Les réfugiés au Pape: «Les mots de François ont généré cet accueil»

Le Pape saluant des réfugiés le 18 mars. Le Pape saluant des réfugiés le 18 mars. (Vatican Media)

Les réfugiés au Pape: «Les mots de François ont généré cet accueil»

Ils sont arrivés en Italie depuis l’Afghanistan, la Syrie, le Congo, l’Ukraine ou d’autres pays touchés par des guerres et des urgences humanitaires, grâce aux couloirs humanitaires créés par Sant’Egidio. Sur leurs visages pouvait se lire l’émotion de leur rencontre avec François. Ces couloirs sont «un projet œcuménique» pour le président de la Communauté, Marco Impagliazzo, «qui est une réponse concrète aux trafiquants d’êtres humains». 

Andrea De Angelis – Cité du Vatican

Le soleil se lève sur le Vatican pour rappeler à tous que c’est le dernier week-end de l’hiver. Un soleil qui illumine les visages de milliers de réfugiés, dont les yeux et les sourires témoignent qu’il est possible de sortir des ténèbres de la guerre, de la persécution. Ces ombres qui vous obligent à fuir votre maison, à quitter votre pays d’origine. La lumière est arrivée pour eux grâce aux couloirs humanitaires mis en place par la communauté Sant’Egidio, l’Église évangélique, la Table vaudoise et l’Église italienne.

Un «projet œcuménique», comme le définissent ceux qui ont cru à la possibilité de garantir des voies d’accès légales aux personnes en quête de protection. Anna, syrienne, est accompagnée de son mari et de sa fille de cinq ans. «Je suis enthousiaste, je suis heureuse d’être ici avec le Pape et de vivre en Italie depuis des mois. La Syrie a encore besoin d’aide, la guerre est là, elle n’est pas finie», répète-t-elle. «Nous sommes arrivés dans un nouveau pays, avec une langue inconnue, mais – souligne-t-elle – nous ne nous sommes jamais sentis seuls, la communauté nous a toujours aidés, elle nous a pris par la main».

Anna, réfugiée syrienne

Anna, réfugiée syrienne

Protagonistes de leur propre vie

Zefa, une jeune Congolaise de 12 ans, n’a pas peur du micro. «Vous voyez comme je parle bien l’italien ? Parce qu’ici je peux étudier, j’aime étudier». Les petits frères ont tout aussi naturellement envie de parler de leurs passions. L’un dit : «J’aime le football», l’autre : «J’aime les jeux». Leur mère les regarde avec la tendresse de celle qui sait que leur avenir est plus serein qu’un passé encore trop récent pour être oublié. Il y a encore les histoires d’autres Syriens, comme celle d’Alì, qui a fui Alep et est arrivé en Italie il y a cinq ans. «Le travail est fondamental pour avoir de la dignité, pour être autonome», répète-t-il à plusieurs reprises, remerciant ceux qui lui ont permis d’avoir cette opportunité. Elyas exprime des sentiments similaires, soulignant un double aspect: la capacité à s’impliquer, à ne pas « rester là à regarder », combinée à «la grâce de savoir qui vous tend la main». «Le premier remerciement va au Pape, dont les paroles ont déclenché tout cela», dit-il. À l’âge de 33 ans, Elyas a obtenu son certificat de fin d’études secondaires, a appris la langue et se sent désormais prêt à être protagoniste de sa propre vie.

Elyas, réfugié syrien

Elyas, réfugié syrien

Parmi les témoignages, celui d’Igor, 18 ans à peine, dissident russe. Il parle peu l’italien, juste assez pour exprimer sa joie, sa surprise de voir le Pape et encore la beauté de la ville dont François est l’évêque. «Rome est belle, elle est belle». Igor pense aussi qu’il peut être un exemple pour beaucoup de ses pairs. Si j’ai réussi à venir jusqu’ici, dit-il, ils peuvent le faire aussi. Enfin, Anastasia, originaire d’Ukraine, est venue en Italie ces derniers mois, comme beaucoup de ses compatriotes. «Je suis trop heureuse», répète-t-elle, souriante, rayonnante. La lumière éclaire le drapeau jaune et bleu qu’une de ses amies porte sur ses épaules, comme une grande écharpe.  

