Pape a dit : “je veux aller en Irak”. Et déjà à cette époque, toutes les espérances s’étaient ouvertes pour cette visite qui apporte consolation, stimulation, encouragement aux pasteurs de l’Église. Nous devons nous incliner devant les pasteurs qui sont restés là malgré toutes les difficultés, malgré toutes les menaces, les attaques. Ils sont restés, ils ont été l’exemple du bon pasteur qui ne fuit pas. Pour tous les prêtres, les religieux, dans ce pays si riche d’histoire, d’Abraham à l’Église assyrienne. Cela a montré leur fermeté dans la foi et dans la tribulation. Ce sera donc un geste de grande consolation et de force qui s’étendra à toute la réalité sociale, civile, politique de ce pays parce que la consolation que Jésus Christ apporte, que le Pape apporte, est pour tous et surtout pour ceux qui souffrent. Cela résonnera dans tout le Moyen-Orient après tellement d’épreuves qui traversent encore la Syrie et le Liban. Le Pape les encouragera à être dans ce contexte des hommes de communion et des témoins de l’amour de Dieu.

Vous avez visité l’Irak à plusieurs reprises. Comment le Pape François sera-t-il reçu, notamment par les musulmans ?

Le Pape François -l’homme désarmé qui n’a que les armes de la rencontre, du sourire, de l’action auprès des plus démunis- se présente avec une carte d’identité très importante: Fratelli Tutti et la Déclaration d’Abu Dhabi sur la fraternité humaine.

Comment pouvons-nous vouloir construire un nouveau monde de justice, de paix, de liberté, de respect des droits de l’Homme et de liberté religieuse, si nous ne nous considérons pas comme des frères, quelle que soit l’identité religieuse qui doit être maintenue avec engagement ? Lorsque je me suis rendu en Irak en 2019 avec tous nos délégués de la ROACO pour voir les besoins sur le terrain, j’ai pu apprécier avec quelle dignité, quel respect et quel amour le gouvernement irakien, mais aussi les autorités du Kurdistan et tous les dirigeants musulmans nous ont reçus. La première fois que je suis allé en Irak et que je suis arrivé à Kirkouk – il y avait encore de nombreuses attaques -, le patriarche Sako, qui était alors évêque, m’a fait visiter une mosquée avant tout. J’ai été reçu par des imams chiites et sunnites, j’ai même dû faire un discours. Je ne doute pas que le corps social de l’Irak, dans toutes ses composantes, recevra le Pape avec enthousiasme.

Dans votre discours lors de la réunion qui s’est tenue le 10 décembre dernier au Vatican sur l’Irak et la Syrie, vous avez rappelé que la blessure de l’émigration touche avant tout les jeunes. Que peut-on faire pour arrêter cette hémorragie ?

Cela a été dit très clairement: il est inutile que nous vivions avec ces sanctions. Il n’est pas possible de construire de nouvelles maisons. Comment les jeunes peuvent-ils y trouver la sécurité pour l’avenir, pour leurs études, la formation d’une famille ? Donnez un avenir aux jeunes. L’Église la donne du point de vue de la lumière qu’est Jésus-Christ, mais il doit y avoir des instances, nationales et internationales, qui favorisent cette permanence.

Une fois qu’ils pourront rentrer, pensez-vous que les catholiques pourront contribuer à la renaissance de leur pays ? Leur donnera-t-on la possibilité de le faire, dans le cadre d’une coexistence pacifique avec les musulmans et les autres confessions ?

Je l’espère et je le souhaite. Les chrétiens qui veulent revenir doivent trouver toutes les conditions pour une vie digne. Que ces chrétiens, qui se sont peut-être installés par l’intermédiaire de leurs familles émigrées en Occident, disent : “rentrons”. Mais il est évident que les plus grandes difficultés sont pour ceux qui reviennent, et non pour ceux qui partent. Ceux qui reviennent le font de leur plein gré. Ce ne serait pas un pays de prospérité s’ils ne pouvaient pas participer à la vie politique. C’est pourquoi nous insistons beaucoup ici à la congrégation pour que soit donné à de nombreux jeunes la possibilité de se former également à la Doctrine sociale de l’Église. Les laïcs doivent construire leur propre pays, leur patrie, et pas seulement recevoir des instructions de leurs dirigeants. C’est toi, chrétien, qui contribue, par les principes de l’Évangile, à la construction de cette société que nous voulons tous inspirée par Jésus, par la dignité de l’homme et de la femme, afin que l’on puisse y vivre selon ses propres croyances et sa foi. 

Source: VATICANNEWS, le 14 décembre 2020