02.02.2025 – HOMÉLIE DE LA FÊTE DE LA PRÉSENTATION DU SEIGNEUR AU TEMPLE – LUC 2,22-40

Des lumières pour le monde

Homélie par le Fr. Laurent Mathelot

C’est aujourd’hui une célébration à plusieurs couches, comme une pile de crêpes, oserais-je dire. C’est donc la Chandeleur, la fête des bougies. Nous célébrons aussi la présentation de Jésus au Temple, la cérémonie de la purification de la Vierge Marie et le rachat de Jésus à Dieu pour le prix de deux colombes. Notre célébration d’aujourd’hui, 40 jours après Noël, conclut le cycle de l’Épiphanie : dans tout le périple de sa naissance, Jésus arrive enfin au Temple de Jérusalem.

Comme s’il fallait rajouter une couche, le pape s. Jean-Paul II en a fait aussi la Journée de la vie consacrée – la fête des personnes qui ont fait des vœux religieux.

Enfin – je l’ai dit – il y a la tradition des crêpes, symboles du soleil qui revient et de la farine qu’on ne craint plus de sacrifier tandis qu’on commence les semailles d’hiver. La tonalité du jour oscille entre célébration de la lumière, consécration à Dieu et espérance en l’avenir.

Saint Luc est prompt à nous présenter Jésus profondément ancré dans la culture juive de son époque. Dans son Évangile, la famille de Jésus est très pieuse. Elle observe scrupuleusement les prescriptions de la Loi de Moïse. Tout premier-né est le don de Dieu et doit lui être consacré. Si l’on veut reprendre son enfant, il s’agit alors de le racheter à Dieu. Il y a, derrière cette coutume, la tradition des prémices, d’offrandes religieuses prélevées sur les premiers fruits de toute récolte. En filigrane, on retrouve ici le récit de Samuel (1 Samuel 1,1-2,10), dont le nom signifie précisément « Don de Dieu », que sa mère Anne consacre au Seigneur dès la naissance, tant elle exulte d’avoir été sauvée de sa stérilité. Il y a aussi, derrière cette tradition, l’attitude assez injuste qui consiste à donner une place particulière à l’aîné des garçons au sein des familles et qui percole jusqu’à nos jours. C’est oublier la partie « rachat » de la tradition juive qui en fait à nouveau un fruit comme les autres. Au fond – et Jean-Paul II l’avait bien vu – nous ne devrions garder que la distinction de la consécration personnelle à Dieu qui est, dans le christianisme, accessible à tous le monde, par des vœux publics ou privés.

On pourrait aussi s’interroger sur la nécessité des rites de purification de la Vierge Marie. En quoi, la Toute-Pure doit-elle se purifier ? Des siècles de christianisme on surchargé de sainteté la notion de pureté, mais dans le judaïsme, ancien comme moderne, il ne s’agit que de purification rituelle, comme on se lave les mains avant d’aller manger. Pureté et péché ne sont pas intrinsèquement liés dans le judaïsme comme il le sont devenus dans le christianisme. On est rituellement impur du simple fait de côtoyer un malade, par exemple. Il s’agit là essentiellement de mesures d’hygiène sociale alors que, pour nous, il s’agit avant tout d’hygiène spirituelle.

Enfin la chandeleur, quant à elle, littéralement la fête des chandelles, tient son nom d’une procession instituée par le pape Gélase en 494, célébrant, avant le lever du jour, Jésus comme la « Lumière qui se révèle aux nations », procession au cours de laquelle on bénissait des cierges que les chrétiens rapportaient ensuite chez eux, afin de protéger leur foyer.

Alors que retenir de tout ceci pour notre vie spirituelle ?

De la purification de la Vierge Marie, qui est notre modèle de consécration chrétienne, nous devons garder, je pense, le souci d’une hygiène spirituelle en société, à nous-mêmes nous purifier l’esprit avant toute rencontre, pour qu’elle soit sous le signe de la présence de Dieu entre nous.

Du rachat de Jésus comme premier-né, ce qui le rend à sa famille, nous comprenons, avec la Lettre aux Hébreux, que le Christ n’est pas confiné au lieu du Temple – pour nous à notre présence à l’église – qu’il est Dieu qui se rend présent dans la chair et que sa véritable consécration aura lieu dans le monde, à son baptême.

De la joie exubérante du vieux Siméon – « mes yeux ont vu le salut » – nous pourrions méditer notre propre sentiment d’avoir été sauvés par la rencontre avec le Christ. Il s’agit, dans cette vie et dans ce monde, de trouver cette joie dont nous sommes appelés à rendre compte.

Enfin, du souvenir des anciennes processions de la Chandeleur, nous devrions garder que nous sommes ces petites lumières envoyées au monde pour témoigner de la véracité du salut, de ce que l’amour de Dieu brille effectivement en nous.

C’est aujourd’hui à tous notre fête comme porteurs de la « Lumière qui se révèle aux nations ». Notre baptême a fait de nous tous des premiers-nés, des consacrés à l’amour de Dieu pour le monde.

Seigneur, fais que notre Église redevienne, pour le monde, cette communauté de petites lumières qui témoignent de ton amour. Seigneur, fais scintiller au quotidien notre propre consécration. Amen.

