A l’école de Marie, une foi qui “soulage la douleur du monde”

Notre Dame des Douleurs de Sastin (Slovaquie) © capture Zenit / Vatican Media

Notre Dame Des Douleurs De Sastin (Slovaquie) © Capture Zenit / Vatican Media

A l’école de Marie, une foi qui “soulage la douleur du monde” (homélie complète)

Messe au sanctuaire de Notre Dame des Douleurs de Sastin

Une foi qui, “avec le style de Dieu, humblement et sans clameurs, soulage la douleur du monde et irrigue de salut les sillons de l’histoire” et soit « riche de compassion »: c’est l’invitation du pape François au peuple slovaque, quelques heures avant de quitter le pays, ce 15 septembre 2021. Il a insisté sur “l’impatience avec laquelle Dieu veut atteindre tous les hommes pour les sauver par son amour”.

A la conclusion de son 34e voyage apostolique – Hongrie et Slovaquie – le pape s’est rendu au sanctuaire marial de Sastin, l’un des plus importants du pays, dédié à Notre Dame des Sept Douleurs, à quelque 70 kilomètres de la capitale Bratislava.

Le sanctuaire est né au XVIe siècle, depuis qu’on installa dans une chapelle de campagne une statue de la Vierge Marie en bois de poirier de la région, la représentant avec le Christ mort dans ses bras. Voulu par une noble qui demandait l’intercession de Marie pour son époux violent, devenu rapidement un lieu de prières et de guérisons, le sanctuaire fut confié aux pères paulins et s’agrandit au fil des siècles. Pie XI proclama Notre Dame des Douleurs patronne de la Slovaquie en 1927. Mère Teresa est venue y prier en 1987, et Jean-Paul II en 1995.

Sur l’immense esplanade champêtre du sanctuaire, quelque 60.000 personnes – selon les autorités locales – ont convergé, certains arrivés à 4h du matin, d’autres ayant dormi dans leur voiture. Arrivé un peu après 9h30, le pape a fait un long bain de foule en papamobile, puis s’est recueilli dans le sanctuaire.

Dans son homélie depuis le podium géant, au pied duquel un carré était réservé aux personnes handicapées, le pape a médité sur la figure de la Vierge Marie, qui “n’est pas restée immobile à se contempler elle-même entre les quatre murs de sa maison” mais “a senti l’exigence d’ouvrir la porte et de sortir”. Marie ne reste pas dans “la sécurité d’une religiosité paisible”, a-t-il ajouté.

Au terme de quatre jours de visite dans le pays – Bratislava, Kosice, Presov – le pape a salué la foi du peuple slovaque : “une foi qui se met en marche, toujours animée par une dévotion simple et sincère, toujours en pèlerinage à la recherche du Seigneur. Et, en marchant, vous surmontez la tentation d’une foi statique qui se contente de quelques rites ou de vieilles traditions”.

« N’oublions pas ceci, a exhorté le pape : on ne peut pas réduire la foi au sucre qui adoucit la vie… Devant Jésus, on ne peut rester tiède et “jouer sur les deux tableaux”. L’accueillir signifie accepter qu’il dévoile mes contradictions, mes idoles, les suggestions du mal ; et qu’il devienne pour moi la résurrection, celui qui toujours me relève, qui me prend par la main et me fait recommencer. »

Tout comme la Vierge des Douleurs « ne s’enfuit pas » de la croix, « n’utilise pas d’artifices humains ni d’anesthésiants spirituels pour échapper à la souffrance », ainsi le pape a encouragé les chrétiens de Slovaquie à « rester sous la croix », à être des “signes de contradiction” dans le monde et à défendre la vie « là où règnent des logiques de mort ».