Une réponse aux trafiquants d’êtres humains

«Nous devons élargir les voies légales et nous avons trouvé l’outil, celui des couloirs humanitaires», explique Marco Impagliazzo, président de la Communauté de Sant’Egidio. «Nous évitons ainsi les tragédies en mer et nous luttons contre les trafiquants d’êtres humains. Ceux qui fuient ont vraiment besoin de quitter leur pays». Un projet né «de la douleur, des larmes pour les trop nombreux naufrages». Une idée, poursuit-il, œcuménique et qui garantit l’accueil et l’intégration de ces personnes, comme le demande le Pape.

Des réfugiés devant la salle Paul VI du Vatican le 18 mars

Des réfugiés devant la salle Paul VI du Vatican le 18 mars

Une contribution à l’économie italienne

Il s’agit également d’une réponse aux slogans faciles qui ne répondent pas à des besoins concrets. «Il s’agit précisément de donner des solutions concrètes au lieu de soulever de nouveaux problèmes», répète Marco Impagliazzo, qui rappelle que «ce projet est gagnant parce qu’il apporte également une contribution importante à l’économie italienne, en repeuplant les villes de l’intérieur, en apprenant à vivre l’immigration sans peur et sans préjugés».

Il y a un an, l’Europe accueillait les réfugiés ukrainiens, mais y a-t-il un risque de s’habituer aux guerres? «Malheureusement oui, nous nous habituons à toutes les guerres et c’est mauvais car ceux qui vivent dans la guerre continuent de souffrir. Nous devons remercier le Pape car il nous rappelle que nous devons toujours tourner notre regard vers ceux qui souffrent, nous devons être émus et mobilisés» conclut-il.

Source : VATICANNEWS, le 18 mars 2023

François encourage l’ouverture de couloirs humanitaires

François, saluant une famille de réfugiés syriens, samedi 18 mars 2023, salle Paul VI. François, saluant une famille de réfugiés syriens, samedi 18 mars 2023, salle Paul VI. (Vatican Media)

François encourage l’ouverture de couloirs humanitaires

Environ 5 000 personnes, réfugiés du monde entier, membres de la communauté de Sant’Egidio et familles d’accueil, ont été reçues en salle Paul VI au Vatican par le Souverain pontife, dans la matinée du samedi 18 mars. À l’occasion de ce moment d’échange, le Saint-Père est revenu dans son discours sur l’importance de permettre aux exilés de rejoindre de manière sure leur terre d’accueil et ensuite de mettre en place un processus d’intégration.

Marine Henriot – Cité du Vatican

Depuis 1990, plus de 60 000 personnes sont mortes ou disparues en mer Méditerranée alors qu’elles tentaient de rejoindre les côtes européennes. C’est fort de ce dramatique constat que la communauté de Sant’Egidio, fondée en 1968 à Rome en Italie, a développé à partir des années 2010 des couloirs humanitaires. Des corridors qui permettent, via l’article 25 du règlement de l’Union européenne, de permettre à des personnes de quitter des pays dans lesquels ils se trouvent en danger, de manière légale et sûre. Ainsi, le premier couloir humanitaire de Sant’Egidio a été ouvert en décembre 2015, avec le soutien des Églises protestantes italiennes, de la Conférence épiscopale italienne et en accord avec le gouvernement de la péninsule. Ce premier corridor a permis à 500 réfugiés érythréens, somaliens et sud-soudanais de quitter les camps d’Éthiopie pour arriver en Italie.

