International Christian Concern publie sa liste des pires persécuteurs des chrétiens dans le monde

L’ONG américaine International Christian Concern (ICC) a publié le 2 novembre son rapport concernant les dix pays où elle considère que le sort des chrétiens est le plus préoccupant. Ce rapport mentionne une dizaine de pays. L’ONG présente ce document comme « un rapport pour faire briller la lumière dans l’obscurité ».

Dans son dernier rapport, International Christian Concern place le Nigeria au sommet des pays où les chrétiens sont le plus persécutés. L’Azerbaïdjan entre dans la liste à la 10e place en raison de sa guerre contre la culture chrétienne du Haut-Karabagh.

Nigeria : fermer les yeux sur le génocide

Le Nigeria est le pays où le plus grand nombre de chrétiens sont tués, 5 014 selon l’Index mondial 2023 de la persécution de l’ONG Portes Ouvertes. De son côté, en s’appuyant sur les seuls rapports qu’elle a recueilli, ICC a recensé 55 attaques qui ont coûté la vie à 549 chrétiens du 4 mars au 6 juillet, dont au moins 100 mi-mai lors d’attaques contre 16 villages chrétiens dans l’État du Plateau. L’ONG rappelle que des groupes djihadistes comme Boko Haram et des bergers peuls mènent depuis 20 ans un génocide contre les chrétiens du pays en en kidnappant, torturant et tuant chaque semaine. Les Peuls musulmans tuent les chrétiens pour s’emparer de leurs terres. Ces attaques conduisent de plus en plus d’églises à fermer leurs portes pour la protection des fidèles.

Par exemple, dans l’État de Kaduna, 200 églises ont été fermées en quatre ans, 23 pasteurs et des centaines de chrétiens ont été tués durant la même période. ICC accuse le gouvernement et une grande partie de la communauté internationale de nier les motifs religieux derrière la violence contre les chrétiens, et elle souligne que l’adoption de la charia dans 12 États du Nord contribue à augmenter la persécution des chrétiens.

Le niveau de violence de l’État islamique en Afrique de l’Ouest est tel que le Nigeria remplace l’Irak comme pays où l’État islamique revendique le plus grand nombre d’opérations avec des milliers de morts.

Corée du Nord : une dynastie de mort

ICC rappelle que la Corée du Nord est le pays le plus fermé au monde, mais que l’on peut estimer à environ 400 000 le nombre de chrétiens dans le pays. Tous vivent leur foi en secret, ils sont vus comme une menace pour le régime et ses dirigeants déifiés, ainsi que comme un vaisseau de l’impérialisme américain.

Comme son père Kim Jong-il et son grand-père Kim Il-sung, Kim Jong-un dirige le pays d’une main de fer et envoie dans les camps du goulag ceux qui sont soupçonnés de s’opposer à son pouvoir, dont les chrétiens. On a appris cette année qu’un bébé avait été condamné en 2009 à la prison à vie parce que ses parents possédaient une bible. En effet, il suffit qu’une personne soit considérée comme dissidente pour que ses parents et ses enfants soient également condamnés.

Inde : le nationalisme hindou avant tout

L’Inde connaît une montée du nationalisme radical et religieux, ciblant principalement les chrétiens et les musulmans via des accusations de blasphème et des lois anti-conversion dans 11 États fédérés. ICC souligne que, souvent, des foules à la fois organisées et spontanées attaquent les minorités religieuses en toute impunité. Les violences dans le Manipur en mai 2023 et les mois suivants ont été médiatisées en Occident et témoignent de la passivité du gouvernement central de Narendra Modi, lui-même nationaliste hindou. Des députés ont déposé une motion de censure contre le Premier ministre en raison de son inaction. Fin juillet, deux femmes ont dû marcher nues dans les rues du Manipur, l’une d’elles a ensuite subi un viol collectif.

Même si elle est techniquement une démocratie laïque, l’Inde s’éloigne loin des principes de paix et d’inclusion envisagés par ses fondateurs il y a 76 ans. Les problèmes ne se situent pas non plus uniquement au niveau communautaire, Modi encourageant implicitement les foules à attaquer les minorités en refusant de faire respecter l’État de droit ou de condamner les attaques.

Iran : effacer le christianisme

Selon une étude de 2020, deux millions d’Iraniens se seraient convertis au christianisme, souligne ICC, alors que l’apostasie est sanctionnée par la peine de mort. Depuis la révolution de 1979, des vagues de persécutions ont frappé les Iraniens qui décident de devenir chrétiens. Le régime tente de faire taire publiquement la foi des chrétiens. Toutes les Bibles farsi et la littérature chrétienne sont interdites ; partager sa foi avec les autres est interdit. Les groupes chrétiens sont constamment surveillés par les autorités et les pasteurs ont régulièrement été arrêtés, interrogés et emprisonnés.

Les autorités peuvent faire pression sur des chrétiens pour qu’ils fournissent de faux témoignages permettant d’arrêter des pasteurs. Matthias Haghnejad a ainsi été envoyé en prison à plus de 1600 km de chez lui après avoir été faussement accusé. Cependant, le pouvoir libère des chrétiens, notamment à l’occasion de l’anniversaire de la révolution, comme nHadi Rahimi a été libéré le 20 février après avoir passé un peu plus d’un an en prison, et son confrère Saheb Fadaie a été libéré le 9 février après avoir passé 5 ans en prison. Les deux hommes ont été emprisonnés pour « atteinte à la sécurité nationale » en promouvant le christianisme « sioniste ».

Chine : mettre la fête avant Dieu

Le Parti communiste chinois ne tolère pas la liberté de religion. Le gouvernement chinois exige que les citoyens vénèrent l’État, en faisant de toutes les structures religieuses possibles le porte-parole de la propagande du PCC à travers un programme connu sous le nom de sinisation. Ainsi, les églises protestantes et catholiques autorisées sont en réalité dirigées par l’État et ne sont que des marionnettes du gouvernement.

La seule possibilité pour les chrétiens d’avoir des partages cultuels authentiques réside dans le réseau informel d’églises de maison, mais le pouvoir les persécute. En prison, les chrétiens sont privés de soins, et un ancien chirurgien affirme que les autorités prélèvent des organes sur des prisonniers chrétiens.

Bien que le gouvernement autorise l’existence d’une église protestante et d’une église catholique, les deux sont dirigées par l’État et fonctionnent comme des marionnettes du gouvernement. Aujourd’hui, le seul choix pour les chrétiens souhaitant pratiquer leur culte en dehors des frontières de l’État est de rejoindre un réseau informel d’églises de maison. Malheureusement, ces églises de maison sont fortement persécutées et leurs membres sont constamment harcelés et soumis à des pressions en raison de leur affiliation.

En juillet, le Parti communiste aurait réécrit la Bible afin d’accroître son contrôle sur les chrétiens.

Pakistan : un foyer de persécution

En août, la communauté chrétienne de Jaranwala a vu surgir des foules de musulmans qui ont détruit 400 maisons et 26 églises, obligeant les habitants à fuir. En cause, l’accusation de blasphème lancée contre deux chrétiens. ICC souligne que « malgré l’incohérence des lois sur le blasphème avec le droit international des droits de l’homme, elles sont souvent défendues comme un moyen de parvenir à la paix et à l’harmonie religieuse dans la société. » Cependant, dans la pratique, les lois sur le blasphème sont utilisées pour promouvoir l’intolérance gouvernementale.

Les chrétiens pakistanais sont confrontés à des niveaux extrêmes de discrimination en raison de leur identité religieuse. Ils sont souvent considérés comme des citoyens de seconde zone, occupant les emplois les plus sales sans aucun espoir d’avancement. Cette discrimination est fréquemment constatée dans le nombre de chrétiens impliqués dans le personnel d’assainissement au Pakistan ou dans les emplois des briqueteries.

Érythrée : le régime le plus répressif d’Afrique

Dans cette ancienne région d’Éthiopie, le pouvoir persécute les croyants des diverses communautés religieuses non reconnues. Le pays est connu pour le traitement inhumain de ses prisonniers, particulièrement des minorités religieuses. Les chrétiens sont poussés à renoncer à leur foi, sous la menace imminente d’être torturés et de continuer à être emprisonnés. Ils sont placés dans des cellules de conteneurs métalliques où ils sont confrontés à des températures extrêmes et à la famine. Ils sont 5 000 à être détenus dans de telles conditions, selon ICC qui ajoute que « pour de nombreux croyants emprisonnés, il n’y a pas d’échappatoire terrestre ».

Cette année est la 19e passée en détention par les pasteurs Kiflu Gebremeskel et Haile Nayzgi, alors qu’il n’y a aucune accusation officielle contre eux. Les autorités leur avaient demandé de « renier le Christ ».