Fr. Laurent Mathelot

Source : RÉSURGENCE.BE, le 28 janvier 2025

02.02.2025 – HOMÉLIE DE LA FÊTE DE LA PRÉSENTATION DU SEIGNEUR AU TEMPLE – LUC 2,22-40

Jésus lumière du monde

Textes bibliques : Lire


Pistes pour l’homélie par le Père Jean Compazieu


Le 2 février, les chrétiens célèbrent la présentation de Jésus au Temple. A l’époque, tous les parents faisaient cet acte d’offrande de leur fils premier né. Mais cette fête d’aujourd’hui n’est pas un simple rappel de l’événement. Il faut surtout y voir une révélation sur le mystère de Jésus. Nous y découvrons le vieillard Siméon qui reconnaît en lui la Lumière du monde. C’est pour cette raison que cette fête est appelée “la Chandeleur”, la fête de la Lumière.

Cette lumière avait été annoncée par le prophète Malachie (1ère lecture). Ce livre jette un regard très critique sur les prêtres de l’époque qui exercent dans le temple de Jérusalem. Il dénonce les magouilles, les fraudes, les injustices. Tout cela ne va pas durer. Le mal ne peut pas avoir le dernier mot. Dieu saura bien envoyer un messager pour remettre les choses à leur place. Bien sûr, le rêve de Malachie se limitait à une restauration et à un retour des valeurs du passé. Plus tard, on verra Jésus qui arrive au temple. Les chrétiens découvriront en lui celui qui est la Lumière du monde. Ils comprendront que le temple que Jésus veut purifier c’est chacun de nous.

La lettre aux Hébreux (2ème lecture) insiste avec force sur le mystère de Jésus. Il est celui qui a voulu partager avec nous “la condition humaine”. Il a voulu être solidaire de nous jusqu’à l’extrême. Il n’a pas échappé à la mort qui fait partie de notre condition. Siméon avait bien entrevu cette issue fatale en prophétisant que l’enfant serait signe de division. Mais cette destinée ne s’est pas arrêtée à la mort. Jésus appartient pleinement à la famille humaine et pleinement à la famille de Dieu ; de ce fait, il est celui qui ouvre les portes du temple céleste. Désormais avec lui et en lui, les frères de Jésus ont accès à Dieu lui-même.

C’est ainsi qu’en ce jour, Jésus nous est présenté comme la “lumière des nations”. C’est important pour nous car nous vivons dans un monde qui perd ses repères. Chaque jour, les médias nous en donnent de tristes exemples. Cela ne sert à rien de se lamenter. Nous avons bien mieux à faire : comme le vieillard Siméon, nous sommes appelés à montrer Jésus au monde. Un jour, le Cardinal Barbarin disait que nous n’avons pas une obligation de résultat mais une obligation de témoignage. Comme Bernadette de Lourdes, nous ne sommes pas chargés de faire croire mais de dire.

Le principal travail c’est Dieu qui le fait dans le cœur de chacun. La Lumière du monde c’est lui. Comme Siméon, nous pouvons dire : “Mes yeux ont vu ton salut que tu préparais à la face des peuples.” L’Ancien Testament nous a révélé un Dieu qui a fait alliance avec son peuple choisi. Avec la venue de Jésus, cette alliance s’élargit : elle n’est pas offerte au seul peuple élu mais à tous les peuples du monde. Grace au Christ, l’humanité est convoquée pour devenir l’unique peuple de la nouvelle alliance. C’est de cette bonne nouvelle que nous avons tous à témoigner.

Plus tard, Jésus dira : “Je suis la Lumière du monde”. La lumière ça éclaire et ça fait vivre. Une personne qui vivrait en permanence dans une pièce sombre finirait par tomber malade. Le Christ se présente à nous comme cette lumière qui nous montre le chemin, qui éclaire notre conscience et qui nous fait vivre. C’est cette lumière de Dieu qui nous a été transmise au jour de notre baptême. Et c’est pour cette raison que nous la ranimons le 2 février.

Cette fête d’aujourd’hui fait naître en chacun de nous un grand désir de rencontrer Jésus et de nous laisser transformer par la Lumière qui est en lui. Nous le rencontrons dans la liturgie qui nous fait parcourir les étapes de sa vie. Nous le rencontrons aussi dans les sacrements : le baptême qui fait de nous des fils de Dieu, le sacrement du pardon qui nous purifie. Mais par-dessus tout, Jésus vient à nous par l’Eucharistie : “Celui qui mange ma chair et boit mon sang demeure en moi et moi, je demeure en lui.” (Jn 6. 56) Nous avons tous besoin de cette rencontre “source et sommet de toute vie chrétienne” (Concile Vatican II)

Avec Siméon, nous sommes tous invités à prendre l’enfant Jésus dans nos bras pour le contempler et rendre grâce à Dieu. Le Salut qui nous est annoncé en ce jour n’est pas une simple théorie mais quelqu’un. Il est livré entre nos mains de pécheurs. Il attend de nous que nos bras soient grands ouverts pour accueillir son Salut. A la fin de chaque messe, nous sommes envoyés pour le montrer et le communiquer à notre monde. Cette mission nous concerne tous, quel que soit notre âge. Mais la rencontre de Siméon et Anne nous montre l’importance des “seniors” dans la transmission de la foi. Beaucoup d’enfants n’ont entendu parler de Jésus que par leurs grands parents. Nous avons là le visage d’une Église dont le renouvellement repose aussi sur les plus âgés de ses membres.

Nous vivons dans un monde qui est souvent indifférent à la présence de Dieu. Nous te prions Seigneur, envoie ton Esprit Saint : qu’il fasse de nous des témoins de la Lumière, des apôtres de Jésus auprès de tous ceux qui attendent leur délivrance. Amen

Père Jean Compazieu

Source : DIMANCHEPROCHAIN.ORG, le 26 janvier 2025