C’était le dernier grand rendez-vous du pape, avant son retour à Rome prévu dans l’après-midi.Sanctuaire de Sastin (Slovaquie) © capture de Zenit / Vatican Media

Sanctuaire de Sastin (Slovaquie) © capture de Zenit / Vatican Media

Homélie du pape François

Dans le Temple de Jérusalem, les bras de Marie se tendent vers ceux du vieux Siméon qui peut accueillir Jésus et le reconnaître comme le Messie envoyé pour le salut d’Israël. Dans cette scène, nous contemplons Marie : elle est la Mère qui nous donne son Fils Jésus. C’est pourquoi nous l’aimons et la vénérons. Et dans ce Sanctuaire national de Šaštin, le peuple slovaque accourt avec foi et dévotion parce qu’il sait que c’est elle qui nous donne Jésus. Dans le “logo” de ce Voyage Apostolique, on voit une route dessinée à l’intérieur d’un cœur surmonté de la Croix : Marie est la route qui nous introduit dans le Cœur du Christ qui a donné sa vie par amour pour nous.

A la lumière de l’Evangile que nous avons écouté, nous pouvons regarder Marie comme un modèle de foi. Et nous reconnaissons trois caractéristiques de la foi : la route, la prophétie, et la compassion.

Avant tout, la foi de Marie est une foi qui se met en route. La jeune fille de Nazareth, à peine reçue l’annonce de l’Ange, « se mit en route vers la région montagneuse » (Lc 1, 39), pour aller visiter et aider Elisabeth, sa cousine. Elle n’a pas considéré comme un privilège le fait d’avoir été appelée à devenir la Mère du Sauveur. Elle n’a pas perdu la joie simple de son humilité par le fait d’avoir reçu la visite de l’Ange. Elle n’est pas restée immobile à se contempler elle-même entre les quatre murs de sa maison. Au contraire, elle a vécu ce don reçu comme une mission à accomplir ; elle a senti l’exigence d’ouvrir la porte et de sortir de la maison ; elle a donné vie et corps à l’impatience avec laquelle Dieu veut atteindre tous les hommes pour les sauver par son amour. C’est pourquoi Marie se met en route : au confort des habitudes, elle préfère les incertitudes du voyage, à la tranquillité de la maison, la fatigue de la route, à la sécurité d’une religiosité paisible le risque d’une foi qui se met en jeu en se faisant don d’amour pour l’autre.

L’Evangile d’aujourd’hui nous fait aussi voir Marie en route : vers Jérusalem où, avec son époux Joseph, elle présente Jésus dans le Temple. Et toute sa vie sera une marche à la suite de son Fils, comme première disciple, jusqu’au Calvaire, au pied de la Croix. Marie marche toujours.

La Vierge est ainsi un modèle de la foi de ce peuple slovaque : une foi qui se met en marche, toujours animée par une dévotion simple et sincère, toujours en pèlerinage à la recherche du Seigneur. Et, en marchant, vous surmontez la tentation d’une foi statique qui se contente de quelques rites ou de vieilles traditions. Au contraire, vous sortez de vous-mêmes, vous portez dans vos sacs les joies et peines, et vous faites de la vie un pèlerinage d’amour vers Dieu et vers les frères. Merci pour ce témoignage ! Et s’il vous plaît, restez toujours en marche ! Ne vous arrêtez pas ! Et je voudrais encore ajouter une chose. J’ai dit : « ne vous arrêtez pas », mais quand l’Eglise s’arrête, elle tombe malade, quand les évêques s’arrêtent, ils rendent malade l’Eglise ; quand les prêtres s’arrêtent, ils rendent malade le peuple de Dieu.

La foi de Marie est une foi prophétique. Par sa vie, la jeune fille de Nazareth est une prophétie de l’œuvre de Dieu dans l’histoire, de son action miséricordieuse qui renverse les logiques du monde en élevant les humbles et en abaissant les superbes (cf. Lc 1, 52). Elle, représentante de tous les “pauvres de Jahweh” qui crient vers Dieu et attendent la venue du Messie, Marie est la Fille de Sion annoncée par les prophètes d’Israël (cf. So 3, 14-18). La Vierge concevra le Dieu avec nous, l’Emmanuel (cf. Is 7, 14). En tant que Vierge Immaculée, Marie est l’icône de notre vocation : comme elle, nous sommes appelés à être saints et immaculés dans l’amour (cf. Ep 1, 4), en devenant image du Christ.