Un décret gouvernemental de 2022 exigeait que tous les groupes religieux s’enregistrent, ce qui a entraîné la fermeture de tous les groupes religieux à l’exception de l’Église orthodoxe érythréenne et de l’Église évangélique luthérienne érythréenne, de l’Église catholique romaine et Islam. Les membres d’autres confessions chrétiennes ont été contraints de fuir le pays, d’être emprisonnés ou de pratiquer leur culte dans la clandestinité. Les membres des groupes agrées risquent également d’être enfermés s’ils critiquent le gouvernement.

En avril de cette année, la police érythréenne a perquisitionné un groupe d’étudiants chrétiens qui s’étaient rassemblés pour prier et enregistrer des clips vidéo pour les réseaux sociaux. Les autorités ont arrêté 103 chrétiens.

Algérie : fermetures d’églises et arrestations de chrétiens

L’Algérie a fermé des dizaines d’églises protestantes affiliées à l’Église protestante d’Algérie, laissant des centaines de personnes sans lieu de culte. De plus, alors que les lieux de cultes ont rouvert après l’épidémie de Covid-19, plusieurs églises sont restées fermées. Plusieurs chrétiens convertis, comme Foudhil Bahloul et Rachid Seighir, sont arrêtés pour activités de prosélytisme. Le Code pénal comprend une disposition sur le blasphème qui permet aux autorités d’arrêter des non-musulmans pour prosélytisme et tout ce qui pourrait “ébranler la foi d’un musulman”.

La répression du gouvernement contre les pratiques religieuses non musulmanes se manifeste par des arrestations systématiques de pasteurs, des fermetures forcées d’églises chrétiennes et une surveillance gouvernementale des travailleurs religieux, observe ICC.

Indonésie : les défis persistent pour les minorités

Les extrémistes musulmans ciblent les minorités religieuses en Indonésie, exploitant les violences des lois sur le blasphème qui intimident et répriment les croyances non islamiques. Des obstacles juridiques empêchent les églises de construire ou entretenir des lieux de culte. Dans le plus grand pays musulman du monde, il y a une différence entre la volonté sincère du président Joko Widodo de voir chacun bénéficier de la liberté religieuse et les obstacles que rencontrent les chrétiens confrontés aux islamistes.

En décembre 2022, le parlement indonésien a adopté un nouveau Code pénal controversé qui a considérablement porté atteinte aux droits humains dans le pays. Entre autres dispositions, le nouveau code a assoupli la définition du blasphème et augmenté les peines associées à la violation de la loi. Il contenait également une interdiction vague de l’évangélisation, une évolution inquiétante pour les chrétiens et d’autres groupes minoritaires.

En juin dernier, une centaine de musulmans ont manifesté dans un centre commercial local pour empêcher les chrétiens d’utiliser une salle qu’ils avaient louée comme lieu de culte, observe ICC. Le même mois, les habitants de Bekasi ont tenté de faire cesser un culte chrétien dans leur quartier, ce qui a obligé le pasteur Ellyson a expliqué sur les réseaux sociaux qu’ils n’essayaient pas de construire une église mais qu’ils voulaient seulement adorer avec d’autres chrétiens. En août, la route nouvellement construite menant à l’église pentecôtiste indonésienne de Sungai Bahar, Muaro Jami, a été bloquée de manière inattendue.

Azerbaïdjan : remplir sa promesse de débarrasser le peuple arménien de sa terre

La guerre de l’Azerbaïdjan contre le Haut-Karabagh n’est pas qu’un conflit quant à une revendication territoriale. Au cours des dernières décennies, l’Azerbaïdjan a montré son intention de se débarrasser de la culture arménienne, synonyme de christianisme, notamment en détruisant d’importants monuments et églises historiques en Arménie et dans le Haut-Karabagh. L’objectif final de l’Azerbaïdjan est clair, constate ICC : débarrasser ses frontières du christianisme. Soit en forçant le peuple arménien et sa foi à quitter l’Azerbaïdjan, soit en détruisant la population et les sites historiques.

Le président Ilham Aliyev tient un discours de discrimination ethnique et d’intolérance religieuse, utilisant régulièrement une rhétorique désobligeante à l’encontre des Arméniens qu’il qualifie de “barbares” ou “rats” pour les déshumaniser le peuple arménien. Pour la plupart des habitants de la région, être arménien, c’est être chrétien. Par conséquent, la persécution contre les Arméniens et les résidents arméniens de la Corée du Nord est une persécution qui a également une dimension religieuse.

Jean Sarpédon

Source : INFOCHRETIENNE, le 8 novembre 2023

Violence ethnique contre les Amharas en Ethiopie : l’ECLJ écrit au conseiller spécial de l’ONU pour la prévention du génocide

Illustration : Mme Alice Wairimu Nderitu, Conseillère spéciale du Secrétaire général pour la prévention du génocide, Compte X- Twitter @UNOSAPG

Comme nous l’écrivions il y a peu ici, le peuple Amhara, qui est une communauté majoritairement chrétienne orthodoxe en Éthiopie, est soumis à une persécution violente et systématique depuis des décennies. Alors que la situation s’aggrave et que l’état d’urgence a été déclaré, l’ECLJ a écrit à la Conseillère spéciale des Nations unies pour la prévention du génocide afin qu’elle lance une mission d’enquête.

Il y a trois semaines, le Centre européen pour le droit et la justice (ECLJ) a soumis une déclaration écrite (en anglais uniquement) au Conseil des droits de l’homme des Nations unies pour dénoncer les violations graves des droits de l’homme commises à l’encontre du peuple Amhara. Les principaux persécuteurs sont les Omoros et les Tigréens (Front de libération du peuple tigréenArmée de libération oromo et le Parti de la prospérité) et la principale cause de cette persécution réside dans le fait que les structures de gouvernance éthiopiennes ont été dominées par les Amharas. L’association historique des Amharas avec la monarchie éthiopienne et l’Église chrétienne orthodoxe a souvent été perçue comme une forme d’hégémonie culturelle et politique sur les autres ethnies, en particulier les Oromos et les Tigréens.

Les griefs entre les groupes ethniques Oromo, Tigré et Amhara se sont manifestés de manière inquiétante, avec une escalade de la violence, jusqu’à des nettoyages ethniques et des atrocités de grande échelle. La situation est devenue très difficile avec l’arrivée au pouvoir, en 2018, d’un Premier ministre d’origine oromo.

Rien qu’en mai 2023, le gouvernement aurait détenu plus de 4 500 personnes de l’ethnie amhara. Ce nombre a grimpé après la déclaration de l’état d’urgence par le Gouvernement le 4 août 2023, jusqu’à environ 14.000 Amharas appréhendés depuis, selon des affirmations concordantes.

C’est pourquoi l’ECLJ a envoyé une lettre urgente (en anglais ici) au conseiller spécial pour la prévention du génocide, Alice Wairimu Nderitu. Les rapports qui nous parviennent font état d’une série de graves violations des droits de l’homme commises à l’encontre du peuple Amhara, y compris des violences ethniques de tendance génocidaires.

Comme nous l’avons indiqué, la situation requiert sans le moindre doute son attention :

Les rapports d’incidents sont profondément troublants. La nature de ces actes couvre un large éventail d’atrocités, allant de l’éviscération de femmes enceintes à la consommation cannibale des personnes tuées. Ces actes vont au-delà de la simple expression d’un mécontentement ou d’une dissidence politique ; ils témoignent d’une haine profondément enracinée qui a été manipulée et mobilisée pour justifier des crimes odieux. Ce niveau d’animosité est alimenté par une combinaison de griefs historiques, de manipulations politiques, de conditionnement social et de discours de haine largement répandus qui, ensemble, créent un environnement toxique propice à la perpétration de violences de masse.

Nous avons également mis l’accent sur les auteurs identifiés qui nous ont été décrits dans de nombreux rapports et souligné les motivations ethniques et religieuses des atrocités perpétrées contre le peuple Amhara :

Ces attaques visent la communauté amhara et les chrétiens orthodoxes auxquels elle est associée. Les auteurs semblent être le Qeerroo (qui se traduit littéralement par Jeunesse en langue oromo), l’armée de libération oromo (OLA), les miliciens gumuz, le Front de libération du peuple du Tigré et le Parti de la prospérité, actuellement au pouvoir. Le caractère ciblé et systématique de ces attaques contre les Amharas et les chrétiens orthodoxes révèle une intention non seulement d’intimider, mais aussi d’éliminer, physiquement ou culturellement, une communauté spécifique. Il s’agit là de la marque d’un nettoyage ethnique, voire d’un génocide, qui constituent tous deux des crimes contre l’humanité au regard du droit international.

C’est pourquoi nous avons attiré l’attention de la Conseillère spéciale et demandé une mission d’enquête pour établir la vérité sur les atrocités signalées contre les Amharas et les chrétiens orthodoxes en Éthiopie, depuis le 13 septembre 2018. Nous lui avons également demandé de mettre en garde le Secrétaire général et le Conseil de sécurité contre l’escalade des violences en Éthiopie. La perpétration d’un génocide contre les Amharas est peut-être en train de devenir une réalité.