Depuis, près de 6 000 exilés ont pu atteindre l’Europe en toute sécurité, plus de 5 000 ont été accueillis en Italie. Ce sont eux qui ont été reçus par le Pape François ce samedi et qui ont pu lui confier, quand le Pape a pris le temps de se rendre en fauteuil roulant dans la foule, leurs parcours et difficultés.

Dans son discours, François a vanté les mérites des corridors humanitaires, alors que la Méditerrannée se transforme «en cimetière»a-t-il répété, comme le témoigne le récent naufrage de Cutro dans le Sud de l’Italie, dans lequel sont mortes plus de 70 personnes. «Chacun d’entre vous mérite de l’attention pour l’histoire difficile qu’il a vécue», a dit François ajoutant: «il reste encore beaucoup à faire pour étendre ce modèle et ouvrir davantage de voies légales de migration».

L’inaction des pays européens

C’est là l’un des combats de Sant’Egidio, ouvrir plus de couloirs dans plus de pays et surtout avoir un appui plus important des différents États européens, tandis qu’aujourd’hui le système de couloirs humanitaires est totalement financé par la société civile. «Si des entités ou des institutions étatiques intervenaient, un nombre bien plus important de personnes pourrait être sauvé», rappelle la communauté catholique italienne.   

Ces corridors, comme l’a rappelé François dans son discours, ne servent pas seulement à «amener» des réfugiés en Italie, ils contribuent également au «processus vertueux» de l’intégration. En effet, via un réseau d’associations locales, les personnes exilées peuvent par exemple prendre des cours d’italien, et se voient aidées dans leurs démarches pour accéder à un emploi.

Rappelant qu’il venait lui-même d’une famille de migrants, le Saint-Père a déclaré que les exemples d’intégration des personnes réfugiées face à lui contribuaient «à dissiper les peurs et les alarmes à l’égard des étrangers».

Source : VATICANNEWS, le 19 mars 2023

Prière du pape François avec les réfugiés et départ de Malte

"Jean XXIII Peace Lab", 3 av. 2022 © Vatican Media

« Jean XXIII Peace Lab », 3 Av. 2022 © Vatican Media

Prière du pape François avec les réfugiés et départ de Malte

« Que chaque personne soit respectée dans son inviolable dignité »

« Que chaque personne soit respectée dans son inviolable dignité »: c’est la prière du pape François au terme de sa visite au centre « Jean XXIII Peace Lab », fondé en 1971 à Malte par par le p. Dionysius Mintoff, 91 ans, qui a accueilli le pape, ce dimanche 3 avril 2022.

Avant de prendre la parole, le pape François a écouté le témoignage de Daniel Oukeguale, et celui de Siriman Coulibaly.

Le pape a prononcé un discours qui est aussi comme une feuille de route pour l’accueil des migrants et des réfugiés en Eglise.

Il a ensuite allumé des cierges devant l’image de la Vierge Marie avec une famille de réfugiés. Puis il a béni des chapelets, signé le livre d’or et … dédicacé une calotte blanche, comme le matin à la Grotte de S. Paul.

Avant de partir, le pape offert au centre une céramique représentant une Vierge à l’Enfant. Il a aussi encore longuement écouté d’autres récits… si bien qu’il est arrivé à l’aéroport avec une heure de retard.

Mais l’A320neo de Malta Airline l’attendait, ainsi que le président George Vella – avec lequel il a eu un bref entretien – et sa femme Miriam , le Premier ministre Robert Abela, sa femme Margaret et leur fille, les délégations du gouvernement et de l’Eglise, mais aussi les militaires et la fanfare qui a joué les hymnes nationaux.

Dans l’avion, frappé du blason du pape, l’image de la Vierge de Bonaria – le sanctuaire de Cagliari, en Sardaigne, qui a donné, en Amérique Latine, le nom de Buenos Aires, dit-on – marquait la place du pape François, comme c’est la tradition. Le pape a touché l’icône et l’a embrassée avant de s’asseoir.

