30.04.2023 – HOMÉLIE DU 4ÈME DIMANCHE DE PÂQUES – MT 1, 18-24

Évangile de Jean 10, 1-10

Par le Fr. Raphaël Devillers, dominicain

Je suis le Berger … 
Je suis la Porte

L’évangile lu ce dimanche fait qu’on l’appelle « le dimanche du bon Pasteur », ce qui évoque tout de suite des images doucereuses d’un beau Jésus serrant sur son coeur un agneau mignon. Le contexte montre au contraire qu’il s’agit d’une scène dure, polémique, qui fait suite à la guérison de l’aveugle-né que Jésus a « fait sortir » de l’enclos pharisien pour l’attirer à lui. Son importance est marquée par son début solennel.

Être berger était un métier très répandu en Israël, bien plus rude que nous ne l’imaginons. Il fallait guider le troupeau vers de bons pâturages, trouver des sources d’eau, aller à la recherche des bêtes qui s’étaient égarées, soigner celles qui étaient blessées, protéger le troupeau à la merci des attaques des prédateurs. L’unité était un souci permanent. Le soir venu, les pasteurs gagnaient un enclos protégé, gardé par des veilleurs, dans lequel les bêtes seraient mélangées mais à l’abri. Dans la pâle lueur de l’aube, chaque berger se présentait à l’entrée et appelait ses brebis par leur nom afin de reconstituer son troupeau et s’en aller pour une nouvelle journée.

Une parabole difficile

Amen, amen, en vérité je vous le dis : celui qui n’entre pas par la porte dans l’enclos des brebis mais escalade par un autre côté, celui-là est un voleur et un brigand. Mais celui qui entre par la porte est le berger des brebis. Celui qui garde la porte lui ouvre, et les brebis écoutent sa voix. Les brebis qui lui appartiennent, il les appelle, chacune par son nom, et il les emmène dehors. Lorsqu’il les a toutes fait sortir, il marche à leur tête et elles le suivent parce qu’elles connaissent sa voix. Jamais elles ne suivront un étranger ; bien plus elles le fuiront parce qu’elles ne connaissent pas la voix des étrangers.

Jésus leur dit cette parabole mais ils ne comprirent pas ce qu’il voulait leur dire.

Dans l’antiquité il était courant d’appeler « bergers » les rois et les chefs : les hommes n’étaient-ils pas comme des brebis fragiles qu’il fallait guider et défendre ?

Combien sont-ils, et seront-ils encore, à désirer s’emparer des hommes en prétendant être les meilleurs dirigeants ? Sans arrêt nous entendons les discours enflammés, les proclamations véhémentes : « Suivez-moi…Je vous apporterai les meilleures conditions…Avec moi nous serons les plus forts…Je suis le Führer ». Et, plus bêtes que les brebis, nous écoutons ces belles promesses, nous ne décelons pas les mensonges, la volonté de puissance cachée.

Méfiez-vous, nous prévient Jésus, des voleurs et des brigands ! Moi, dit-il, pauvre, démuni, sans nulle ambition mondaine, je me présente à la porte de l’humanité et je parle dans la paix et la vérité, sans flatterie ni rodomontade. Je connais mes brebis et j’appelle chacune par son nom c.à.d. selon son identité, sa situation. Ainsi l’évangile nous raconte comment Simon, Jean, Philippe, Nicodème, la samaritaine, la femme adultère…ont été appelés de façons différentes. Sans hurlement ni menace. Et chacun de nous pourrait raconter à son tour comment il a perçu une voix douce et miséricordieuse qui le rattrapait dans les mille détours de ses errements.

Hélas combien de fois avons-nous fait la sourde oreille ! Mais Jésus, le bon berger, ne cesse jamais de chercher la brebis perdue, car elle lui appartient.

Deux mots surprennent. Au lieu d’employer le mot habituel pour « enclos », Jésus utilise un mot qui désigne la « cour » du temple ! En outre il précise qu’il « les pousse dehors », ce qui paraît excessif mais c’est le verbe utilisé juste avant, lorsque les pharisiens ont jeté hors de la cour du temple l’aveugle né qui s’était mis à croire à Jésus.