Nous vous encourageons à signer notre pétition et à nous suivre sur Twitter (X), car l’ECLJ prononcera une déclaration orale lors d’un Dialogue interactif avec la Commission internationale d’experts en droits de l’homme sur l’Éthiopie le 21 septembre 2023. Ce débat officiel aura lieu lors de la 54esession ordinaire du Conseil des droits de l’homme à Genève, en Suisse.

PÉTITION :

Pour la défense des Chrétiens persécutés Lire le texte complet de la pétition

Source : l’ECLJ (European Centre for Law & Justice), le 19 juin 2023

Le Pape François dénonce l’instrumentalisation de Dieu à des fins violentes

Une paroisse du Manipour en Inde, détruite après un incendie criminel, le 3 mai 2023. Une paroisse du Manipour en Inde, détruite après un incendie criminel, le 3 mai 2023. (© ACN)

Le Pape François dénonce l’instrumentalisation de Dieu à des fins violentes

À l’occasion de la Journée en mémoire des victimes de la violence fondée sur la religion ou la conviction, François appelle dans un tweet à mettre fin à l’instrumentalisation des religions pour inciter à la haine, à la violence ou au fanatisme. Selon plusieurs ONG, les chrétiens sont la communauté religieuse la plus persécutée dans le monde.

Adriana Masotti-Cité du Vatican

«Je renouvelle l’appel à cesser d’instrumentaliser les religions pour inciter à la haine, à la violence, à l’extrémisme et au fanatisme et à cesser d’utiliser le nom de Dieu pour justifier des actes de meurtre, d’exil, de terrorisme et d’oppression». C’est ce qu’a écrit ce mardi le Pape François dans un tweet, reprenant quelques mots du Document sur la fraternité humaine, à l’occasion de la Journée internationale de commémoration des victimes d’actes de violence fondés sur la religion ou la conviction, instituée par l’Onu et qui a lieu le 22 août.

Selon l’ONG Portes Ouvertes, il est «impossible de ne pas mentionner l’augmentation de la violence contre les chrétiens» perpétrée dans de nombreux pays où les minorités sont particulièrement vulnérables et ciblées. Or, ce sont précisément les chrétiens qui, selon un rapport du Pew Research Center (Etats-Unis), constituent la communauté religieuse la plus persécutée dans le monde en raison de leur foi. 

Dans un communiqué, l’ONG indique que l’augmentation des actes violents fondés sur la religion à l’encontre des minorités chrétiennes est particulièrement évidente en Inde (Manipur), au Pakistan (Punjab), au Nigéria, au Cameroun ou encore au Bangladesh. Dans l’État de Manipur, au nord-est de l’Inde, de violents affrontements font rage depuis près de trois mois en raison des tensions entre le groupe ethnique Meitei, majoritairement hindou, et la minorité Kuki-Zomi, majoritairement chrétienne.

Les tensions, qui ont fait des dizaines de victimes, se sont aggravées après que le gouvernement pro-hindou de Manipur ait décidé d’accorder davantage de terres et de privilèges aux Meitei, ce qui a contraint les Kuki chrétiens à s’enfuir. En juillet dernier, le Parlement européen a adopté une résolution urgente sur cette situation, appelant le gouvernement indien à «prendre toutes les mesures nécessaires» pour mettre un terme immédiat aux violences motivées par des considérations ethniques et religieuses. 

Les violences terroristes de Boko Haram au Nigeria

En Afrique, c’est le Nigéria qui compte le plus grand nombre de chrétiens tués au nom de leur foi: 5 014 cas ont été documentés en 2023 par Portes Ouvertes. «La violence, perpétrée principalement par des groupes militants islamistes, rapporte le communiqué de l’ONG, est depuis longtemps répandue sur le continent, à commencer par le Sahel et le bassin du lac Tchad, terrorisés par Boko Haram, et par la côte est de l’Afrique jusqu’au Mozambique». Même le Cameroun, à majorité chrétienne (plus de 60 %), subit depuis plusieurs années les attaques brutales des combattants de Boko Haram contre les villages chrétiens de l’extrême nord. Ici, dans les régions montagneuses, «les chrétiens quittent leurs villages tous les soirs pour se cacher dans la brousse ou dans les montagnes pour y passer la nuit. Les gens vivent dans un état d’insécurité permanent». Dans ces conditions, les chrétiens ont du mal à se rassembler, notamment à cause de la dévastation des lieux de culte, et doivent vivre leur foi seuls et souvent en secret. 

De nombreuses formes de violence et d’abus

Les attaques contre les chrétiens, poursuit Portes Ouvertes, ne prennent pas exclusivement la forme d’atteintes directes à la vie de la victime, mais peuvent revêtir de nombreuses formes de violence physique ou matérielle. Outre les morts et les blessés, il y a les attaques contre les églises et d’autres bâtiments tels que les écoles et les cliniques, les fermetures d’églises, les arrestations de chrétiens condamnés et l’emprisonnement dans des prisons ou des camps de travail forcé. «Les enlèvements, les agressions sexuelles, les mariages forcés, les abus physiques et psychologiques, les déplacements, les maisons ou les entreprises détruites ou pillées sont d’autres formes de violence à l’encontre de ces communautés de croyants».

Source : VATICANNEWS, le 22 août 2023

Persécution anti-chrétienne au Pakistan. Les voix qui se taisent

Persécution anti-chrétienne au Pakistan. Les voix qui se taisent

** À quoi servent les nombreux documents signés chaque année par les chefs religieux lors de dizaines de réunions et qui, lorsque le pire se produit comme au Pakistan ces jours-ci, ne demandent pas le respect des engagements en faveur du dialogue et de la paix entre les confessions religieuses ?

** Lorsque le pape Jean-Paul II s’est adressé à 70 000 jeunes musulmans, en dehors du circuit des réunions des médias religieux, et a déclaré : « La véritable signification de la liberté religieuse respecte à la fois Dieu et l’homme ».

Depuis quelques jours, une véritable campagne d’agression violente contre les chrétiens est en cours dans certaines régions du Pakistan de la part de groupes de musulmans, à forte majorité sunnite dans ce pays d’Asie. Les croyants de l’Islam au Pakistan (environ 230 millions d’habitants) représentent au moins 95 % de la population. Il est bien connu que le Pakistan connaît des vagues périodiques de violence à l’encontre des hindous et des chrétiens depuis plusieurs décennies. Souvent, certaines lois du pays, comme la tristement célèbre loi « anti-blasphème », ont favorisé ou encouragé de tels comportements, que les autorités n’ont pas toujours maîtrisés, comme le montrent les événements de ces derniers jours.

La Constitution du Pakistan fait de l’Islam la religion d’Etat, même si le texte reconnaît à tous les citoyens le droit de professer, de pratiquer et de répandre leur foi. Cette charte constitutionnelle restreint cependant les droits politiques des Pakistanais non musulmans qui ne peuvent être ni président de la République, ni Premier ministre, ni juges de la Cour fédérale, laquelle a le pouvoir d’annuler toute loi jugée contraire à l’islam. 

Des documents solennels oubliés ou mis à la poubelle

Dans ces moments-là, les chrétiens ne peuvent s’empêcher de rappeler le cas notoire d’Asia Bibi (2010 – 2018) ainsi que l’horreur de l’assassinat, le 2 mars 2011, en plein centre d’Islamabad, de Shahbaz Bhatti, ministre pakistanais des minorités. 

Les chrétiens, en particulier les catholiques, doivent se rappeler à eux-mêmes et à beaucoup d’autres – en particulier les orthodoxes et les musulmans sunnites et chiites – les documents conjoints signés à des occasions solennelles pour encourager et favoriser la paix et le dialogue entre les confessions religieuses. Ces documents sont nombreux mais semblent tomber dans l’oubli. Le cas le plus dramatique est la déclaration commune du pape François et du patriarche Kirill de Moscou et de toutes les Russies, signée le 12 février 2016, et qui, en ces 18 mois de guerre russe contre l’Ukraine, n’a jamais été mentionnée ou rappelée par quiconque. Il s’agit d’un document officiel catholique-orthodoxe qui a disparu de la réalité ecclésiale quotidienne et même de la mémoire.

Un autre document commun populaire est celui du 4 février 2019, signé à Abu Dhabi entre le pape François et le grand imam d’Al-Azhar, Ahmad Al-Tayyeb, un haut dignitaire musulman sunnite, sur la « Fraternité humaine pour la paix mondiale et la coexistence commune ».

À ce jour, il n’existe aucune trace du Grand Imam sunnite d’Al-Azhar condamnant d’un seul mot les violences antichrétiennes en cours au Pakistan. Il en va de même pour le Congrès des dirigeants des religions mondiales et traditionnelles au Kazakhstan, où la Déclaration finale a été signée en présence du Pape (22 septembre 2022).