La prophétie d’Israël culmine en Marie parce qu’elle porte dans ses entrailles la Parole de Dieu faite chair, Jésus qui réalise pleinement et définitivement le dessein de Dieu. Siméon dit à la Mère le concernant : « Voici que cet enfant provoquera la chute et le relèvement de beaucoup en Israël. Il sera un signe de contradiction » (Lc 2, 34).

N’oublions pas ceci : on ne peut pas réduire la foi au sucre qui adoucit la vie. On ne le peut pas.Jésus est un signe de contradiction. Il est venu apporter la lumière là où il y a les ténèbres, en faisant sortir les ténèbres à découvert et les contraignant à se rendre. C’est pourquoi les ténèbres luttent toujours contre lui. Celui qui accueille le Christ et s’ouvre à lui ressuscite ; celui qui le refuse s’enferme dans l’obscurité et se détruit lui-même. Jésus a dit à ses disciples qu’il n’était pas venu apporter la paix, mais un glaive (cf. Mt 10,34) : en effet, sa Parole, comme un glaive à deux tranchants, entre dans notre vie et sépare la lumière des ténèbres en nous demandant de choisir. Il nous dit : « Choisis ». Devant Jésus, on ne peut rester tiède et “jouer sur les deux tableaux”. Non ce n’est pas possible. L’accueillir signifie accepter qu’il dévoile mes contradictions, mes idoles, les suggestions du mal ; et qu’il devienne pour moi la résurrection, celui qui toujours me relève, qui me prend par la main et me fait recommencer. Il me relève toujours.

C’est vraiment de ces prophètes qu’a besoin la Slovaquie encore aujourd’hui. Vous évêques : prophètes qui marchez sur cette voie. Il ne s’agit pas d’être hostiles au monde, mais d’être des “signes de contradiction” dans le monde. Des chrétiens qui sachent montrer, par leur vie, la beauté de l’Evangile ; qui soient des tisseurs de dialogue là où les positions se durcissent ; qui fassent resplendir la vie fraternelle là où, souvent dans la société, on se divise et on est hostile ; des chrétiens qui répandent le bon parfum de l’accueil et de la solidarité, là où prévalent souvent les égoïsmes personnels, les égoïsmes collectifs ; qui protègent et préservent la vie là où règnent des logiques de mort.

Marie, Mère du chemin, se met en route; Marie, Mère de la prophétie ; enfin, Marie est la Mère de la compassion. Sa foi est compatissante. Celle qui s’est définie “la servante du Seigneur” (cf. Lc 1, 38) et qui, avec une sollicitude maternelle, s’est préoccupée de ne pas faire manquer de vin aux noces de Cana (cf. Jn 2, 1-12), a partagé avec son Fils la mission du salut jusqu’au pied de la Croix. A ce moment-là, dans la douleur déchirante vécue au Calvaire, elle a compris la prophétie de Siméon : « Et toi, ton âme sera traversée d’un glaive » (Lc 2, 35). La souffrance du Fils mourant qui prenait sur lui les péchés et les souffrances de l’humanité l’a transpercée elle aussi. Jésus déchiré dans sa chair, Homme des douleurs défiguré par le mal (cf. Is 53, 3) ; Marie, déchirée dans son âme, Mère compatissante qui recueille nos larmes et nous console en même temps, en nous montrant dans le Christ la victoire définitive.

Et la Vierge des Douleurs, sous la croix, reste simplement. Elle est sous la croix. Elle ne s’enfuit pas, ne tente pas de se sauver elle-même, elle n’utilise pas d’artifices humains ni d’anesthésiants spirituels pour échapper à la souffrance. C’est l’épreuve de la compassion : rester sous la croix. Rester le visage baigné de larmes, mais avec la foi de celle qui sait qu’en son Fils, Dieu transforme la douleur et triomphe de la mort.