L’homme qui se convertit au Seigneur Christ peut être rejeté par son milieu : dans cette blessure qu’il sache reconnaître l’appel de son berger véritable. Ainsi à travers les affres horribles de sa passion, Jésus a su reconnaître l’appel de son Père à accomplir sa volonté (annoncer la venue du Royaume) jusqu’au don total de soi (la passion). Donc l’image pastorale éclaire la situation.

Jésus leur dit cette parabole mais ils ne comprirent pas ce qu’il voulait leur dire.

On ne s’étonne pas que ces pharisiens ne comprirent pas du tout la portée de cette déclaration. Tous les chrétiens la comprennent-ils aujourd’hui ?

Jésus unique Sauveur

C’est pourquoi Jésus reprit la parole : « Amen, amen, je vous le dis : je suis la porte des brebis. Ceux qui sont intervenus avant moi sont tous des voleurs et des bandits mais les brebis ne les ont pas écoutés.

Moi je suis la porte. Si quelqu’un entre en passant par moi, il sera sauvé. Il pourra aller et venir et il trouvera un pâturage. Le voleur ne vient que pour voler, égorger et détruire.

Le 2ème tableau de la parabole commence aussi de façon très solennelle : le sujet traité est vraiment d‘une importance essentielle.

Les prédécesseurs de Jésus ne désignent évidemment pas les patriarches, les prophètes et Jean-Baptiste mais tous ceux qui se sont targués d’apporter bonheur, grandeur, consommation et qui finalement ont conduit leur peuple à la ruine.

Jésus prétend que lui seul donne accès à l’humanisme plénier. Il est la Porte et celui qui, par la foi et la confiance, passe par lui obtiendra « le salut ». Au fond que signifie ce dernier mot que l’Eglise emploie si souvent ? Jésus le décrit par deux images reprises au contexte pastoral :

« il pourra aller et venir » : dans la bible ce couple désigne la liberté. Si l’esclave est bridé par mille contraintes, si l’addiction au péché nous enchaîne, la foi au Seigneur Jésus nous libère totalement puisque son pardon fait sauter nos chaînes. La modernité prétend qu’elle a mis fin à l’aliénation religieuse : quel mensonge ! Jamais l’idolâtrie de l’argent, le prurit de la consommation et du loisir, l’esclavage des alcools et des drogues n’ont fait autant de ravages.

« il trouvera un pâturage » : nous sommes des êtres de besoins et de désirs, nous cherchons sans cesse non seulement des aliments mais des affections, des conversations, des biens culturels, des soins et des protections. Plus profondément nous avons soif du pardon, de l’eau vive qui gît au fond de notre coeur assoiffé, de la vérité, de la paix, de l’amour d’un Dieu qui nous délivre de la mort. Jésus nous assure solennellement qu’il est venu dans ce but.

Moi je suis venu pour que les hommes aient la vie, pour qu’il l’aient en abondance.

Jésus est conscient de n’être pas seulement un être comme les autres : il a reçu mission unique de son Père afin d’accomplir sa mission.

« Au commencement était la Parole et la parole était de Dieu. Et la Parole s’est faite chair…A ceux qui croient en son Nom, il a donné le pouvoir de devenir enfants de Dieu…Si la Loi fut donnée par Moïse, la grâce et la vérité sont venues par Jésus-Christ….Personne n’a jamais vu Dieu : le Fils unique l’a dévoilé » (Jean 1)

Le Bon Berger

La lecture du jour se termine ici mais le texte poursuit par la déclaration célèbre :

Je suis le bon berger : le bon berger donne sa vie pour ses brebis. Le mercenaire, voit-il venir le loup, abandonne les brebis et le loup s’en empare…Je suis le bon berger : je connais mes brebis et mes brebis me connaissent comme mon Père me connaît et que je connais mon Père. Et je donne ma vie pour mes brebis.