De toute évidence, aucune voix catholique autorisée n’a voulu rappeler au Grand Imam et au Congrès du Kazakhstan ce qui avait été convenu et signé ensemble lors de réunions largement amplifiées par la presse.

Des événements tragiques tels que ceux survenus au Pakistan soulèvent de nombreuses questions sur les nombreux autres documents officiels signés par des chefs religieux sur la question, dont personne ne se souvient le lendemain, même lorsque cela s’avérerait approprié et nécessaire.

La violence religieuse est combattue par des mots appropriés et opportuns, mais aussi et surtout par des gestes concrets et visibles. La bibliothèque des déclarations interreligieuses et œcuméniques qui réitèrent chaque année ce qui a déjà été dit les années précédentes est désormais saturée. 

Une nouvelle voie pour l’oecuménisme et le dialogue interreligieux

Les dialogues et les réunions œcuméniques et/ou interreligieuses entre responsables de différentes confessions religieuses aident, sont efficaces, font progresser, mais sont totalement insuffisants pour améliorer les situations de haine, de violence et de fanatisme entre les religions dans de nombreux endroits de la planète. 

Dans le dialogue interreligieux et dans l’œcuménisme lui-même, les bonnes intentions, les mots justes et les attitudes nécessaires sont souvent des réalités imposées d’en haut, uniquement par les médias. Le besoin urgent de paix, d’harmonie et de coexistence pacifique et créative ne pénètre pas les sociétés, les gens ordinaires, les masses. 

Nous devons rapidement prendre conscience de cette réalité et revoir les formes et les méthodes pour aller plus loin, faute de quoi le dialogue entre les religions perdra sa nature et sera finalement perçu comme une parade folklorique.

Un petit et grand souvenir, loin dans le passé, peut nous apprendre beaucoup. C’était le lundi 19 août 1985, lorsque le pape saint Jean-Paul a rencontré 70 000 jeunes musulmans du Maroc et d’autres pays africains dans le stade de Casablanca. Il leur adressa un discours mémorable et, au milieu de nombreuses exhortations courageuses, accueillies et applaudies avec enthousiasme, le Pontife déclara : « Dans un monde qui aspire à l’unité et à la paix et qui connaît pourtant mille tensions et conflits, les croyants ne devraient-ils pas favoriser l’amitié et l’union entre les hommes et les peuples qui forment une communauté sur la terre ? Nous savons qu’ils ont la même origine et la même fin ultime : le Dieu qui les a faits et qui les attend, car il les réunira. (…) Ce témoignage de foi, qui est vital pour nous et qui ne peut souffrir ni l’infidélité à Dieu ni l’indifférence à la vérité, se fait dans le respect des autres traditions religieuses, parce que tout homme attend d’être respecté pour ce qu’il est, en fait, et pour ce qu’il croit en conscience. Nous voulons que tous aient accès à la plénitude de la vérité divine, mais ils ne peuvent le faire qu’avec la libre adhésion de leur conscience, à l’abri de contraintes extérieures qui ne seraient pas dignes du libre don de la raison et du cœur qui caractérise la dignité de l’homme. Tel est le vrai sens de la liberté religieuse, qui respecte à la fois Dieu et l’homme. C’est de tels adorateurs que Dieu attend un culte sincère, des adorateurs en esprit et en vérité ». 

***
Documents signés par François lors de ses déplacements internationaux :

1) – Déclaration commune du pape François et du patriarche Kirill de Moscou et de toute la Russie. 12 février 2016.
Aéroport international « José Martí » – La Habana, Cuba. 12 février 2016.
Signée par le pape François et Kirill, patriarche de Moscou et de toutes les Russies. 

2) – Human Brotherhood Document, Abu Dhabi, Émirats arabes unis. 4 février 2019
Signé par le pape François et le grand imam d’Al-Azhar, Ahmad Al-Tayyeb.

3) – Appel de Sa Majesté le Roi Mohammed VI et de Sa Sainteté le Pape François sur Jérusalem / Al Qods Ville sainte et lieu de rencontre, 30 mars 2019.
Signé par le Pape François et SM le Roi Mohammed V Amir al Mouminine

4) – Déclaration finale du « 7e Congrès des dirigeants des religions mondiales et traditionnelles ». Nur-Sultan (Astana), Kazakhstan. 15 septembre 2022.
Signée par le Pape François et de nombreux leaders religieux et politiques.

Source : Il sismografo, le 18 août 2023

Une journée de prière au Pakistan après les violences contre les chrétiens

A Karachi, des chrétiens protestent contre les violences dans le Pendjab, vendredi 18 août. A Karachi, des chrétiens protestent contre les violences dans le Pendjab, vendredi 18 août. (ANSA)

Une journée de prière au Pakistan après les violences contre les chrétiens

Après les assauts dans les quartiers chrétiens du Pendjab dans l’Est pakistanais, les évêques du pays invitent les croyants, dimanche 20 août, à un temps de prière «pour l’harmonie interreligieuse et pour dire non à toute forme de violence».

Vatican News

Une journée spéciale de prière sera organisée dans toutes les communautés catholiques du Pakistan, dimanche 20 août. Elle a été annoncée par la conférence épiscopale du pays après les attaques, ces derniers jours, contre les églises et les habitations de chrétiens, et après l’arrestation de deux d’entre eux accusés de blasphème, à Jaranwala, dans la banlieue de Faisalaba, dans le Pendjab pakistanais. «Tous les chrétiens et les personnes de bonne volonté sont invités à observer cette journée de prière pour les incidents de Jaranwala et pour la paix et l’harmonie dans notre pays», peut-on lire dans une note de la Conférence épiscopale partagée aux médias.

Mercredi 15 août, des centaines de personnes de confession musulmane, armées de bâtons et de pierres, ont déferlé dans les ruelles du quartier chrétien de Jaranwala, dans la banlieue de la ville industrielle de Faisalabad, poussant les chrétiens à la fuite. Des violences après qu’un groupe de fanatiques religieux eut accusé une famille d’avoir profané le Coran. Le lendemain, le quartier chrétien de Jaranwala a été placé sous surveillance policière.

Une enquête est en cours à l’encontre d’une douzaine de personnes ayant incité par haut-parleur des musulmans à manifester contre des chrétiens, a indiqué un haut responsable de la police. Selon l’agence AFP, 87 domiciles et 19 églises ont été vandalisés lors de cette vague de violence.

La Commission indépendante des droits de l’homme au Pakistan a plusieurs fois souligné que les lois sur le blasphème étaient utilisées comme des armes pour cibler les minorités religieuses et régler des vendettas personnelles, et que ces incidents violents étaient en augmentation constante depuis plusieurs années. Les chrétiens, qui représentent environ 2% de la population, occupent l’un des échelons les plus bas de la société pakistanaise et sont fréquemment la cible d’allégations de blasphème, fallacieuses et infondées.

Source : VATICANNEWS, le 19 août 2023

Nicaragua: ONU et CDHI appellent à la libération de Mgr Alvarez

L'éveque nicaraguayen de Matagalpa, Mgr Rolando AvarezL’éveque nicaraguayen de Matagalpa, Mgr Rolando Avarez

Nicaragua: ONU et CDHI appellent à la libération de Mgr Alvarez

Dans un communiqué commun, le vendredi 18 août, les deux organisations internationales dénoncent la violation des droits de l’homme contre l’évêque de Matagalpa condamné à 26 ans de prison pour complot contre l’intégration nationale et diffusion de fausses nouvelles. Depuis l’année dernière, les allégations contre l’Église catholique se répandent dans le pays. 

Vatican News

La commission interaméricaine pour les droits de l’homme, (CIDH) et le bureau du haut-commissariat de l’ONU pour les droits de l’homme pour l’Amérique centrale et les Caraïbes anglophones, (OHCHR), demandent au gouvernement de Nicaragua la libération immédiate de Mgr Rolando Alvarez, évêque de Matagalpa et de toutes les personnes privées arbitrairement de leur liberté dans ce pays où l’on enregistre depuis plus de 5 ans, des violations systématiques des droits de l’homme.

Un an après l’arrestation de l’évêque, le 19 août 2022, les deux organisations condamnent sa détention, l’isolement, les visites limitées des membres de famille et la réduction des soins médicaux ainsi que d’accès aux médicaments essentiels, dans la prison Jorge Navarro Tipitapa, connue comme la «Modelo». Pendant ce temps, la Conférence épiscopale du Nicaragua a publié sur sa page Facebook, un bref post contenant certains versets du psaume 6: «Car le Seigneur a entendu la voix de ma plainte, Il a entendu ma supplique. Le Seigneur a accueilli ma prière». 