Mais il n’allait pas se reposer: il avait rendez-vous avec la presse dans l’avion.

Il est arrivé à l’aéroport de Rome Fiumicino à 20h30. Il devait faire encore une petite trentaine de kilomètres pour rejoindre le Vatican. Le Saint-Siège n’indique pas que le pape soit passé par Sainte-Marie-Majeure: il y passera probablement demain, lundi.

AB

Prière du pape François à la fin de la rencontre

Seigneur Dieu, créateur de l’univers
source de liberté et de paix
d’amour et de fraternité,
Tu nous as créés à ton image
et tu as insufflé en chacun de nous ton souffle de vie,
pour nous faire participer à ton être, dans la communion.
Même lorsque nous avons rompu ton alliance
Tu ne nous as pas abandonnés au pouvoir de la mort.
mais dans ton infinie miséricorde
tu nous as toujours appelés à revenir vers Toi
et à vivre comme tes enfants.
Répands en nous ton Esprit Saint
et donne-nous un cœur nouveau
capable d’écouter le cri, souvent silencieux,
de nos frères et soeurs qui ont perdu la
la chaleur de leur maison et de leur patrie.
Fais que nous puissions leur donner de l’espérance
avec des regards et des gestes d’humanité.
Fais de nous des instruments de paix
et d’amour fraternel concret.
Libère-nous des peurs et des préjugés,
afin que nous puissions faire nôtres leurs souffrances
et lutter ensemble contre l’injustice,
pour que grandisse un monde où chaque personne soit respectée dans son inviolable dignité,
celle que Tu as mise en nous, ô Père,
et que ton Fils a consacré pour toujours.
Amen.

Source: ZENIT.ORG, le 3 avril 2022

À Athènes, de jeunes chrétiens Syriens en quête d’un avenir de paix

Elias et Khegam, réfugiés syriens à Athènes.Elias et Khegam, réfugiés syriens à Athènes. 

À Athènes, de jeunes chrétiens Syriens en quête d’un avenir de paix

Le retour du Pape François à Lesbos marquera sans conteste l’acmé de son 35e voyage apostolique ; la question des migrants et réfugiés constitue de fait le fil rouge de ce déplacement en Méditerranée. Ils sont encore nombreux aujourd’hui dans les îles égéennes, mais également dans les grandes villes de la péninsule hellénique, dont la capitale, Athènes. Nous sommes allés à la rencontre de deux jeunes Syriens qui y sont accueillis dans un petit centre de l’Église arménienne catholique.

Manuella Affejee – envoyée spéciale à Athènes

Non loin du quartier pittoresque et touristique de Plaka qui se déploie au pied du majestueux Acropole, l’ordinariat arménien catholique de Grèce offre une atmosphère d’emblée familiale et chaleureuse à ses visiteurs. L’accueil, ici, n’est pas un vain mot mais fait véritablement partie de l’ADN de cette maison. Elle fut en effet fondée en 1921 pour être le refuge des Arméniens de Turquie ayant fui le génocide qui décima une grande partie d’entre eux.

Un point de chute pour les réfugiés syriens chrétiens

L’immigration arménienne s’étant tarie au fil des ans, l’ordinariat ralentit ses activités liées à l’accueil des réfugiés, pour se concentrer sur sa vie paroissiale. En 2015-2016, l’afflux de personnes migrantes venant essentiellement du Moyen-Orient, via la Turquie, permet à l’ordinariat de renouer avec sa vocation première. Son responsable, Mgr Joseph Bezezian, raconte avoir reçu un jour l’appel d’une ancienne paroissienne à Alep. Elle lui raconte que son fils a fui la Syrie et se retrouve en Grèce, seul et démuni. Le prêtre lui propose volontiers l’hospitalité ; un autre jeune se présente une semaine plus tard, puis un autre. C’est ainsi que le petit centre se verra héberger jusqu’à une quarantaine de personnes, toutes chrétiennes, malgré des moyens limités.

