Saint Ignace: 500 ans après, une famille spirituelle réunie à Marseille 

Vieux-Port de Marseille, France. Vieux-Port de Marseille, France.   (AFP or licensors)

Saint Ignace: 500 ans après, une famille spirituelle réunie à Marseille 

C’est dans la plus antique ville de France, l’ancien comptoir phénicien que fut Marseille, que la Compagnie de Jésus célèbre du 30 octobre au 1er novembre son demi-millénaire d’existence, soit 500 ans depuis la blessure de son fondateur saint Ignace de Loyola, par un boulet de canon à la bataille de Pampelune. Un certain 20 mai 1521, qui a déclenché un chemin de conversion à l’origine de la fondation de l’ordre religieux rompu au discernement spirituel. 

Delphine Allaire – Marseille, France

Durant trois jours autour de la Toussaint, plus de 7 000 membres de la famille ignatienne -religieux, laïcs, membres de mouvements, familles, anciens élèves d’établissements jésuites-, dont 3 000 jeunes, vont se retrouver pour prier, réfléchir et fraterniser sur le thème «Au large, avec Ignace! Tous saints».

Ce rassemblement s’inscrit dans le cadre de l’année ignatienne annoncée par le père Arturo Sosa sj, supérieur général de la Compagnie de Jésus, qui s’est ouverte le 20 mai 2021 et s’achèvera le 31 juillet 2022. Cette année, dont la devise est «Voir toute chose nouvelle en Christ», célèbre naturellement le début de la conversion d’Ignace il y a 500 ans, mais aussi les 400 ans de sa canonisation par le Pape Grégoire XV, aux côtés de saint François Xavier, le 12 mars 1622 en la basilique Saint-Pierre de Rome.

Se laisser interpeller par saint Ignace

«À Pampelune, il y a 500 ans, tous les rêves mondains d’Ignace ont été brisés en un instant. Le boulet de canon qui l’a blessé a changé le cours de sa vie, et le cours du monde. Des choses apparemment insignifiantes peuvent être importantes», affirmait le Pape François en mai dernier pour l’ouverture même de cette année ignatienne.

Au premier jour du rassemblement, samedi 30 octobre après-midi, des déambulations sont prévues dans la cité phocéenne à la rencontre du «Marseille ignatien», et portant sur différents thèmes comme le dialogue interreligieux, l’intégration et l’accueil ou la lutte contre la pauvreté.

Diverses propositions spirituelles

La mémoire des défunts, particulièrement ceux que la pandémie a emportés et les exilés qui ont péri en mer, mais aussi les victimes de violences sexuelles dans l’Église feront l’objet d’une prière et recueillement sur l’esplanade de la cathédrale néo-byzantine de la Major et dans différentes églises simultanément, avant 14 veillées festives proposées le samedi soir.

Dimanche 31 octobre, des messes seront célébrées dans 30 paroisses marseillaises. Celle de 11 heures en l’église jésuite Saint-Ferréol du Vieux-Port sera retransmise dans l’émission Le Jour du Seigneur sur la chaîne nationale française, France 2.

Un grand festival de la famille ignatienne aura lieu dimanche après-midi, avant une vigile «connectée» de la Toussaint, dans la soirée depuis le Palais des Congrès de Marseille, et diffusée en ligne.

Lundi 1er novembre, la messe solennelle de la Toussaint sera célébrée par l’archevêque de Marseille, Mgr Jean-Marc Aveline –à suivre sur KTO et RCF. Le programme détaillé. 

Des racines profondes entre Marseille et les jésuites 

Ville-monde aux quartiers contrastés, port ouvert sur la Méditerranée, cité sous la protection de la «Bonne Mère» et premier diocèse au monde consacré au Sacré-Cœur, le choix de Marseille s’est imposé spontanément pour la famille ignatienne, d’autant que la plus ancienne ville de France entretient des liens historiques étroits avec les jésuites. 

La première maison des jésuites du XVIIème siècle se visite dans le quartier populaire du Panier. C’est aussi depuis Marseille que de nombreux missionnaire ignatiens ont pris le large: des sœurs auxiliatrices pour la Chine, des Pères Blancs pour le Maghreb, des jésuites pour le Proche et le Moyen-Orient.

Source: VATICANNEWS, le 28 octobre 2021

Marseille: à Notre-Dame de la Garde, la double vénération mariale d’Orient et d’Occident

Notre Dame de la Garde
Notre-Dame de la Garde

Marseille: à Notre-Dame de la Garde, la double vénération mariale d’Orient et d’Occident

Lieu de forte piété populaire, d’ouverture sur la Méditerranée, d’élan missionnaire vers l’Orient, de fraternité, d’amitié et de dialogue, la basilique Notre-Dame de la Garde à Marseille en France représente un sanctuaire à l’identité très affirmée, qui rejaillit en terre et en mer, sur toute la ville et le bassin méditerranéen. 

Entretien réalisé par Delphine Allaire – Marseille, France

Au fil du mois de mai 2021, le Pape François a mis en lumière trente sanctuaires mariaux sur les cinq continents à travers «un marathon de prière», pour invoquer la fin de la pandémie dans le monde et le retour à une vie sociale et professionnelle normale.

La vénération de la Vierge Marie dans les différentes piétés populaires a pu se manifester. Bien que ne figurant pas sur la liste des trente sanctuaires, celui de Notre-Dame de la Garde à Marseille en France, a suivi de près l’initiative du Pape.

Et pour cause, la dévotion mariale occupe une place de choix dans la cité phocéenne grâce à la basilique Notre-Dame de la Garde, au sommet de laquelle trône la «Bonne Mère», étincelante statue dorée de la Vierge Marie tenant l’Enfant-Jésus dans ses bras.