L’évêque de Matagalpa condamné à 26 ans de prison

Mgr Alvarez est accusé de conspiration contre l’intégrité nationale et «propagation de fausses nouvelles à travers les technologies de l’information et de communication au détriment de l’État et de la société nicaraguayens», également de désobéissance civile et d’outrage aux autorités après avoir, le 10 février dernier, refusé de quitter le Nicaragua pour s’exiler aux Etats-Unis. Il a été condamné à 26 ans de prison, à l’interdiction d’exercer les fonctions publiques et sa nationalité lui a été retirée.  

Pour le CIDH et l’OHCHR, les accusations à l’encontre de Mgr Alvarez sont des actes contraires aux obligations internationales des droits de l’homme assumées par le Nicaragua à travers la convention américaine des droits humains, le pacte des droits humains civiles et politiques, concernant particulièrement le droit à un procès juste, à la liberté et à l’intégrité personnelle.

La persécution contre l’Eglise catholique

Depuis l’année dernière, les deux organismes internationaux collectent une documentation sur la croissance de la persécution contre l’Église catholique au Nicaragua, à travers la détention arbitraire, l’incarcération et l’expulsion du pays des prêtres et religieuses sans aucune garantie d’un procès juste ainsi que la spoliation de leurs propriétés sans aucun droit à la restitution juridique comme cela a été le cas de l’Université centraméricaine des jésuites, l’UCA, accusée de terrorisme par le régime Ortega et assujettie à la séquestration et confiscation de ses biens. Autant de mesures dont le préposé général de la Compagnie de Jésus, le père Arturo Sosa, a demandé vendredi 18 aout, le retrait immédiat. Citant les mesures prises contre l’université catholique, le Cidh et l’Ohchr écrivent que la mesure «affecte le droit à l’éducation, la liberté académique, la liberté d’expression et le droit au travail d’innombrables Nicaraguayens».

La réalité socio-politique du Nicaragua

Le Nicaragua traverse, depuis avril 2018, une crise politique et sociale, accentuée après les élections controversées du 7 novembre 2021 qui ont donné la victoire à Daniel Ortega, pour un cinquième mandat à la présidence du pays, marqué par un tiraillement avec les autorités religieuses nicaraguayennes. Jusqu’à présent, au moins 44 membres de l’Église catholique ont été arbitrairement expulsés du pays et 8 prêtres emprisonnés. Plusieurs collèges et universités ont été confisqués. Il existe également des informations sur des cas de repressions et de persécutions contre les autres religions.

Source : VATICANNEWS, le 19 août 2023

NIGERIA – Un père blanc et un séminariste enlevés

Abuja (Agence Fides) – Un missionnaire africain, le père Paul Sanogo, et un séminariste, Melchior, ont été enlevés dans la paroisse St Luke Gyedna, dans la zone de gouvernement local de Paikoro, dans l’Etat du Niger, au centre-nord du Nigéria.
Le 3 août, les bandits ont tiré en l’air depuis la résidence paroissiale, emmenant le père blanc et le séminariste.
L’évêque de Minna, Mgr Martins Igwe Uzoukwu, a envoyé une note à toutes les paroisses de l’État du Niger, invitant les fidèles à prier pour les personnes enlevées.
« Au nom de mon évêque auxiliaire Sylvester Luka Gopep, des prêtres et des religieux du diocèse catholique de Minna. Je vous demande de prier pour le père Paul Sanogo (Missionnaire d’Afrique) et le séminariste Melchior qui ont été enlevés par des bandits aux premières heures du 3 août 2023, dans la résidence du prêtre à Gyedna, dans l’État du Niger », peut-on lire dans la note.
Un porte-parole de la police, confirmant le double enlèvement, a cependant indiqué que les autres séminaristes de la région ont été invités à se déplacer temporairement pendant que les recherches se poursuivent pour retrouver les deux personnes enlevées.

Source : Agence Fides, le 7 août 2023

Pour Mgr Hinder, les sœurs martyres du Yémen montrent « l’amour de Jésus »

Les soeurs martyres tuées en mars 2016 à Aden au YémenLes soeurs martyres tuées en mars 2016 à Aden au Yémen

Pour Mgr Hinder, les sœurs martyres du Yémen montrent « l’amour de Jésus »

Mgr Paul Hinder, vicaire apostolique émérite de l’Arabie du Sud, se souvient que les sœurs missionnaires de la Charité, qui ont subi le martyre au Yémen en 2016, ont montré l’amour de Jésus. Il souligne aussi combien est précieuse la mise en évidence du témoignage de foi des nouveaux martyrs et par conséquent, la création, par le Pape François, d’une commission à leur intention.

Entretien réalisé par Deborah Castellano Lubov – Cité du Vatican

«Les sœurs m’ont montré “Voici l’amour de Jésus-Christ” et elles étaient toujours souriantes, même lorsque la situation ne semblait pas justifier un sourire». Dans une interview accordée à Vatican News – Radio Vatican, Mgr Paul Hinder, vicaire apostolique émérite de l’Arabie du Sud, qui dirigeait l’Église dans la région à l’époque, s’est souvenu des quatre sœurs missionnaires de la Charité martyres qui, en mars 2016, ont été assassinées lorsque des hommes armés ont pris d’assaut une maison de retraite catholique, dirigée par les religieuses de Mère Teresa dans la ville portuaire d’Aden, au Yémen.

Le Pape François, lors de l’audience générale du 19 avril 2023, a rappelé le souvenir des sœurs Anselme, Marguerite, Reginette et Judith, tuées ensemble comme «des martyrs de notre temps». Au Yémen, «une terre blessée depuis de nombreuses années par une guerre terrible et oubliée, qui a causé de nombreuses morts et fait souffrir encore aujourd’hui de nombreuses personnes, en particulier des enfants», a rappelé le Pape, il y a «des témoins lumineux de la foi, comme les sœurs missionnaires de la Charité», qui, bien qu’elles aient «donné leur vie là-bas», «sont toujours présentes» et «continuent à avancer».

Mgr Hinder, quel a été l’héritage, le témoignage donné par le martyre des sœurs missionnaires de la Charité au Yémen?

Leur témoignage est celui de la fidélité à Jésus Christ jusqu’au dernier moment, même dans une situation de guerre et de risque, où quelqu’un peut être tué non seulement par un fanatique, mais aussi pour d’autres raisons.

Le témoignage que les sœurs ont rendu dans le cadre du Yémen de 2016, surtout à Aden, est celui de ne pas avoir fui. Elles sont restées dans une situation critique, près des pauvres dont elles devaient s’occuper. Elles l’ont fait avec dévouement, et un engagement de joie, de fidélité envers les personnes les plus pures et les plus handicapées, qui m’a toujours impressionné. Chaque année, je visitais les sœurs et leurs maisons, où je rencontrais des malades, des personnes âgées, et je regardais les visages des personnes dont elles s’occupaient. Elles m’ont montré que l’amour de Jésus-Christ était ici.

C’était incarné dans le comportement, dans les actions et dans le témoignage des sœurs, et je pense que cela compte. Même si elles ne pouvaient pas parler trop ouvertement de l’Évangile dans ce pays islamique, leur vie et leur comportement, leurs actions, parlaient plus que les mots. Cela m’a aussi marqué pendant toutes les années où j’ai été en charge de cette réalité au Yémen.

Avez-vous des souvenirs particuliers de ces sœurs?

C’était tout simplement cette expérience de voir leur fidélité et leur joie. Je les ai trouvées toujours souriantes, même si je savais que la situation n’était pas toujours souriante. Cela se voyait aussi dans l’entourage, avec les collaborateurs qui étaient principalement musulmans, mais ils vivaient la réalité dans le contexte des sœurs, et ils ont payé de la même manière, de leur vie. Le simple fait qu’ils aient collaboré avec les sœurs chrétiennes a donné lieu à une sorte d' »œcuménisme interreligieux du sang », ce qui est beaucoup plus fort que n’importe quel mot. J’ai été témoin d’une belle réalité lorsque je leur ai rendu visite, que ce soit à Aden ou ailleurs, dans tous les lieux où, auparavant, les sœurs pouvaient être présentes.

Je suis fier que nous ayons eu cette réalité dans un coin du monde où personne ne s’attendrait à ce qu’une telle vie puisse être vécue et qu’un tel témoignage puisse être donné. Cela ne fait peut-être pas les gros titres des journaux ou des télés, mais c’est un témoignage qui est gravé dans le cœur de nombreuses personnes qui en ont fait l’expérience et continuent de faire l’expérience de l’amour de ces missionnaires de la Charité. Aujourd’hui, certains ont payé de leur vie. D’autres continuent à faire ce qu’ils peuvent, dans la situation actuelle du pays déchiré par la guerre.

Quelle est la valeur de la reconnaissance par l’Église de ces nouveaux martyrs, y compris de ces sœurs martyres, et de ceux qui, dans le monde entier, ont donné leur vie pour la foi et pour aider les autres?