La plupart viennent de Syrie, à l’instar d’Elias et de Kegham, 22 ans chacun. Le premier est originaire de Hama, arrivé à Athènes depuis 2 ans après une odyssée de 22 semaines ; le second vient d’Idleb, après être passé par le Liban, la Turquie d’où il s’est embarqué à bord d’un canot pneumatique surchargé pour traverser la mer Égée. Il se trouve à Athènes depuis 2 semaines seulement.

L’impossibilité d’un avenir serein en Syrie

Leur histoire est celle de nombreux jeunes Syriens de leur âge. Depuis 11 ans, Elias et Kegham ne connaissent que le bruit des bombes, la destruction et les privations. Leurs familles sont restées au pays, eux se sont exilés pour fuir l’obligation du service militaire. Kegham pointe de son côté une pression de moins en moins tenable à Idleb : « Il y a du racisme envers les chrétiens, comme minorité, nous n’avons pas les mêmes droits… Cela devenait inutile que je reste en Syrie ». Le départ, pour lui et Elias, s’est imposé comme une douloureuse évidence. Leur sourire timide se teinte de tristesse lorsqu’ils évoquent leur pays et surtout leurs familles. « Nos parents, nos amis… Ce sont eux qui nous manquent le plus, même si on s’adapte à tout », avoue simplement Kegham.

Les deux jeunes Syriens, avec une dizaine d’autres, sont suivis par une équipe de 4 personnes, dont Mgr Bezezian ; l’ordinariat peut également compter sur un avocat qui pourvoit à une assistance légale ainsi que sur deux autres volontaires, en charge d’une aide médicale, le cas échéant. Pour faciliter leur intégration, des cours de grec et d’anglais leur sont proposés. Car certains pensent rester en Grèce, en dépit d’un contexte économique bien sombre. Elias, par exemple, suit actuellement une formation culinaire, en prévision de l’ouverture d’une boulangerie par l’ordinariat. Kegham aimerait plutôt aller en Allemagne, y travailler pour ensuite organiser la venue de sa famille en Europe et lui être ainsi réunie.

« Je ne me sens plus seul »

Les deux Syriens participeront à la rencontre du Pape avec les jeunes, lundi 6 décembre au matin ; plutôt réservés, ils ne sauraient trop expliquer ce qu’ils en attendent. Une chose est sûre : la venue de l’évêque de Rome -qu’ils n’ont jamais vu qu’en photo- ses paroles fortes sur les migrants et réfugiés les touchent au premier chef. « Notre réalité est mise en lumière », lâche Elias ; « je ne me sens plus seul, quelqu’un fait attention à moi, parle de moi », avoue pour sa part le jeune Kegham.

Cette attention manifestée par le Pape et l’Église universelle durant ces jours, est déjà vécue au quotidien par Elias et Kegham. La toute petite église arménienne catholique d’Athènes est devenue leur fragile point d’ancrage, et leur permet de se sentir, après tant d’épreuves, comme à la maison, comme en famille.

Source: VATICANNEWS, le 4 décembre 2021

François appelle au réveil des consciences face à la détresse des migrants

Le Pape saluant des migrants, en l'église de la Sainte-Croixà à Nicosie, le 3 décembre 2021.Le Pape saluant des migrants, en l’église de la Sainte-Croixà à Nicosie, le 3 décembre 2021.  (Vatican Media)

François appelle au réveil des consciences face à la détresse des migrants

Pour sa dernière prise de parole en territoire chypriote, le Pape François s’est rendu en l’église de la Sainte-Croix, près de la ligne de démarcation, pour une rencontre œcuménique avec des migrants. Il s’est une nouvelle fois dressé avec émotion et fermeté contre l’indifférence de certains face à la détresse des migrants.

