Méditation du 23ième dimanche du Temps Ordinaire : Comment vivre la fraternité au sein de nos communautés chrétiennes ?

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Méditation du 23ième dimanche du Temps Ordinaire : Comment vivre la fraternité au sein de nos communautés chrétiennes ? 

Le Père jésuite Antoine Kerhuel nous introduit à la méditation avec les lectures du 23ième dimanche du temps ordinaire de l’année liturgique A.

Comment vivre la fraternité au sein de nos communautés chrétiennes ? Telle est la question que nous posent les textes de la liturgie de ce dimanche. Comment nous soutenons-nous les uns les autres dans notre quotidien ? Aucun d’entre nous ne peut se prétendre parfait… et, malgré cela, nous sommes invités à nous faire des remarques pour nous aider mutuellement à avancer.

Dans la première lecture, le prophète Ezéchiel reçoit le titre de « guetteur pour la maison d’Israël ». De ce fait, il est appelé à reprendre celui qui est qualifié de « méchant » pour qu’il renonce à sa conduite mauvaise. Si le prophète n’accomplit pas sa mission, certes le « méchant » subira les conséquences de sa conduite – il mourra – mais le prophète sera tenu pour responsable de la mort de ce « méchant ». Si le prophète accomplit sa mission mais n’est pas écouté, alors le « méchant » mourra, mais rien ne pourra être reproché au prophète. De telles perspectives sont esquissées pour un être qui sort de l’ordinaire (un prophète) et pour sa mission vraiment exceptionnelle.

Dans l’Evangile de ce jour, Jésus reprend une thématique semblable alors qu’il s’adresse à ses disciples. Il ne s’agit pas cette fois d’un méchant qui, de manière ordinaire, se comporterait mal, mais d’un membre de la communauté qui commet un péché à l’égard d’un autre membre de la communauté. L’offensé est invité à venir trouver l’offenseur – en tête à tête – pour lui faire des reproches ; s’il n’est pas entendu, alors l’offensé peut essayer à nouveau, en se faisant accompagner d’une personne ou de deux ; et s’il n’est toujours pas entendu, il peut demander à l’assemblée de l’Eglise de se prononcer sur le cas. Alors, et alors seulement, une sanction peut être prononcée. On peut ici remarquer qu’il n’est pas du tout question de vengeance personnelle. La voie employée est tout autre : il s’agit de recourir au discernement et à la sagesse de la communauté des croyants. Une révolution ! Sur le fond de ce discernement communautaire, les disciples de Jésus se voient remettre le pouvoir de lier et de délier. Puissions-nous, nous-mêmes aujourd’hui, œuvrer pour que nos relations mutuelles soient empreintes de cette disponibilité à discerner ensemble ce qui est juste et ce qui ne l’est pas !

Dans l’extrait de la lettre aux Romains lu ce dimanche, l’apôtre Paul semble approfondir cet enseignement en allant jusqu’à écrire : « n’ayez de dette envers personne, sauf celle de l’amour mutuel, car celui qui aime les autres a pleinement accompli la Loi ». Paul reprend l’enseignement de Jésus lorsqu’il rappelle que tous les commandements se résument dans la sentence : « Tu aimeras ton prochain comme toi-même », et il va jusqu’à s’écrier : « Le plein accomplissement de la Loi, c’est l’amour ».

On le voit bien. Les textes de la liturgie de ce jour nous invitent à emprunter un chemin délicat. Devant l’offense, nous sommes tentés de dire : « cette personne m’a fait du mal ou se comporte mal dans sa vie, donc je dois couper toute relation avec elle, voire la punir ». Une telle attitude sonnerait faux, car nous nous placerions nous-mêmes dans la position d’un juge alors même que nous savons que nos propres existences ne sont pas toujours édifiantes. Nous sommes aujourd’hui plutôt invités à nous en remettre au discernement de la communauté des croyants, de cette communauté qui a éprouvé pour elle-même que « le plein accomplissement de la Loi, c’est l’amour ».

Cette voie est exigeante, car elle ne donne pas de réponses toute faites aux situations que nous rencontrons dans notre quotidien. Regardons, dans les Evangiles, comment Jésus se comporte. Laissons Jésus lui-même (lui qui est « le chemin, la vérité et la vie ») nous montrer cette voie, et laissons-le façonner en nous le désir de le suivre.