Nous risquons toujours d’avoir la mémoire courte. Et surtout à notre époque, il y a tellement de nouveautés, de mauvaises et de bonnes choses que ce que nous connaissons aujourd’hui, nous l’oublions demain. Il est bon de ne pas oublier les témoins du passé, non seulement du passé lointain, qui figurent dans le calendrier des saints, mais aussi les méridiens.

C’est pourquoi nous avons introduit le 30 juin dans notre vicariat comme journée de commémoration des martyrs modernes, y compris pour les sœurs qui ne sont pas encore canonisées, mais aussi pour ne pas oublier que nous avons aussi aujourd’hui, parmi nous, des témoins de Jésus-Christ et de la foi en Lui, et même des personnes qui sont prêtes à payer de leur vie. Cela montre qu’il vaut la peine de garder cela en mémoire, dans nos agendas, dans nos calendriers, et de ne pas l’oublier.

Nous ne devons pas oublier que nous nous tenons sur les épaules d’autres témoins qui ont payé leur tribut, comme Jésus-Christ, afin de pouvoir aller de l’avant avec une foi qui n’est pas seulement troublée par tous les scandales, mais aussi renforcée par des personnes qui, jusqu’au dernier moment, étaient prêtes même à endurer le martyre au nom de Jésus-Christ.

Le Pape François a parlé des martyrs à de nombreuses reprises, y compris lors d’une récente audience générale, mais dans des contextes différents. Maintenant, il y a l’annonce de cette initiative concrète de la Commission pour faire mémoire des nouveaux martyrs et de ceux qui sont morts ou ont été tués pour la foi. Quelle valeur y voyez-vous?

Que nous n’oublions pas, que nous soyons conscients qu’à l’heure actuelle, il n’y a pas seulement la génération de la foi chrétienne dans le monde, mais qu’il y a aussi des témoins précieux. Ils paient de leur vie le témoignage de l’Évangile. Bien sûr, ce n’est pas toujours aussi évident.

Garder cela dans la mémoire collective de l’Église est très important pour chacun d’entre nous, car sinon nous ne pensons qu’à d’autres aspects de l’Évangile. Mais cela demande un engagement total de toute notre vie pour dire «Je t’aime Jésus». Cela signifie aussi le suivre là où il nous conduit, là où nous n’irions pas avec nos instincts naturels. Cela fait partie de la vie chrétienne.

Les sœurs, en particulier les martyres du Yémen, m’ont enseigné la même réalité. C’était pour moi un défi, de penser que peut-être un jour vous pourriez être conduits dans une situation similaire, et que vous auriez besoin de demander au Seigneur de me donner la force, ou de nous donner la force, de ne pas fuir, mais d’être là fidèlement, même au pied de la Croix sur le Golgotha, et c’est ce que les sœurs m’ont enseigné.

Source : VATICANNEWS, le 7 juillet 2023

CORÉE DU NORD – Entre les persécutions du monde et les consolations de Dieu : l’aventure missionnaire des Bénédictines de Tutzing

Benedettine di Tutzing

par Paolo Affatato


Pyongyang (Agence Fides) – Le cœur des bénédictines de Tutzing bat pour la Corée du Nord. Et c’est un cœur toujours tourné, avec la prière et la charité, vers ce qui fut leur mission originelle en Orient.


La congrégation des « Sœurs missionnaires bénédictines de Tutzing » (Congregatio Sororum Benedictinarum Missionarum de Tutzing) a été fondée à Reichenbach en 1885 par le moine Joseph Georg Amrhein OSB (1844-1893) en tant que branche féminine de la congrégation des moines bénédictins de Sainte-Odile. En 1887, la maison mère des sœurs a été établie à Emming et en 1904 à Tutzing en Haute-Bavière.

Les bénédictines de Tutzing ne sont pas cloîtrées mais sont actives dans l’apostolat. « Nous vivons un charisme monastique et missionnaire. Nous suivons la règle bénédictine et, parallèlement à la contemplation, nous vivons la spiritualité et l’apostolat dans le monde, là où nous sommes appelés. Nous le faisons toujours non pas en tant qu’individus, mais en tant que communauté bénédictine.

Comme une petite communauté chrétienne qui vit de foi, d’espérance et de charité », explique la sœur coréenne Jun Seok Sye, supérieure générale de la congrégation, en rappelant la présence missionnaire en Afrique, en Asie et aux Amériques, avec 130 monastères et plus de 1 300 moniales répartis sur quatre continents.


La mission a également commencé en Corée du Nord : c’est l’évêque bénédictin Boniface Sauer, OSB, abbé de l’abbaye de Tokwon, dans le nord de la péninsule coréenne, qui a invité les sœurs en Corée pour suivre les filles et les jeunes femmes coréennes au niveau éducatif, social et pastoral, qui – en raison des coutumes et des traditions locales liées au confucianisme – ne pouvaient être accompagnées que par des figures féminines. « Il n’aurait pas été facile d’apprendre la langue coréenne et de s’adapter à l’environnement, c’est pourquoi des sœurs jeunes et énergiques ont été envoyées. C’est ainsi qu’a commencé notre aventure missionnaire en Asie de l’Est », raconte-t-elle.
Les quatre premiers pionniers bénédictins allemands partent et, après un voyage en bateau de 48 jours, à travers la Méditerranée, l’Océan Indien, puis le Pacifique, débarquent en Corée du Nord, à Wonsan, accueillis par les pères bénédictins. « Notre mission a commencé, par la providence de Dieu, le 1er novembre 1925, à 4 heures de l’après-midi », dit le supérieur en rappelant l’époque de cette aventure missionnaire. Un mois après leur arrivée, la première jeune fille coréenne demande à faire l’expérience de la vie monastique dans l’institut.
Les sœurs ont immédiatement commencé à travailler comme enseignantes dans l’école de Wonsan pour garçons et filles pauvres, appelée « Guardian Angel School », qui accueillait plus de 400 enfants.
« Ils étaient très pauvres, vivant dans des conditions d’absolue nécessité. Cette condition était en elle-même un témoignage : pauvres matériellement, pauvres en esprit, selon l’esprit des béatitudes évangéliques », note la supérieure. Après avoir vécu les premières années dans une modeste habitation, ils ont déménagé au couvent de l’Immaculée Conception, construit à Wonsan grâce à des bienfaiteurs allemands. Les bénédictines ont également ouvert un dispensaire, avec des herbes et des médicaments, que Sr Hermetis Groh a géré en s’occupant des malades et des personnes souffrantes.
En 1927, 16 jeunes Coréennes souhaitaient déjà rejoindre la première communauté bénédictine féminine, et cette année-là, plusieurs d’entre elles devinrent officiellement  » postulantes  » : le charisme bénédictin et missionnaire se répandait et attirait les âmes. La mission se poursuit par la prière, les liturgies et les processions, le travail apostolique dans les écoles, les visites dans les villages, où les sœurs enseignent le catéchisme aux enfants, aux jeunes et aux adultes. « Notre place, notre vie, c’est d’être au fond, d’être avec Dieu et d’être avec les derniers », a poursuivi Sœur Jun Seok Sye.
Tout change en 1945 lorsque, avec l’intervention de l’Union soviétique et l’indépendance de la Corée du Nord, le gouvernement met en place une politique de persécution religieuse. Le monastère est confisqué et fermé. Expulsées, déplacées, méfiées, les moniales ne veulent pas fuir et choisissent de rester près des enfants, près de leur peuple. Le récit de la supérieure devient dramatique : « À 11 heures du soir, le 10 mai 1949, sur ordre du gouvernement, toute la communauté religieuse de Wonsan a été saisie et les religieuses coréennes ont été forcées de se disperser. Les religieuses allemandes ont été emmenées au camp de concentration d’Oksadok, où elles sont restées jusqu’au 19 novembre 1953, après la fin de la guerre de Corée.
Les moniales ont subi des traitements inhumains et ont été contraintes à ce qui restera dans l’histoire comme la « marche de la mort », un voyage forcé vers la Mandchourie au milieu d’un hiver rigoureux. Au cours de ces années de privations et de cruauté, 17 moines bénédictins et 2 moniales de Tutzing sont morts. Les moniales survivantes écrivent dans leur journal : « En enterrant nos frères et sœurs, nous avons chanté : Christ, mon roi, jusqu’à la fin je te jure mon amour, pur comme le lys, et ma fidélité. Et nous nous demandions : qui sera le prochain ? Le matin du 16 septembre 1952, Sœur Fructuosa Gerstmayer est la dernière à atteindre la Maison du Père. « Épuisés par la faim, le gel, la maladie, ils ont survécu en tant qu’exilés. Seul Dieu était leur réconfort et leur compagnon. Le Christ persécuté était avec eux », se souvient aujourd’hui la mère supérieure. Sans savoir si et quand cette période de persécution prendrait fin, les moines et les moniales ont continué à prier avec la liturgie des heures. Lorsqu’ils parvenaient à cultiver secrètement quelques graines de blé et à cueillir quelques raisins sauvages, ils pouvaient célébrer secrètement la messe la nuit dans les maisons de campagne.
Avec l’armistice qui a mis fin à la guerre de Corée, le programme d’échange de prisonniers de guerre a été lancé en janvier 1954. Quarante-deux moines et dix-huit nonnes allemands ont été rapatriés en Allemagne par le chemin de fer transsibérien. « Après leur rapatriement, malgré les traitements cruels qu’elles ont subis dans les camps, les religieuses, une fois rétablies, ont demandé à retourner à la mission en Corée », se souvient Sœur Jun Seok Sye. Huit d’entre elles ont dû abandonner à cause de la tuberculose, mais dix sont retournées dans la toute nouvelle nation de Corée du Sud. « Sans dire un mot de travers à leurs persécuteurs », précise aujourd’hui la religieuse coréenne qui, jeune religieuse, se dit impressionnée par ce témoignage d' »amour envers l’ennemi ».
Dès 1950, les 13 bénédictines coréennes expulsées du Nord s’étaient providentiellement retrouvées dans le camp de réfugiés mis en place par l’Église catholique à Busan. Cette rencontre a marqué le début d’une nouvelle semence de mission. Les sœurs ont survécu en faisant de la lessive et du tissage pour l’armée américaine. Alors que le sort des sœurs de Wonsan était encore inconnu, la maison mère de Tutzing a envoyé d’autres missionnaires en Corée du Sud, dans le cadre d’une mission qui se poursuit encore aujourd’hui. En 1951, les sœurs ont fondé une communauté à Daegu, en 1958 les premières nouvelles professions y ont été établies, et dans les années 1960, la communauté est devenue un prieuré.