J’ai d’autres brebis qui ne sont pas de cet enclos, et celles-là aussi il faut que je les mène. Elles écouteront ma voix et il y aura un seul troupeau et un seul berger. Le Père m’aime parce que je donne ma vie pour la reprendre ensuite…. » (10, 11-18)

Enfin on comprend pourquoi Jésus se dit « bon » : parce que, au contraire des chefs et des dictateurs, il ne fuit pas le danger mais offre sa vie tellement il aime ses brebis que le Père lui a confiées. En Israël, Jésus, par sa croix, a fait sortir quelques disciples de « l’enclos de la Loi » qui enfermait dans un tas d‘observances et dans la culpabilité. A leur tour, les disciples se sont élancés vers d’autres enclos. Trop souvent ils ont usé de violence, cherché le prestige alors que pour être de bons bergers, ils devaient devenir de doux agneaux.

Renversement inouï de la parabole : par amour, le berger se fait agneau immolé. « Voici l’agneau de Dieu qui enlève le péché du monde » : l’Agneau se fait Pain et se donne en nourriture à ses brebis pour les conduire vers la Maison du Père. Quel bonheur de découvrir comment nous sommes libérés, à quel point nous sommes aimés et de suivre le Berger à la rencontre du Père pour la Paix éternelle.

Fr. Raphaël Devillers, dominicain

Source : RÉSURGENCES.BE, le 24 avril 2023

30.04.2023 – HOMÉLIE DU 4ÈME DIMANCHE DE PÂQUES – MT 1, 18-24

Réjouissons-nous, Christ est ressuscité


Il est la porte, passons par lui ! Alléluia !

Par l’Abbé Jean Compazieu

HOMÉLIE :

Textes bibliques : Lire

Les textes bibliques de ce dimanche nous montrent les débuts de la prédication de Pierre, entouré des autres apôtres. Ils sont sortis du lieu où ils se cachaient pour annoncer la bonne nouvelle de l’Évangile : “Dieu l’a fait Seigneur et Christ ce Jésus que vous avez crucifié.” La réponse a été immédiate : “Que devons-nous faire ?” Les gens ont été touchés par la prédication de Pierre. Beaucoup se sont fait baptiser. Pour eux, c’est vraiment “la joie de l’Évangile”. Quand on l’a accueilli, plus rien ne peut être comme avant.

Dans sa première lettre, Pierre s’adresse à des communautés déjà établies qui éprouvent des difficultés. Il les exhorte à se tourner vers ce modèle qu’est le Christ : Au jour de son baptême dans les eaux du Jourdain, il est rentré dans l’eau, pur de tout péché ; il en est ressorti porteur de tous les péchés du monde. Il les a pris sur lui pour nous en libérer. Injustement traité, il s’en remettait à Dieu. C’est par ses blessures que nous sommes guéris. L’opprimé qui est conscient de partager la destinée de son Seigneur n’aura plus jamais une âme d’esclave. Il découvrira que le Seigneur est son berger et qu’avec lui, rien ne saurait lui manquer (Psaume 22).

C’est précisément cette image du berger que Jésus utilise dans l’Évangile de ce dimanche. Tout au long de son ministère, nous le voyons parcourir les villes et les villages pour annoncer la bonne nouvelle. Il y rencontre des foules qui sont “comme des brebis sans berger”. Il est remué jusqu’au plus profond de lui-même par leur douloureuse situation. Les autorités religieuses qui auraient dû s’en occuper les ont pratiquement abandonnées. Le prophète Jérémie dénonce ces “misérables bergers qui laissent périr et se disperser les brebis du pâturage”. Aujourd’hui, le Christ dénonce les pharisiens qui expulsent les brebis du troupeau de Dieu.

Ce qu’il faut bien comprendre, c’est que Jésus se présente à tous comme l’unique vrai pasteur. C’est vrai que les évêques et les prêtres sont présentés comme les bergers du peuple qui leur est confié. Dans les groupes de prière, il y a aussi un berger. C’est également vrai pour tous ceux qui exercent des responsabilités dans différents domaines. Mais les uns et les autres ne pourront être bergers que s’ils sont vraiment reliés au Christ. Nous ne sommes que des intendants.

Dans l’Évangile de ce jour, Jésus se compare également à “la porte des brebis”. C’est par lui que nous devons passer si nous voulons être de vrais pasteurs. Ceux qui ne passent pas par la porte sont “des voleurs et des bandits”. Ces derniers ne viennent que pour voler, égorger et détruire. Ce n’est pas le cas de Jésus : il est venu pour “chercher et sauver ceux qui étaient perdus”. Il veut que tous les humains aient la vie en abondance. Au cours de temps pascal, nous avons entendu le dialogue de Jésus avec Nicodème : “Dieu a tellement aimé le monde qu’il lui a donné son Fils unique.”