Le sanctuaire édifié tel quel au XIXème siècle, voit son histoire remonter au XIIIème siècle (1214) alors qu’il n’était encore qu’une petite chapelle. 

Père Olivier Spinosa, recteur de la basilique, nous raconte comment le lien avec la Vierge Marie s’est tissé au fil des siècles et répandu depuis cette Colline de la Garde, jusque partout dans la ville, et au loin sur les mers jusqu’aux rives de l’Orient.  Entretien avec père Olivier Spinosa, recteur de la basilique Notre-Dame de la Garde

Quelle est l’origine du sanctuaire de Notre-Dame de la Garde?

À l’origine du sanctuaire, il n’y a pas d’apparitions, pas de miracles, mais le désir d’un homme dont on sait peu de choses; maître Pierre. Maître Pierre a le désir de venir sur cette colline pour prier, seul à seul avec le Seigneur. La colline appartenait à l’abbaye de Saint-Victor, l’on perçoit déjà un lien avec le monde monastique.

Maitre Pierre construit là un petit ermitage avec une chapelle. Très vite, nombreux sont ceux à le rejoindre ici pour prier, et les pèlerins affluent jusqu’à nos jours. Il y a cet appel ici à la prière. 

Au sommet de l’édifice, trône une statue de la Vierge Marie tenant l’Enfant-Jésus. D’ailleurs, il est possible entrer dans cette statue et voir Marseille avec les yeux de la Vierge Marie. Et avec les yeux de la Vierge Marie, ce que l’on voit en premier est Jésus qui bénit. Ainsi nous regardons le monde sous la bénédiction du Seigneur.

Quelle est la particularité de la spiritualité mariale à Notre-Dame de la Garde, et la piété populaire qu’elle engendre?

D’abord, Notre-Dame de la Garde est appelée par les Marseillais, «la Bonne Mère». D’ailleurs, ils aiment à venir lui déposer des bouquets de fleurs le jour de la fête des mères. J’aimerais toutefois souligner l’aspect «de la garde». Le nom de la Garde est celui de la colline, mais Marie est aussi celle qui dans l’Évangile «garde» la parole. Tout comme elle nous invite à être «gardé» dans la foi. La spiritualité de la garde est très importante, c’est une spiritualité biblique. L’on insiste beaucoup sur Notre-Dame, mais pas assez sur «la garde».

“Le nom de la Garde est celui de la colline, mais Marie est aussi celle qui dans l’Évangile «garde» la parole.”

Chaque 1er de l’an aussi, nous voyons des longues files de Marseillais devant le brûloir, ils aiment venir en famille confier l’année à venir à la Vierge Marie. Tandis que tous les premiers samedis du mois, les parents viennent présenter leurs nouveau-nés à la prière de la Vierge Marie; des parents chrétiens, en recherche, ou d’autres religions.

De quelle façon se manifeste la dimension méditerranéenne, chère au Pape, du sanctuaire?

Grâce aux missionnaires partis en Algérie, en Orient, nous avons ce lien très fort avec l’Orient. Ce lien se voit à travers l’architecture aussi, l’art roman mêlé à l’art byzantin pour exprimer l’unité entre Occident et Orient. Sur les coupoles de la basilique figurent des inscriptions en latin et en grec, toujours pour signifier cette double vénération de l’Église d’Occident et d’Orient à la Vierge Marie. Une unité de la vénération.

Nous avons donc des relations particulières avec les chrétiens d’Orient; les Arméniens viennent chaque année pour une célébration tout comme les Églises chrétiennes d’Orient de Marseille aiment à venir également. Je pense aux juifs, aux musulmans, surtout les femmes musulmanes, qui sont nombreuses à se recueillir devant la Vierge Marie à la crypte. Elles expriment une réelle volonté de confier des intentions à la Vierge Marie, le monde musulman a cette proximité avec Marie donc elles se sentent ici assez à l’aise.

Notre-Dame de la Garde est aussi un sanctuaire inextricablement lié à la mer…

Depuis le XVIème siècle, la Bonne Mère sert de lien avec les pêcheurs. L’édifice sert de point de repère aux marins. Très vite, ils ont aimé regarder Marie qui regarde la mer, et rendre grâce après avoir été sauvé d’un péril. Nous avons plusieurs ex-voto de marins dans la basilique: des bateaux accrochés aux voûtes ou des tableaux. Un monument pour les morts en mer se trouve aussi sur le terrain de la basilique, les familles de marins s’y recueille fréquemment.

Ex voto de marins (crédit photo : Bénédicte Parel)

Ex voto de marins (crédit photo : Bénédicte Parel)

Comment expliquer cette forte identité de la ville de Marseille, qui émane en très grande partie de Notre-Dame de la Garde?

Je crois que c’est parce qu’on la voit de partout. Que l’on soit dans la détresse ou la joie, sur le port, ailleurs dans la ville, l’on se retourne et on peut la regarder. Combien de personnes en situation difficile se disent «de l’hôpital je la vois». Cette présence au sommet de la ville rend possible cette identification. Quelque part, elle est toujours là pour nous aider à lever la tête. Nous sentons «une fierté de la Bonne Mère».

Notre-Dame de la Garde est un lieu unique, venir à la basilique nous fait prendre de la hauteur avec notre vie. Un lieu où nous sommes appelés à la hauteur. Il y a tant de choses dans le monde qui nous tirent vers le bas, ici, nous sommes tirés avec le Christ et la Vierge Marie vers le haut, vers le ciel.

Source: VATICANNEWS, le 2 juin 2021