Les quatre premiers pionniers bénédictins allemands partent et, après un voyage en bateau de 48 jours, à travers la Méditerranée, l’Océan Indien, puis le Pacifique, débarquent en Corée du Nord, à Wonsan, accueillis par les pères bénédictins. « Notre mission a commencé, par la providence de Dieu, le 1er novembre 1925, à 4 heures de l’après-midi », dit le supérieur en rappelant l’époque de cette aventure missionnaire. Un mois après leur arrivée, la première jeune fille coréenne demande à faire l’expérience de la vie monastique dans l’institut.
Les sœurs ont immédiatement commencé à travailler comme enseignantes dans l’école de Wonsan pour garçons et filles pauvres, appelée « Guardian Angel School », qui accueillait plus de 400 enfants.
« Ils étaient très pauvres, vivant dans des conditions d’absolue nécessité. Cette condition était en elle-même un témoignage : pauvres matériellement, pauvres en esprit, selon l’esprit des béatitudes évangéliques », note la supérieure. Après avoir vécu les premières années dans une modeste habitation, ils ont déménagé au couvent de l’Immaculée Conception, construit à Wonsan grâce à des bienfaiteurs allemands. Les bénédictines ont également ouvert un dispensaire, avec des herbes et des médicaments, que Sr Hermetis Groh a géré en s’occupant des malades et des personnes souffrantes.
En 1927, 16 jeunes Coréennes souhaitaient déjà rejoindre la première communauté bénédictine féminine, et cette année-là, plusieurs d’entre elles devinrent officiellement  » postulantes  » : le charisme bénédictin et missionnaire se répandait et attirait les âmes. La mission se poursuit par la prière, les liturgies et les processions, le travail apostolique dans les écoles, les visites dans les villages, où les sœurs enseignent le catéchisme aux enfants, aux jeunes et aux adultes. « Notre place, notre vie, c’est d’être au fond, d’être avec Dieu et d’être avec les derniers », a poursuivi Sœur Jun Seok Sye.
Tout change en 1945 lorsque, avec l’intervention de l’Union soviétique et l’indépendance de la Corée du Nord, le gouvernement met en place une politique de persécution religieuse. Le monastère est confisqué et fermé. Expulsées, déplacées, méfiées, les moniales ne veulent pas fuir et choisissent de rester près des enfants, près de leur peuple. Le récit de la supérieure devient dramatique : « À 11 heures du soir, le 10 mai 1949, sur ordre du gouvernement, toute la communauté religieuse de Wonsan a été saisie et les religieuses coréennes ont été forcées de se disperser. Les religieuses allemandes ont été emmenées au camp de concentration d’Oksadok, où elles sont restées jusqu’au 19 novembre 1953, après la fin de la guerre de Corée.
Les moniales ont subi des traitements inhumains et ont été contraintes à ce qui restera dans l’histoire comme la « marche de la mort », un voyage forcé vers la Mandchourie au milieu d’un hiver rigoureux. Au cours de ces années de privations et de cruauté, 17 moines bénédictins et 2 moniales de Tutzing sont morts. Les moniales survivantes écrivent dans leur journal : « En enterrant nos frères et sœurs, nous avons chanté : Christ, mon roi, jusqu’à la fin je te jure mon amour, pur comme le lys, et ma fidélité. Et nous nous demandions : qui sera le prochain ? Le matin du 16 septembre 1952, Sœur Fructuosa Gerstmayer est la dernière à atteindre la Maison du Père. « Épuisés par la faim, le gel, la maladie, ils ont survécu en tant qu’exilés. Seul Dieu était leur réconfort et leur compagnon. Le Christ persécuté était avec eux », se souvient aujourd’hui la mère supérieure. Sans savoir si et quand cette période de persécution prendrait fin, les moines et les moniales ont continué à prier avec la liturgie des heures. Lorsqu’ils parvenaient à cultiver secrètement quelques graines de blé et à cueillir quelques raisins sauvages, ils pouvaient célébrer secrètement la messe la nuit dans les maisons de campagne.
Avec l’armistice qui a mis fin à la guerre de Corée, le programme d’échange de prisonniers de guerre a été lancé en janvier 1954. Quarante-deux moines et dix-huit nonnes allemands ont été rapatriés en Allemagne par le chemin de fer transsibérien. « Après leur rapatriement, malgré les traitements cruels qu’elles ont subis dans les camps, les religieuses, une fois rétablies, ont demandé à retourner à la mission en Corée », se souvient Sœur Jun Seok Sye. Huit d’entre elles ont dû abandonner à cause de la tuberculose, mais dix sont retournées dans la toute nouvelle nation de Corée du Sud. « Sans dire un mot de travers à leurs persécuteurs », précise aujourd’hui la religieuse coréenne qui, jeune religieuse, se dit impressionnée par ce témoignage d' »amour envers l’ennemi ».
Dès 1950, les 13 bénédictines coréennes expulsées du Nord s’étaient providentiellement retrouvées dans le camp de réfugiés mis en place par l’Église catholique à Busan. Cette rencontre a marqué le début d’une nouvelle semence de mission. Les sœurs ont survécu en faisant de la lessive et du tissage pour l’armée américaine. Alors que le sort des sœurs de Wonsan était encore inconnu, la maison mère de Tutzing a envoyé d’autres missionnaires en Corée du Sud, dans le cadre d’une mission qui se poursuit encore aujourd’hui. En 1951, les sœurs ont fondé une communauté à Daegu, en 1958 les premières nouvelles professions y ont été établies, et dans les années 1960, la communauté est devenue un prieuré.


Dès 1950, les 13 bénédictines coréennes expulsées du Nord s’étaient providentiellement retrouvées dans le camp de réfugiés mis en place par l’Église catholique à Busan. Cette rencontre a marqué le début d’une nouvelle semence de mission. Les sœurs ont survécu en faisant de la lessive et du tissage pour l’armée américaine. Alors que le sort des sœurs de Wonsan était encore inconnu, la maison mère de Tutzing a envoyé d’autres missionnaires en Corée du Sud, dans le cadre d’une mission qui se poursuit encore aujourd’hui. En 1951, les sœurs ont fondé une communauté à Daegu, en 1958 les premières nouvelles professions y ont été établies, et dans les années 1960, la communauté est devenue un prieuré.

Les sœurs ont survécu en faisant de la lessive et du tissage pour l’armée américaine. Alors que le sort des sœurs de Wonsan était encore inconnu, la maison mère de Tutzing a envoyé d’autres missionnaires en Corée du Sud, dans le cadre d’une mission qui se poursuit encore aujourd’hui. En 1951, les sœurs ont fondé une communauté à Daegu, en 1958 les premières nouvelles professions y ont été établies, et dans les années 1960, la communauté est devenue un prieuré.

Les sœurs ont survécu en faisant de la lessive et du tissage pour l’armée américaine. Alors que le sort des sœurs de Wonsan était encore inconnu, la maison mère de Tutzing a envoyé d’autres missionnaires en Corée du Sud, dans le cadre d’une mission qui se poursuit encore aujourd’hui. En 1951, les sœurs ont fondé une communauté à Daegu, en 1958 les premières nouvelles professions y ont été établies, et dans les années 1960, la communauté est devenue un prieuré.