Nous sommes envoyés pour continuer ce que Jésus a fait. Mais rien n’est possible sans lui. Il est le passage obligé. Tout le travail des communautés chrétiennes doit passer par lui. Notre mission n’est pas de travailler POUR le Seigneur mais de faire le travail DU Seigneur. C’est de lui qu’on reçoit le salut et la vie en abondance. Nous devons accueillir cet Évangile comme une invitation à remettre le Christ au cœur de nos vies et à nous laisser guider par lui.

Ce 4ème dimanche de Pâques est devenu la journée de prière pour les vocations. Nous pensons aux évêques, aux prêtres, aux religieux… Oui, bien sûr. Mais la vocation ce n’est pas seulement l’affaire de quelques-uns. L’appel du Seigneur est pour tous. Il compte sur chacun de nous pour être les témoins et les messagers de son amour dans le monde d’aujourd’hui. C’est ainsi que nous pourrons participer à son œuvre de rassemblement : “Comme le Père m’a envoyé, moi aussi je vous envoie.” Comprenons bien : il ne nous envoie pas seuls mais les uns avec les autres et surtout avec lui. La vocation de tout baptisé est vocation à devenir disciple du Christ ; C’est en Église que nous participons à sa mission d’annonce de l’Évangile au monde.

À chaque messe, nous sommes invités à communier au Corps et au Sang du Christ. Il est la nourriture qui nous est donnée en vue de la mission. C’est en passant par lui que nous pourrons témoigner du Salut qu’il est venu offrir au monde. En communion les uns avec les autres et avec toute l’Église, nous pouvons chanter et proclamer : “Tu es mon berger, ô Seigneur, rien ne saurait manquer où tu me conduis”. Amen

Abbé Jean Compazieu

Source : DIMANCHEPROCHAIN.ORG, le 23 avril 2023

18.12.2022 – 4ème dimanche de l’Avent – Année A – 18 décembre 2022 – Évangile de Matthieu 1, 18-24

Évangile de Matthieu 1, 18-24

Par le Fr. Laurent Mathelot, dominicain

Un si grand mystère

Avant le Concile Vatican II, dans la liturgie, lorsqu’on arrivait à la confession de Foi du Credo : « Par l’Esprit Saint il a pris chair de la Vierge Marie, et s’est fait homme », on s’agenouillait des deux genoux. Même si ce rite n’est presque plus pratiqué de nos jours – tout au plus, certains inclinent-ils encore la tête lorsque le Credo évoque l’Incarnation – l’appel à l’humilité est toujours adressé à notre intelligence humaine nécessairement limitée quand il s’agit du dessein de Dieu. Nous ne sommes pas ici en présence d’un « miracle » livré à nos « explications » les plus fantaisistes, et les moins convaincantes pour notre « curiosité ». Nous sommes en présence d’un « Mystère », c’est-à-dire un acte de l’Esprit divin qu’il nous faut « accueillir » dans la Foi et la confiance.

La différence est essentielle : aucune explication ne pourra venir à bout du mystère divin ; jamais notre intelligence ne pourra l’épuiser : il restera mystère quelque soit la théologie que nous déployions. En ce sens, bien plus que contraindre la pensée, la limiter par un cadre rigide (et pour certains obsolète voire contraire à l’intelligence), les dogmes de l’Église servent à cerner le mystère. Jamais la notion du Dieu trinitaire ne trouvera d’explication rationnelle satisfaisante ; jamais nous ne pourrons pleinement comprendre l’Incarnation divine, puisque nous ne sommes pas le Christ. Et, en effet, face à de tels mystères, l’intelligence humaine doit savoir rester humble.