Vatican News

Après avoir écouté les témoignages de quatre jeunes migrants, venus du Moyen-Orient, d’Afrique et d’Asie, le Pape s’est dit très ému, en expliquant que son émotion «vient de la beauté de la vérité». Il a cité ces paroles de Jésus dans l’Évangile de Matthieu: «Père, Seigneur du ciel et de la terre, je proclame ta louange: ce que tu as caché aux sages et aux savants, tu l’as révélé aux tout-petits».

L’évêque de Rome a ensuite cité la Lettre de saint Paul aux Éphésiens, «vous n’êtes plus des étrangers ni des gens de passage, vous êtes concitoyens des saints, vous êtes membres de la famille de Dieu» (Ep 2, 19). Cette parole exprime «la prophétie de l’Église, une communauté qui, avec toutes les limites humaines, incarne le rêve de Dieu», a expliqué le Pape.

La réaction de Mariamie Welo qui a témoigné devant le Pape

Désamorcer la haine en prenant la voie de la fraternité

«Dieu rêve aussi, comme toi, Mariamie, qui viens de la République Démocratique du Congo, et qui t’es définie comme “pleine de rêves”. Comme toi, Dieu rêve d’un monde de paix, dans lequel ses enfants vivent comme des frères et sœurs», a assuré François à une Congolaise qui venait de présenter son témoignage. «Nous ne sommes pas des numéros, des individus à cataloguer. Nous sommes “frères”, “amis”, “croyants”, “proches” les uns des autres», a insisté François, fils de migrants italiens venus tenter leur chance en Argentine dans les années 1920.

«Lorsque toi, Maccolins, qui viens du Cameroun, tu dis qu’au cours de ta vie tu as été “blessé par la haine”, tu nous rappelles que la haine a aussi pollué nos relations entre chrétiens», a remarqué le Pape. «Nous sommes sur le chemin du conflit à la communion. Sur ce long chemin fait de montées et de descentes, il ne faut pas avoir peur des différences entre nous, mais plutôt de nos fermetures et de nos préjugés, qui nous empêchent de nous rencontrer vraiment et de marcher ensemble.»

Dans une allusion à la blessure propre à l’île de Chypre et la barrière toute proche de cette église, François a redit que «les fermetures et les préjugés reconstruisent entre nous ce mur de séparation que le Christ a abattu, celui de l’inimiti黫Le Seigneur Jésus, vient à notre rencontre avec le visage du frère marginalisé et rejeté. Avec le visage du migrant méprisé, rejeté, en cage», mais aussi celui du migrant «qui voyage vers quelque chose, vers une espérance, vers une coexistence plus humaine», a expliqué le Pape, en dénonçant une nouvelle fois la «culture de l’indifférence» dans laquelle beaucoup se complaisent.

Le rêve d’un monde réconcilié

«Dieu nous parle à travers vos rêves. Il nous appelle, nous aussi, à ne pas nous résigner à un monde divisé, à une communauté chrétienne divisée, mais à cheminer dans l’histoire attirés par le rêve de Dieu: une humanité sans murs de séparation, libérée de l’inimitié, avec non plus des étrangers mais seulement des concitoyens. Différents, certes, et fiers de nos particularités, qui sont un don de Dieu, mais concitoyens réconciliés», a insisté l’évêque de Rome.

«Que cette île, marquée par une douloureuse division, devienne un laboratoire de fraternité», a demandé le Pape, rappelant que «la reconnaissance effective de la dignité de toute personne humaine» et «l’ouverture confiante à Dieu, le Père de tous» sont deux conditions complémentaires et indispensables à l’édification d’une société harmonieuse. «À ces conditions, il est possible que le rêve se transforme en un voyage quotidien, fait de pas concrets allant du conflit à la communion, de la haine à l’amour», a assuré François.

