ETHIOPIE – « Un abîme que seul l’amour divin peut combler » : la canonisation de Charles de Foucauld vécue par un missionnaire du « dernier kilomètre »

ETHIOPIE – « Un abîme que seul l’amour divin peut combler » : la canonisation de Charles de Foucauld vécue par un missionnaire du « dernier kilomètre »

Gode (Agence Fides) – « Je regarde Saint Charles de Foucauld, et je suis réconforté et encouragé face à mon manque d’efficacité humaine. Il a insisté sur la vie ordinaire, quotidienne, de vivre avec Jésus sous le regard du Père, et il a laissé sa vie devenir son moyen de mission, de rendre présente la Charité de Jésus. » Ce sont les mots que sœur Joaquin Brown, missionnaire à Gode, dans la région somalienne de l’Ethiopie, a envoyés à l’Agence Fides pour commenter la canonisation de Saint Charles de Foucauld célébrée le dimanche 15 mai 2022 par le Pape François (voir Agence Fides 14/5/2022).


« Je me retrouve ici, avec toute ma pauvreté humaine, privée de ressources humaines, face à une mer de besoins. Lire et écouter des articles sur le saint et sa spiritualité, ainsi que sa biographie, ont été l’occasion de revoir sa vie et de découvrir ce que le Seigneur peut nous inviter à vivre dans ce coin du monde qui compte 50 000 kilomètres carrés et un demi-million d’habitants », insiste le missionnaire.


« La conviction de Charles qu’il était appelé à vivre la vie de Jésus à Nazareth, dans toute la banalité et la monotonie que cela impliquait, est pour moi un grand phare de lumière ici où il n’y a pas grand-chose que nous puissions faire, si ce n’est permettre à la vie de Jésus de se répandre. La souffrance et la pauvreté des personnes qui nous entourent, en particulier les femmes et leurs enfants, conduiraient au désespoir si la mission devait pouvoir tout changer », explique sœur Joaquin.


« Les petits signes d’amour que nous essayons de rendre présents dans notre mission, à cent mètres de la limite légale de la préfecture apostolique de Robe, ne changent pas grand-chose à la vie quotidienne de ceux que nous essayons de servir, sauf de manière superficielle. Après tout, souligne la sœur qui vit son charisme missionnaire dans cette région depuis huit ans, les liens fragiles d’amitié que nous essayons de développer avec ceux avec qui nous entrons en contact sont les seules choses qui peuvent durer.
« J’ai attendu ce jour avec appréhension. Devant le portrait de Saint-Charles, que j’avais placé sous l’autel le jour spécial de sa canonisation, j’ai pensé que cette mission, ici à Gode, convient si bien aux femmes, d’accueillir les autres dans leur fragilité et leur situation de besoin, et de les servir avec les pauvres moyens dont je dispose, sachant qu’au-delà du besoin physique se trouve un abîme que seul l’amour divin peut rassasier. J’ai pensé au besoin de Charles de vivre parmi les pauvres, à la façon dont ils le servaient comme il les servait, lui permettant de toucher quelque chose de la présence de Jésus en eux ; à la façon dont Mère Teresa m’avait aidé à voir cette même présence chez les pauvres ; et à l’unité profonde des différentes vies des saints rassemblées dans la simplicité de l’Évangile. »


« Le soir, dans un bref temps d’adoration eucharistique, j’ai remercié Dieu pour le don de ce nouveau saint et pour la manière dont il a voulu vivre en s’identifiant si étroitement au Fils dans son abandon au Père, en permettant que chaque moment de sa vie devienne un espace pour répandre l’amour de Jésus. »


Sœur Joaquin conclut sa réflexion en soulignant combien cette canonisation est pour elle « une invitation de l’Esprit Saint à apprendre de saint Charles à s’abandonner encore et encore au Seigneur, afin qu’il puisse attirer son peuple à lui, par tous les moyens qu’il souhaite, même à travers la « banalité » de chaque jour ».


« Saint Charles de Foucauld, priez pour nous et intercédez pour de nouveaux et fervents missionnaires, prêts à brûler leur vie devant le Seigneur dans les tâches ordinaires d’être frères et sœurs de ceux à qui ils sont envoyés ! ».

Source: Agence Fides, le 16 mai 2022

Charles de Foucauld: l’héritage de l’apôtre des Touaregs en Algérie

Charles de FoucauldCharles de Foucauld

Charles de Foucauld: l’héritage de l’apôtre des Touaregs en Algérie

Que reste-t-il de l’héritage de «l’apôtre des Touaregs» en Algérie ? Le 15 mai prochain, Bienheureux Charles de Foucauld sera canonisé place Saint Pierre par le Pape François, aux côtés de neuf autres bienheureux. Entretien avec Mgr Jean-Paul Vesco, archevêque d’Alger. 

Entretien réalisé par Claire Riobé – Cité du Vatican

Militaire puis grand voyageur, le futur saint a laissé son empreinte dans de nombreuses villes, de la France à l’abbaye de la Trappe, en passant par Akbès en Syrie, Nazareth en Terre Sainte, ou encore Tamarasset, en Algérie. C’est dans ce dernier pays, où il vécu de 1901 à sa mort, en 1916, qu’il révéla toute la profondeur de sa vocation à la fraternité universelle. Dans le silence et l’austérité des paysages désertiques, il légua par sa présence amicale et priante un héritage vivant à des décennies de chrétiens d’Algérie.

Au désert, entre fraternité et contemplation

En 1901, à l’âge de 43 ans, le religieux tout juste ordonné partit pour Béni Abbès, au centre-ouest de l’Algérie.Désireux de vivre parmi ceux qui étaient le plus loin de la foi chrétienne, les plus délaissés et les plus abandonnés, Charles de Foucauld souhaitait y «crier l’Évangile par toute sa vie», dans un grand respect de la culture et de la foi des habitants au milieu desquels il vivait.

«Je veux habituer tous les habitants, chrétiens, musulmans, juifs et idolâtres, à me regarder comme leur frère, le frère universel», écrit-il ainsi à sa cousine en 1902, phrase connue à travers le monde entier, qui sera souvent citée au sujet de sa vocation. Il quitta ensuite Béni Abbès pour mettre en œuvre son programme de fraternité auprès des Touaregs de Tamanrasset, dans le Grand Sud algérien, auprès desquels il demeura jusqu’à son assassinat, le 1er décembre 1916. 

Une figure prophétique pour l’Algérie

À l’approche de la canonisation, l’Église catholique algérienne prépare depuis un an des pèlerinages et rassemblements locaux dans chaque lieu où vécu le religieux. À Alger, la capitale, une journée autour de la personnalité de Charles de Foucauld sera organisée pour tous, et reviendra sur les traits de personnalité particulièrement inspirants du saint pour l’Église locale. Enfin, une petite délégation de chrétiens algériens menée par l’archevêque d’Alger, Mgr Jean-Paul Vesco, se rendra à Rome pour l’événement. Ce dernier témoigne au micro de Vatican News de la figure prophétique du saint pour l’Algérie d’aujourd’hui.

Source: VATICANNEWS, le 11 mai 2022