Et nous aussi, en regardant la Vierge, Mère des Douleurs, nous nous ouvrons à une foi qui se fait compassion, qui devient partage de la vie avec ceux qui sont blessés, avec ceux qui souffrent et ceux qui sont obligés de porter de lourdes croix sur leurs épaules. Une foi qui ne demeure pas abstraite, mais qui nous fait entrer dans la chair et nous rend solidaire avec ceux qui sont dans le besoin. Cette foi, avec le style de Dieu, humblement et sans clameurs, allège la douleur du monde et irrigue de salut les sillons de l’histoire.

Chers frères et sœurs, que le Seigneur vous garde toujours dans l’émerveillement, vous conserve la gratitude pour le don de la foi ! Et que la Vierge Marie très sainte vous obtienne la grâce que votre foi demeure toujours en marche, qu’elle ait le souffle de la prophétie et qu’elle soit une foi riche de compassion.

Source: ZENIT.ORG, le 15 septembre 2021

Témoignage : Ján Hero, de la communauté rom, père de 5 enfants

Rencontre avec les Roms à Lunik IX, Kosice, Slovaquie © Vatican Media

Rencontre Avec Les Roms À Lunik IX, Kosice, Slovaquie © Vatican Media

Témoignage : Ján Hero, de la communauté rom, père de 5 enfants

Rencontre au ghetto de « Lunik IX »

« Nous voyons votre visite comme une manifestation d’intérêt et une confirmation de l’Amour inconditionnel de Dieu pour la communauté des Roms en Slovaquie et pour les Roms du monde entier » : Ján Hero, Rom de 61 ans, remercie ainsi le pape François pour sa visite au ghetto de Lunik IX, ce 14 septembre 2021.

Voici notre traduction du témoignage de ce père de famille de cinq enfants, marié à une Slovaque, entendu au troisième jour du voyage apostolique du pape en Slovaquie, lors de son étape dans la ville de Kosice.

Témoignage de Ján Hero

Saint Père, 

Beaucoup de Roms de la Slovaquie et certains de ce quartier nous rappellent encore avec vivacité la belle rencontre avec vous durant le pèlerinage des Roms à Rome, il y a 6 ans. 

A cette occasion, vous nous avez assuré de l’amour de l’Eglise et au terme de votre discours vous nous avez encouragés avec les paroles de saint Paul VI lors de sa mémorable rencontre avec les Roms il y a 56 ans : “Dans l’Eglise vous n’êtes pas à la périphérie, mais en un certain sens, vous êtes au centre, vous êtes dans le coeur. Vous êtes dans le coeur de l’Eglise.”

Nous sommes très heureux que comme successeur de saint Pierre apôtre vous confirmiez ces paroles par votre visite en Slovaquie et de façon spéciale lors de cette rencontre avec la communauté des Roms. Vous venez à une période où le monde entier se trouve dans la situation difficile de la pandémie qui a touché de façon dramatique aussi les Roms de toute l’Europe. Nous voyons votre visite comme une manifestation d’intérêt et une confirmation de l’Amour inconditionnel de Dieu pour la communauté des Roms en Slovaquie et pour les Roms du monde entier. Nous espérons que votre mission aujourd’hui ici, au milieu de nous, nous aide à allumer une plus grande foi en ce lieu et une détermination plus solide à transformer notre vie personnelle et spirituelle.

C’est pourquoi nous vous souhaitons cordialement bienvenue parmi nous en attendant que vos paroles et vos prières nous conduisent à la certitude intérieure que le chemin de la foi soit un point de départ pour notre vie, pour nos relations dans nos familles et pour améliorer le niveau social et communautaire de la vie. Nous croyons que Jésus Christ nous aide à dépasser les tensions dans notre cohabitation avec les autres groupes ethniques. 

Saint Père, priez pour nous afin que par l’intercession de la Vierge Marie notre Mère céleste, nos familles aussi deviennent de véritables disciples de Jésus Christ, porteurs de la paix, de l’amour et de l’espérance. 