Pour commémorer le témoignage de foi du passé, le procès en béatification des trente-huit serviteurs de Dieu de l’abbaye de Tokwon, martyrisés pendant la vague de persécution sous le règne de Kim Il-sung, a débuté en mai 2007. Le procès s’intitule « Béatification de l’abbé-évêque Bonifatius Sauer, O.S.B., du père Benedict Kim, O.S.B. et de leurs compagnons », dont quatre bénédictines, deux allemandes et deux coréennes.

Entre 1949 et 1952, quatorze moines et deux religieuses ont été exécutés après avoir été emprisonnés et torturés. Au cours de la même période, dix-sept autres moines et deux nonnes sont morts de faim, de maladie, de travaux physiques pénibles et de mauvaises conditions de vie dans le lager. L’abbé-évêque Bonifatius Sauer est mort dans une prison de Pyongyang en 1950.


Suite à ce témoignage, les ordres bénédictins présents en Corée aujourd’hui appartiennent aux congrégations de St Ottilien et de Tutzing (Allemagne). Les moniales olivétaines (de Suisse) et les moines olivétains (d’Italie) sont arrivés dans les années 1980. « 

Notre vie religieuse, aujourd’hui comme hier, est de donner notre vie au Christ, sous la conduite de l’Esprit Saint. Notre vie est de nous abandonner à l’amour de Dieu, comme l’ont fait nos pionniers martyrs. Une vie de prière et d’Évangile, pour lui rendre gloire », dit la religieuse, rappelant qu’il y a aujourd’hui environ 450 moniales bénédictines à Tutzing en Corée.

Le cœur des sœurs bénédictines de Tutzing bat toujours pour la Corée du Nord. Sœur Jun Seok Sye poursuit : « Chaque soir, avec toutes les sœurs du monde entier, nous récitons un pater-ave-gloria pour la mission en Corée du Nord, confiant le passé, le présent et l’avenir à Dieu. L’amour du Christ nous pousse.

Par tous les moyens possibles, nous essayons d’envoyer de l’aide humanitaire aux populations du Nord qui souffrent de la faim. Nous accueillons et accompagnons les réfugiés qui ont fui le Nord, en aidant à réintégrer les enfants et les adultes dans le tissu social ».

« Après tout, conclut la religieuse en citant un passage de la lettre de saint Paul aux Romains (Rm 8, 28), nous savons que tout concourt au bien de ceux qui aiment Dieu et qui ont été appelés selon son plan.

Source : Agence Fides, le 7 juillet 2023

Benedettine di Tutzing

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Plus de 50.000 chrétiens tués au Nigeria : tout le monde s’en fout ?

Père Justine John Dyikuk

Une tribune du Père Justine John Dyikuk publiée sur le site de La Croix Africa :

« Tant que l’Église ne se mobilisera pas, la persécution des chrétiens au Nigeria restera une plaie ouverte »

3 juillet 2023

Alors que les violences contre les chrétiens ne cessent de se multiplier au Nigeria, l’État doit prendre ses responsabilités et l’Église en appeler à la communauté internationale, exhorte le père Justine John Dyikuk.

Prêtre catholique, le père Justine John Dyikuk est chargé de cours en communication à l’université de Jos-Nigeria.

« Avec plus de 250 groupes ethniques et environ 220 millions d’habitants, le Nigeria lutte actuellement pour gérer son pluralisme culturel et religieux. Le pays est divisé entre une partie sud majoritairement chrétienne et une partie nord majoritairement musulmane.

Le Nigeria est le pays avec la plus grande fréquentation de messes au monde ! Pour autant, une mauvaise gouvernance y expose les chrétiens à diverses formes de persécution. Selon l’Aide à l’Église en détresse (AED), plus de 100 prêtres et religieuses y ont été enlevés, arrêtés ou tués en 2022. Un rapport similaire de « SBM Intelligence » indique que 145 attaques ont été perpétrées contre des prêtres catholiques l’année dernière.

Autre chiffre : entre 2012 et 2018, le diocèse de Maiduguri a perdu 903 catholiques dans des attaques djihadistes. De même, les régions de Zangon Kataf, Chikun, Kaura, Lere, Kajuru, Jema’a et Kaura de l’État de Kaduna sont des épicentres d’attaques contre des communautés majoritairement chrétiennes où de nombreuses personnes ont été tuées et d’autres se sont retrouvées sans abri. L’État de Kaduna est d’ailleurs celui qui enregistre le plus grand nombre d’enlèvements et d’assassinats de prêtres catholiques.

Plus de 50 000 chrétiens tués

La Société internationale pour les libertés civiles et l’État de droit – une ONG locale – a signalé que déjà plus de 1 000 chrétiens ont été tués au Nigeria depuis le début de l’année. Dans un rapport du 10 avril, l’organisation protestante Portes Ouvertes confirme que le pays est l’un des endroits les plus dangereux « pour suivre Jésus ». Pour Illia Djadi, analyste de l’Afrique subsaharienne de cette organisation, « le Nigeria est actuellement l’un des endroits les plus effrayants pour être chrétien ». La liste de surveillance Portes ouvertesindique qu’au moins 52 250 personnes ont été tuées au cours des 14 dernières années au Nigeria pour la simple raison d’être chrétien.

Il est crucial de comprendre comment les chrétiens réagissent à la persécution dans d’autres régions de l’Afrique. Dans une étude parue en 2018, le prêtre et professeur associé en sciences politiques Robert Dowd révèle que dans des pays comme le Nigeria et le Kenya où la persécution des chrétiens relève principalement de la persécution sociétale, il existe généralement deux types de réponses. Premièrement, les leaders chrétiens font souvent appel au gouvernement pour qu’il garantisse la sécurité des vies et des biens. Deuxièmement, ils s’engagent dans un dialogue interreligieux avec les leaders musulmans en vue d’établir une coexistence pacifique.

La conclusion de Dowd semble convaincante. Cependant, son affirmation selon laquelle la persécution des chrétiens au Nigeria relève d’une persécution sociétale manque de preuves empiriques. Les témoignages sur la situation des chrétiens rapportés par des Nigérians de premier plan (tels que feu l’ancien vice-gouverneur de la Banque centrale du Nigeria, Obadiah Mailafia, ou l’évêque du diocèse de Sokoto, Matthew Hassan Kukah) ainsi que les données générées par des groupes de réflexion internationaux tels que Portes Ouvertes ou le Pew research, suggèrent fortement le contraire.

« Personne ne semble s’en soucier »

Mgr Kukah a par exemple accusé le gouvernement fédéral d’utiliser les leviers du pouvoir pour assurer la suprématie de l’islam, ce qui renforce l’idée qu’elle peut être réalisée par la violence. Les habitants de certaines parties du sud de Kaduna ont rapporté que leurs agresseurs avaient attaqué leurs communautés en hélicoptère – ce qui suppose donc des moyens importants.

« Nous n’avons plus de larmes à verser, se lamentait il y a quelques mois Mgr Godfrey Onah, évêque de Nsukka. Nous pleurons maintenant du sang. » Rappelons que Leah Sharibu, jeune chrétienne enlevée pour avoir refusé de se convertir à l’islam, et d’autres chrétiens sont toujours aux mains de leurs ravisseurs. Personne ne semble s’en soucier. Outre ces personnes kidnappées, des milliers de chrétiens se trouvent dans des camps de personnes déplacées (IDP) dans les États de Borno, d’Adamawa, de Benue et de Taraba.

Le fait que ceux qui détruisent des villages et prennent des otages ne soient pas traduits en justice envoie un mauvais signal. La complicité des acteurs étatiques qui collaborent avec des acteurs non étatiques pour semer la terreur est préoccupante. L’État, en tant que détenteur du monopole de la violence légale, doit assumer ses responsabilités.

Changer le récit sur ces violences

L’Église doit solliciter les responsables des organisations internationales telles que le Bureau de la coordination des affaires humanitaires des Nations Unies, l’Union européenne, la Commission de l’Union africaine, ou encore le Département d’État américain. L’Église doit leur fournir suffisamment de données sur la réalité sur le terrain tout en combinant des solutions spirituelles et politiques avec des manifestations massives, un militantisme actif sur les réseaux sociaux et une parole unie. Cela peut changer le récit sur ces violences.

Il est important que les chrétiens de tout le Nigeria cherchent à gagner les médias internationaux tels que la BBCRFIVoice of AmericaChina Radio InternationalDeutsche Welle, etc., afin de rapporter des témoignages oculaires de leur situation. Les chrétiens autochtones du nord devraient former leurs enfants à la langue locale et renforcer leur expression linguistique afin d’avoir une voix dans les médias internationaux. Le nouveau gouvernement entré au pouvoir fin mai agira-t-il différemment ? Tant que l’Église de la région et du pays tout entier ne se mobilisera pas, la persécution des chrétiens au Nigeria restera une blessure ouverte. »

Père Justine John Dyikuk

Source : La Croix AFRICA, le 4 juillet 2023