Père jésuite Antoine Kerhuel, secrétaire général de la Cie de Jésus

Source: VATICANNEWS, le 2 septembre 2020

Méditation du 15ème dimanche ordinaire : « Laisser grandir la vie en nous »

2020.07.11 La parabola del seminatore e del seme

Méditation du 15ème dimanche ordinaire : « Laisser grandir la vie en nous »

Le Père jésuite Antoine Kerhuel nous introduit à la méditation avec les lectures du 15ème dimanche du temps ordinaire de l’année liturgique A.

Laisser grandir la vie en nous, croître vers la vie, accueillir la vie en plénitude … les textes de ce dimanche invitent à considérer comment nous recevons la vie, comment nous laissons la vie s’épanouir en nous, comment nous sommes serviteurs de cette vie. Attention, cependant ! Il ne s’agit pas de n’importe quelle vie ! il s’agit de la vie telle que nous la donne le Seigneur, une vie féconde et généreuse, et une vie surprenante !

Dans l’extrait de l’Evangile de Saint Matthieu lu ce dimanche, Jésus raconte la parabole du semeur. Cet homme est bien étrange, car il sème le grain sans compter. Il semble qu’aucun terrain ne soit a priori exclu : reçoivent le grain à la fois la terre en bordure du chemin, le sol pierreux, le lopin rempli de ronces et la bonne terre. La largesse de ce semeur impressionne : nous voilà mis devant la figure d’un Dieu dont la parole s’adresse à tous, absolument à tous, et non à un petit club de personnes qui se désigneraient elles-mêmes comme « bonne terre ».  Cette largesse ne fait violence à personne, et chaque section de terrain, en fonction de ce qu’elle est, reçoit la semence. Bien des fois, le grain n’arrivera jamais à maturité, car le sol où il tombe ne peut, pour des raisons diverses, porter du fruit. Mais là où il porte du fruit, le rendement est de cent, ou soixante, ou trente pour un. Curieusement, le texte de la parabole ne présente pas un semeur obsédé par le désir d’obtenir le rendement maximum : ce qui semble compter pour lui, c’est qu’il y ait un rendement (quel qu’il soit). Le semeur prête attention à la façon dont un processus de vie a été enclenché, et non à ce qu’il en retirera. En nous parlant d’un semeur au cœur large, à l’esprit libre de toute fascination productiviste et au regard plein de confiance en la manière dont, semble-t-il, chaque terrain accueillera la semence reçue, le texte n’enlève pas à l’auditeur sa propre responsabilité … tout au contraire, il la souligne.

Car rien n’est joué, et c’est ce que semble indiquer la deuxième lecture de ce dimanche, tirée de la lettre aux Romains. L’image utilisée par l’apôtre est ici celle d’un enfantement. Toute la création est en enfantement. Elle gémit car l’accueil de ce qui est en train de naître en elle est difficile. De cette création, nous faisons partie, nous aussi. Certes, nous avons reçu l’Esprit, mais nous attendons que se réalise pleinement notre adoption filiale. Une bagarre est en cours, dans la création et en chacun de nous, pour que nous collaborions au travail d’enfantement dont nous sommes à la fois les bénéficiaires et les acteurs. Bénéficiaires, car nous espérons l’adoption. Et acteurs, car cette adoption ne se fera pas sans notre participation. La deuxième lecture souligne l’aspect exigeant du processus de libération de la vie selon Dieu, en nous et autour de nous.

La première lecture de ce dimanche, tirée du livre d’Isaïe, nous ramène vers une attitude de radicale confiance : « La pluie et la neige qui descendent des cieux n’y retournent pas sans avoir abreuvé la terre, sans l’avoir fécondée et l’avoir fait germer, donnant la semence au semeur et le pain à celui qui doit manger ; ainsi ma parole, qui sort de ma bouche, ne me reviendra pas sans résultat, sans avoir fait ce qui me plaît, sans avoir accompli sa mission ». En proposant ce texte comme partie d’un ensemble axé sur la germination et l’enfantement, la liturgie de ce dimanche invite à la confiance. Oui, notre vie – individuelle et collective – est comme une germination et un enfantement ! Oui ce processus rencontre de nombreux obstacles, en nous et autour de nous ! Mais en Jésus, mort et ressuscité, nous savons qu’une nouvelle vie nous est déjà donnée. Il nous est bon d’entendre tout cela aujourd’hui, en ces semaines où notre monde, plongé dans une grave crise sanitaire (qui est aussi une crise économique et sociale), peine à renouveler sa manière de penser l’avenir.

Méditation du 15ème dimanche ordinaire de l’année liturgique A avec le Père Antoine Kerhuel, SJ

Source: VATICANNEWS, le 11 juillet 2020