Loin d’être humiliante, cette soumission intellectuelle au mystère nous grandit. Seule l’humilité nous rend « capables de comprendre » la puissance d’amour du Dieu de Jésus Christ. Cette grandeur a été celle d’Abraham qui s’est réjoui de ce que Sara sa femme stérile tombe incompréhensiblement enceinte d’Isaac, le fils de la Promesse. Elle a aussi été celle d’Élisabeth qui, dans sa vieillesse, devint enceinte de Jean le Baptiste. Grandeur également de Joseph qui, à l’invitation d’une voix angélique reçue en songe, prit Marie pour épouse enceinte avant qu’il ait posé l’acte géniteur. Grandeur de profonde humilité de Marie enfin, qui, dans son Magnificat, exulte de joie de se trouver enceinte par la Puissance de Dieu qui pour elle fit la « merveille » de se pencher sur sa servante.

Au delà de l’humilité face à Dieu qui se révèle, il faut mesurer le tragique de ce qui se joue entre Marie et Joseph. Elle est une jeune fille – si on se reporte aux mœurs de l’époque, elle ne doit pas avoir plus de quatorze, quinze ans – une jeune vierge, promise en mariage à Joseph. Elle se retrouve enceinte et tous deux savent pertinemment que l’enfant n’est pas de lui. Parce que c’était à l’époque la loi, Joseph aurait pu la faire lapider. Il lui suffisait de la dénoncer, puisqu’elle-même reconnaissait ne pas être enceinte de lui. C’était alors les mœurs de lapider les vierges tombées enceintes hors mariage ; et on en trouve encore hélas des traces de nos jours … Il est coûteux de soumission, le « fiat » de Marie : en faisant confiance à Dieu, elle joue sa vie.

De même, de la part de Dieu, il n’y a pas plus radical abaissement, que d’arriver au monde par l’innocence d’une jeune fille que la résolution du cœur d’un seul homme pouvait condamner à mort ou laisser vivre.

C’est bien dans ces sentiments, dès lors, qu’il faut nous approcher de la crèche de Noël et, intellectuellement, en nous, nous agenouiller humblement, comme si avec Marie nous jouions notre vie dans la confiance. Contrairement à une démarche rationnelle qui viserait à tout comprendre et tout expliquer, il nous faut rester humbles face à l’incarnation de Dieu en l’humanité. Elle ne se fait qu’à ce prix. Ce ne sont pas nos certitudes, ni même nos efforts intellectuels qui nous rapprochent le plus intimement de Dieu, ce sont plutôt nos abandons dans la foi en son amour pour nous.

Le croyant est celui dont l’intelligence reste ouverte au mystère et, même, qui accepte une certaine ignorance. Nous ne savons pas tout des choses de l’amour, des choses de la vie, encore moins savons-nous tout de Dieu.

C’est peut-être une belle prière à faire pour se préparer à Noël : « Seigneur, donne-moi l’humilité d’accepter de ne pas tout comprendre – ni de l’amour, ni de la vie, ni de toi – et remplis mon ignorance du merveilleux de ton mystère … de ton incarnation. Viens au monde en moi ; habite de ton Esprit ce que ma raison ne voit pas. »

Fr. Laurent Mathelot, dominicain

Source, RESURGENCE.ORG, le 13 décembre 2022

18.12.2022 – HOMÉLIE DU 4ÈME DIMANCHE DE L’AVENT – MATTHIEU 1,18-24

Montons à la rencontre de Dieu,
soyons confiants !

Homélie

Par l’Abbé Jean Compazieu


Textes bibliques : Lire


En ce 4ème dimanche de l’Avent, la liturgie nous propose deux récits de l’Annonciation ; nous avons tout d’abord celui de la 1ère lecture : nous sommes au 4ème siècle avant Jésus Christ ; la situation du peuple d’Israël est vraiment dramatique : il est menacé de partout par les armées étrangères. Face à ce danger, le jeune roi d’Israël n’a pas fait le bon choix. Il a abandonné le vrai Dieu pour se tourner vers les dieux païens et s’attirer leurs faveurs.

Mas ces dieux païens ne sont rien. C’est également vrai pour nous aujourd’hui. Nous pensons à ces dieux qui occupent une grande place dans notre vie et notre monde : ils s’appellent argent, richesses, recherche du profit, de la belle situation… Aujourd’hui, le prophète Isaïe invite le roi Acaz et chacun de nous à se tourner vers le seul vrai Dieu. C’est sur lui qu’il nous faut compter. En ce temps de l’Avent, nous sommes invités à retrouver le vrai sens de Noël. Il ne s’agit pas de courir après toujours plus de consommation mais d’accueillir Celui qui vient nous sauver.