Le cri du Pape contre l’indifférence

Avec gravité, le Pape est ensuite sorti de son texte en évoquant la mémoire des nombreux migrants disparus en chemin, notamment ceux qui se sont noyés en Méditerranée, une mer devenue un «grand cimetière».

Évoquant une nouvelle fois les marchés aux esclaves dont des documentaires ont montré l’horreur, il a dressé un parallèle avec les personnes persécutées sous les régimes d’Hitler et de Staline. Il a aussi exprimé sa colère contre ceux qui dressent des fils barbelés aux frontières pour empêcher l’arrivée des réfugiés. Ces personnes fuient la haine mais se trouvent confrontés à d’autres formes de haine, a-t-il déclaré avec fermeté.

«Que le Seigneur réveille la conscience de nous tous ! Nous ne pouvons pas nous taire et regarder ailleurs!», a exhorté François. «La migration forcée n’est pas une habitude touristique», a martelé le Pape, dénonçant une nouvelle fois l’indifférence de l’Occident.

Il a aussi dénoncé un «esclavage universel» auquel beaucoup s’habituent. «Cette manière de s’habituer est une maladie très grave», a tonné le Pape, s’attristant aussi de l’humiliation vécue par ceux qui ont été expulsés au terme de voyages souvent ruineux.

Source: VATICANNEWS, le 3 décembre 2021

Une douzaine de réfugiés transférés de Chypre vers l’Italie

Des familles de migrants lors de la prière œcuménique dans l'église Sainte Croix de Nicosie, le 3 décembre. Des familles de migrants lors de la prière œcuménique dans l’église Sainte Croix de Nicosie, le 3 décembre.   (Vatican Media)

Une douzaine de réfugiés transférés de Chypre vers l’Italie

À l’initiative du Pape François, ces migrants doivent rejoindre l’Italie ces prochaines semaines fort d’un accord signé entre la Secrétairerie d’Etat du Saint-Siège et la communauté Sant’Egidio. Il s’agit d’un premier groupe. Au total, l’accord devrait permettre le transfert d’une cinquantaine de personnes. 

«En signe de la sollicitude du Saint-Père envers les familles et les personnes migrantes, le voyage apostolique à Chypre s’accompagnera dans les prochaines semaines d’un geste humanitaire consistant à accueillir une douzaine de réfugiés, dont certains ont été salués par le Pape ce soir à l’issue de la rencontre œcuménique de prière avec les migrants» explique un communiqué de la salle de presse du Saint-Siège, publié vendredi après-midi, peu après la rencontre entre le Saint-Père et des réfugiés dans l’église Sainte-Croix de Nicosie.

«Leur transfert et leur accueil seront rendus possibles grâce à un accord entre la Secrétairerie d’État, les autorités italiennes et chypriotes, et à la collaboration avec la Section migrants et réfugiés du Saint-Siège et la Communauté de Sant’Egidio» précise le même communiqué. 

Selon Giancarlo Penza, l’un des coordinateurs de ce couloir aérien au sein de la communauté Sant’Egidio, ce premier groupe d’une douzaine de personnes devrait arriver en Italie d’ici Noël, et trois ou quatre autres groupes suivront. Il confirme que c’est «la volonté du Saint-Père au début de ce voyage de faire ce geste d’accueil et d’hospitalité au nom du Saint-Siège pour ce groupe de réfugiés qui sont basés à Chypre». Parmi ces personnes figurent notamment quelques femmes seules avec des enfants. La relocalisation de ces personnes sera effectuée en Italie par Sant’Egidio avec l’assistance économique et financière du Saint-Siège, précise encore Giancarlo Penza. 

Pour le responsable de Sant’Egidio, comme cela l’a été par le passé avec l’organisation d’autres couloirs humanitaires, ce groupe de personnes migrantes devrait bénéficier du droit d’asile pendant un an, de quoi les rendre «autonomes et indépendantes» après leur accueil en Italie. 

Source: VATICANNEWS, le 3 décembre 2021