Nous vous assurons aussi de nos prières pour vous et pour votre service de toute l’Eglise ! 

Source: ZENIT.ORG, le 14 septembre 2021

Devant l’Église slovaque, le Pape exhorte à cultiver la liberté avec Dieu 

Devant l’Église slovaque, le Pape exhorte à cultiver la liberté avec Dieu 

Pour son deuxième jour en terre slovaque, le Souverain pontife argentin a rencontré l’ensemble des évêques, prêtres et religieux de Slovaquie en la cathédrale catholique Saint-Martin de Bratislava, lundi 13 septembre 2021. Dans son discours, le Pape François a insisté sur la relation de liberté à nourrir dans la vie spirituelle et dans l’Église. 

Le Pape François a d’emblée fait allusion au style de la première communauté chrétienne,«assidus et unanimes, ils marchaient ensemble» (cf. Ac 1, 12-14), affirmant que l’Église avait besoin de cela. Elle n’est «pas une forteresse», «une puissance, un château situé en hauteur qui regarderait le monde avec distance et suffisance». «S’il vous plaît, ne cédons pas à la tentation de la magnificence, de la grandeur mondaine!», s’est exclamé l’évêque de Rome, pronant une Église humble, «qui ne se sépare pas du monde et ne regarde pas la vie avec distance, mais y habite».

Le centre de l’Église n’est pas l’Église

Cela aide à sortir de l’autoréférentialité: le centre de l’Église n’est pas l’Église!, a ensuite lancé François, appelant à sortir «de l’inquiétude excessive pour nous-mêmes, pour nos structures, pour la façon dont la société sympathise avec nous». 

Et le Pape de s’interroger: quels sont les besoins et les attentes spirituels de notre peuple? Qu’attend-on de l’Église?, a-t-il questionné proposant trois mots-clés.

Le premier est liberté. «Sans liberté, il n’y a pas de véritable humanité, parce que l’être humain a été créé libre pour être libre. Les périodes dramatiques de l’histoire de votre pays sont un grand enseignement: lorsque la liberté a été blessée, violée et éliminée, l’humanité a été dégradée et les tempêtes de la violence, de la coercition et de la privation des droits se sont déchaînées», a-t-il déclaré, ajoutant: «La liberté n’est pas une conquête automatique qui demeure une fois pour toutes. La liberté est toujours un chemin, parfois pénible, à renouveler continuellement. Il ne suffit pas d’être libre extérieurement, ou à travers les structures de la société, pour l’être vraiment».

Le risque du choix 

Il est parfois plus commode de ne pas se laisser provoquer par les situations concrètes et de continuer à répéter le passé, sans y mettre le cœur, sans le risque du choix, a pointé du doigt le Pape François, dénonçant l’attitude qui consiste à «passer sa vie en faisant ce que d’autres –peut-être la masse ou l’opinion publique– décident pour nous».

Le Pape critique cette attitude aussi dans l’Église, où cette idée peut faire son chemin: «mieux vaudrait avoir toutes les choses prédéfinies, des lois à observer, la sécurité et l’uniformité, plutôt que d’être des chrétiens responsables et adultes qui pensent, interrogent leur conscience et se remettent en cause». Dans la vie spirituelle et ecclésiale, la tentation existe de chercher une fausse paix qui nous laisse tranquille, plutôt que le feu de l’Evangile qui nous inquiète et nous transforme, alerte le Pape, exhortant à laisser place «à l’aventure de la liberté, même dans la vie spirituelle», sans quoi celle-ci risque de devenir «un lieu rigide et fermé».

«N’ayez pas peur de former les personnes à une relation mûre et libre avec Dieu. L’Église du Christ ne veut pas dominer les consciences ni occuper les espaces, elle veut être une “fontaine” d’espérance dans la vie des personnes», a fait remarquer le Pape.