Cette annonce de la venue du Sauveur, nous la retrouvons dans l’Évangile de ce dimanche : c’est le message de l’ange à Joseph ; il est invité à prendre chez lui Marie son épouse : “L’enfant qui est engendré en elle vient de l’Esprit Saint”. Ces paroles nous disent la mission que Dieu confie à Joseph : il est appelé à être le gardien de Marie et de Jésus ; le pape François ajoute que cette garde concerne aussi toute l’Église. Saint Joseph est désormais le protecteur mystique de toute l’Église.

Cette garde, joseph l’exerce avec discrétion et humilité, dans le silence. Les Évangiles ne nous rapportent aucune parole de lui. Mais ils témoignent de sa présence constante et de sa fidélité totale, même quand il ne comprend pas. Il accompagne chaque moment avec prévenance et avec amour. Il est auprès de Marie dans les moments sereins et dans les moments difficiles.

Joseph est donc le gardien de Marie, de Jésus et de toute l’Église. Tout cela n’est devenu possible que grâce à sa constante attention à Dieu : il est ouvert à ses signes et disponible à son projet. Joseph est le gardien parce qu’il sait écouter Dieu, il se laisse guider par sa volonté, il est attentif à ce qui l’entoure ; il sait prendre les décisions les plus sages. Comme lui, nous sommes tous appelés à garder le Christ dans notre vie.*

Nous ne pourrons vivre un vrai Noël que si nous prenons chez nous Marie, notre Mère. Avec elle, nous accueillons Jésus qui est venu chercher et sauver ceux qui étaient perdus. C’est dans la prière et le recueillement que nous pourrons, nous aussi, nous ajuster à la volonté de Dieu et participer à son projet. Comme Joseph, nous apprenons à nous faire les serviteurs d’un projet qui nous dépasse. Comme lui, le Seigneur nous conduit sur des chemins que nous n’avions pas prévus. Mais les paroles qu’il nous adresse sont celles de la vie éternelle.

Dans la seconde lecture, saint Paul nous annonce précisément l’accomplissement de ce salut en Jésus. Il nous décrit toute la richesse du mystère déployé depuis sa naissance jusqu’à sa mort et sa résurrection. Lui-même a été choisi par le Christ pour être apôtre : sa mission a été d’annoncer le salut en Jésus Christ au milieu des nations païennes. Comme le prophète Isaïe, il a été affronté à l’incrédulité et à la persécution. Mais rien ni personne ne peut empêcher Dieu de vouloir sauver le monde. La fête de Noël nous rappelle que nous attendons la venue de celui qui unifiera en lui Dieu et l’homme. Ce temps de l’Avent nous est donné pour nous mettre en route vers Celui qui ne cesse de venir à nous.

Beaucoup ne connaissent pas et ne veulent pas entendre parler du vrai sens de Noël, de Jésus, de Marie, de la crèche. Mais le message de l’Évangile doit être annoncé partout dans le monde. Notre mission ‘est pas de faire croire mais de dire et de témoigner. Le Seigneur nous assure que l’Esprit Saint agit dans le cœur ce ceux et celles qu’il met sur notre route. Le cardinal Eyt, ancien archevêque de Bordeaux, disait que “nous ne sommes pas deux mille ans après Jésus Christ mais deux mille ans avec lui”. Aujourd’hui comme autrefois, nous pouvons toujours compter sur lui.

En célébrant cette Eucharistie, nous nous tournons vers celui qui vient à nous. À chaque messe, il rejoint les communautés réunies en son nom. Il est “Emmanuel”, Dieu avec nous. Il est Celui qui nous fait entrer dans l’alliance définitive entre Dieu et l’homme. Et il nous confie cette mission : faire triompher l’amour sur la haine, la tendresse sur l’indifférence. Alors, plus que jamais, nous le prions ensemble : « O Seigneur, envoie ton Esprit qui renouvelle la face de la terre ! » Amen

Abbé Jean Compazieu

Source : DIMANCHEPROCHAIN.COM, le 12 décembre 2022