“L’Église du Christ veut être une “fontaine” d’espérance dans la vie des personnes”

«Que l’annonce de l’Évangile soit libératrice, jamais écrasante. Et que l’Église soit signe de liberté et d’accueil!», a souhaité le Saint-Père.

La riche tradition chrétienne

Deuxième mot, avancé par le Pape, la créativité, citant l’exemple «des figures lumineuses des saints Cyrille et Méthode».

«Cyrille et Méthode ont parcouru ensemble cette partie du continent européen et, brûlants de passion pour l’annonce de l’Evangile, ils sont arrivés à inventer un nouvel alphabet pour traduire la Bible, les textes liturgiques et la doctrine chrétienne», a affirmé le Pape. «Ainsi ils sont devenus des apôtres de l’inculturation de la foi auprès de vous, des inventeurs de nouveaux langages pour transmettre la foi, ils ont été créatifs dans la traduction du message chrétien, ils ont été si proches de l’histoire des peuples qu’ils rencontraient qu’ils ont parlé leur langue et assimilé leur culture. La Slovaquie n’a-t-elle pas encore besoin de cela aujourd’hui?», a interrogé François avant de poursuivre: «N’est-ce pas là la tâche la plus urgente de l’Eglise auprès des peuples de l’Europe : trouver de nouveaux “alphabets” pour dire la foi?  

L’Évangile, en effet, estime le Saint-Père, ne peut pas croître s’il n’est enraciné dans la culture d’un peuple, c’est-à-dire dans ses symboles, dans ses interrogations, dans ses paroles, dans sa manière d’être. «Les deux frères ont été beaucoup gênés et persécutés, vous le savez. Ils étaient accusés d’hérésie parce qu’ils avaient osé traduire la langue de la foi. Voilà l’idéologie qui naît de la tentation d’uniformiser. Mais l’évangélisation est un processus d’inculturation : elle est une semence féconde de nouveauté».  

Le souvenir des blessures, brèches pour imiter Dieu

Enfin, troisième et ultime piste suggérée par François, le dialogue. L’unité, la communion et le dialogue sont toujours fragiles, surtout quand il y a derrière une histoire de souffrances qui a laissé des cicatrices, affirme-t-il. En effet, «le souvenir des blessures peut entraîner le ressentiment, la méfiance, et même le mépris, en incitant à élever des barrières». Mais, relève enfin François, «les blessures peuvent être des brèches, des ouvertures qui, en imitant les plaies du Seigneur, font passer la miséricorde de Dieu».

Source: VATICANNEWS, le 23 septembre 2021

«Ne vous laissez pas emprisonner par la tristesse ou le découragement»

«Ne vous laissez pas emprisonner par la tristesse ou le découragement»

Depuis le stade Lokomotiva de Košice le Pape François est allé à la rencontre de milliers de jeunes slovaques, dialoguant avec eux et les invitant à garder confiance en Dieu face aux défis du monde contemporain.

Olivier Bonnel-Cité du Vatican 

Près de 30 000 jeunes avaient pris place dans le stade lokomotiva de Košice pour rencontrer le Pape François. Le Saint-Père a effectué un tour en papamobile sous les vivats et les drapeaux aux couleurs slovaques et du Saint-Siège. Un temps d’échanges qui a pris comme souvent la forme d’un dialogue, le Pape répondant à des questions posées par des jeunes. Très souriant, le Saint-Père s’est fait l’écho des inquiétudes et des espérances de ces Slovaques, venus parfois en famille à sa rencontre.

«L’amour est le plus grand rêve de la vie, mais ce n’est pas un rêve bon marché» a commencé François en répondant à une question sur l’amour dans le couple. Le Pape a ainsi invité à ne pas «banaliser l’amour, car l’amour n’est pas seulement émotion et sentiment, cela c’est plutôt le commencement. L’amour, ce n’est pas d’avoir tout et tout de suite. L’amour ne répond pas à la logique du jetable. L’amour est fidélité, don, responsabilité». 

Se révolter contre la culture du provisoire

«La vraie originalité aujourd’hui, la vraie révolution, c’est de se révolter contre la culture du provisoire, c’est aller au-delà de l’instinct et au-delà de l’instant», a t-il poursuivi. Le Pape a invité les jeunes à regarder les « grandes histoires » dans lesquelles se trouvent toujours deux ingrédients qui vont toujours ensemble: «l’un est l’amour, l’autre est l’aventure, l’héroïsme». «Chacun de vous est particulier. Chacun est un don et peut faire de la vie un don. Les autres, la société, les pauvres vous attendent» a t-il expliqué. En regardant Jésus, on peut voir à la fois cet amour infini et le courage de donner la vie jusqu’au bout, sans demi-mesure.

«Les rêves que nous faisons nous disent la vie que nous voulons»

Une nouvelle fois, le Saint-Père a exhorté les jeunes à rêver. «Rêvez d’une beauté qui aille au-delà de l’apparence, au-delà des tendances de la mode. Rêvez sans avoir peur de former une famille, d’engendrer et d’éduquer des enfants, de passer votre vie en partageant tout avec une autre personne, sans avoir honte de vos fragilités, parce que lui, ou elle, les accueille, les aime et vous aime comme vous êtes. Les rêves que nous faisons nous disent la vie que nous voulons». 

Les grands rêves a poursuivi le Pape ne sont pas dans la culture de l’immédiateté, la voiture puissante ou le vêtement à la mode, mettant en garde contre ceux qui «vendent des illusions : ces manipulateurs de bonheur». Chacun, au contraire, est unique aux yeux de Dieu, et nous sommes au monde «pour vivre une histoire d’amour avec Dieu, pour embrasser l’audace de choix forts, pour nous aventurer dans le risque merveilleux d’aimer». Pour que l’amour porte du fruit, a encore souligné le Saint-Père «n’oubliez pas les racines». Et d’encourager à cultiver le lien avec les plus anciens, les grands-parents, à prendre «le temps d’écouter leurs histoires». 

Un Père qui nous relève en toute situation

Reprenant les paroles de Petra, une jeune Slovaque qui a évoqué la Confession, François est revenu sur ce lien avec la miséricorde de Dieu. «Les péchés sont-ils vraiment le centre de la Confession ?  a t-il demandé, Dieu veut que tu t’approches de lui en pensant à toi, à tes péchés, ou bien à lui ? Quel est le centre, les péchés ou bien le Père qui pardonne tout ?» François a donné ainsi un conseil: «après chaque Confession, restez quelques instants pour vous rappeler le pardon que vous avez reçu. Conservez cette paix dans le cœur, cette liberté que vous sentez en vous. Non pas les péchés, qui n’y sont plus, mais le pardon que Dieu vous a donné».

A ceux qui pourrait avoir « la honte » d’aller se confesser, le Saint-Père a expliqué aussi qu’il ne s’agit pas d’un problème mais d’une bonne chose, et le signe d’aller plus loin car «Dieu n’a jamais honte de toi. Il t’aime là où tu as justement honte de toi-même. Et il t’aime toujours». 

Se laisser embrasser par le Christ 

Le Pape a enfin terminé en répondant au témoignage de Peter et Lenka, un couple parent de trois enfants, et qui ont traversé des phases très difficiles en raison notamment d’une grave maladie de Peter.  «Vous avez demandé comment encourager les jeunes à ne pas avoir peur d’embrasser la Croix. Embrasser : c’est un beau verbe. Embrasser aide à vaincre la peur. Quand nous sommes embrassés, nous retrouvons confiance en nous-mêmes et dans la vie». «La Croix ne peut s’embrasser toute seule ;  a t-il conclu, la souffrance ne sauve personne. C’est l’amour qui transforme la souffrance. C’est donc avec Jésus que l’on embrasse la croix, jamais seuls !» Si l’on embrasse Jésus, alors la joie renaît.

Source: VATICANNEWS, le 14 septembre 2021