François à Marseille, samedi 23 septembre, dans la Maison des Missionnaires de la Charité. (Vatican Media)
Le détour de François dans l’un des quartiers les plus pauvres de France
Pour sa seconde journée dans la Cité phocéenne, samedi 23 septembre, avant de se rendre à la clôture des Rencontres méditerranéennes, François est allé dans l’arrondissement de Saint-Mauront, l’un des plus pauvres de France, dans la Maison des Missionnaires de la Charité, pour rencontrer des personnes en situation de précarité.
«Merci pour votre accueil. Nous sommes tous frères, c’est important», a d’emblée lancé le Souverain pontife à la petite foule qui l’attendait dans le troisième arrondissement de Marseille, une trentaine de personnes issues de familles en situation de précarité, accueillie par la congrégation fondée en 1950 par Mère Teresa.
«Au-delà des pensées politiques ou religieuses, nous sommes tous frères.», a répété le Souverain pontife.
«Le quartier dans lequel nous étions est un des quartiers les plus pauvres d’Europe. C’est le quartier le plus pauvre de Marseille», commente Anne Giraud, responsable de la pastorale diocésaine des migrants à Marseille, au micro de Delphine Allaire, «Donc le fait qu’il ait pu venir dans ce quartier là, c’est quand même extrêmement significatif.»
«Nous étions dans une petite cour en béton au milieu d’une cité. Il n’y avait pas de choses mirobolantes.Il y avait des personnes qui étaient là, qui se rencontraient, qui étaient heureuses de se parler.», note Anne Giraud.
Selon le rapport 2020 de l’Observatoire des inégalités, avec un taux de pauvreté de 53,4%, le troisième arrondissement de Marseille compte près de 25 000 personnes pauvres.
François avec les soeurs missionnaires de la Charité, samedi 23 setpembre à Marseille.
Avant de quitter l’archevêché, Français a reçu le vice-président de la Commission européenne, Margaritis Schinas, et a rencontré des représentants d’ONG impliquées dans le sauvetage des migrants en Méditerranée.
Suite de la journée
Le Pape a ensuite rejoint l’amphithéâtre du Palais du Pharo, promontoire du Vieux-Port où 900 personnes, dont les 70 évêques et les 70 jeunes de la Méditerranée, écouteront son discours-clé du voyage. Le président Macron, la Première dame Brigitte Macron, le maire de Marseille, Benoit Payan, et d’autres sommités civiles, ecclésiales et politiques seront dans l’assemblée.
François et Emmanuel Macron se rencontreront ensuite en privé dans le salon d’honneur du Pharo, pour la quatrième fois depuis 2017. Leur relation est décrite par le Saint-Siège comme «cordiale et familière». Après un déjeuner à l’archevêché, le Pape François rejoindra le stade Vélodrome pour la messe votive en l’honneur de la Vierge de la Garde. Il effectuera un tour de la grande avenue du Prado en papamobile découverte à partir de la statue du David marseillais, réplique du célèbre David de Michel-Ange en marbre de Carrare à Florence.
Messe pontificale en français, homélie en italien
À 16h15, début de la messe célébrée en français. L’homélie du Pape sera prononcée en italien, avec des sous-titres disponibles sur écrans géants. Le président de la République française, la Première dame, et le ministre français de l’Intérieur et des cultes assisteront à la messe pontificale. Le Saint-Père décollera de Marseille-Provence à 19h15 et atterrira à Rome à 20h50, donnant sa traditionnelle conférence de presse à bord de l’avion.
Tandis que Mgr Aveline prononçait un mot d’accueil à l’attention du Pape, François l’a interrompu avec un trait d’esprit qui a provoqué un bref moment d’hilarité.
La visite du pape François à Marseille dans le cadre des Rencontres méditerranéennes a démarré ce vendredi 22 septembre par un temps de prière à la Vierge Marie dans la basilique Notre-Dame de la Garde. Dans les rangs se trouvaient le clergé du diocèse de Marseille – prêtres, diacres, séminaristes, consacrées -, des recteurs des sanctuaires du pourtour méditerranéen ainsi que des représentants de l’Église en France, à commencer par Mgr Éric de Moulins-Beaufort, président de la Conférence des évêques de France.
Le cardinal Jean-Marc Aveline, archevêque de Marseille, a prononcé un discours de bienvenue, retraçant notamment l’histoire de la basilique si chère aux Marseillais. « Dès votre arrivée, vous avez voulu faire comme nous faisons ici, chaque fois qu’un événement heureux ou malheureux surgit dans notre existence. Nous montons sur cette colline pour nous confier à la Vierge Marie que nous appelons Bonne Mère ». Une tradition qui remonte au Moyen Âge, lorsque les marins partaient en mer. Depuis, Notre-Dame-de-la-Garde est considérée comme la gardienne des marins et des pêcheurs.
Mais Notre-Dame de la Garde étend son manteau protecteur au-delà du seul peuple marseillais. Mgr Aveline n’a pas manqué de rappeler tous les saints qui eux aussi sont venir se recueillir auprès de la Bonne Mère : Charles de Foucauld, avant ses nombreux voyages en mer, Thérèse de Lisieux, avant d’aller rencontrer le Pape à Rome, ainsi que le jeune prêtre Karol Wojtyla en 1957…
« A votre tour, soyez le bienvenu, très Saint Père ! », a alors lancé Mgr Aveline, avant d’être interrompu par ce bon mot du Pape qui a sans doute voulu jouer sur les deux sens du mot « pécheur »/ « pêcheur » : « Ici viennent les pécheurs ! ». Une remarque pleine d’humilité, qui n’a pas manqué de faire sourire et même rire.
Récit – Le souverain pontife a insisté sur le fait qu’il ne venait «pas en France» mais dans la Cité phocéenne, où il arrive ce vendredi. — François est attendu ce vendredi à Marseille pour ce qui apparaît comme une «vraie-fausse» visite du pape en France. Cet aller-retour en Provence – mais «pas en France», a tellement insisté François – sera le plus atypique des quarante-quatre voyages de son pontificat. Pour aucune autre nation, le pape ne s’est livré à une telle contorsion afin de justifier le fait qu’il passe dans une métropole française sans venir «en France».
Il a pourtant visité cinquante-neuf pays… Le nôtre, où il se rend pour la seconde fois après sa visite express du Parlement européen à Strasbourg en novembre 2014, n’entre pas dans le compte de ses visites officielles d’État. Son voyage éclair en Alsace fut un aller-retour de moins de huit heures montre en main: Parti au petit matin, François était déjà à Rome en début d’après-midi après avoir déjeuné… dans l’avion.
La veille de son départ à Marseille, une source interne, de longue expérience et très informée des coulisses du Vatican, affirme que François «déteste la France», notamment en raison de son passé «de nation colonisatrice». La politique papale ne pouvant se fonder sur des humeurs et encore moins sur des rumeurs, Le Figaro avait posé directement la question à François dans l’avion du retour des Journées mondiales de la jeunesse de Lisbonne au Portugal, le 6 août dernier. Pour refuser ainsi de la visiter officiellement, le pape avait-il «quelque chose contre la France?» «Non!», avait aussitôt répondu François dans un grand sourire, avant d’expliquer sa «politique» de voyage: «Je visite les petits pays européens. Les grands pays, je le laisse pour après, à la fin.»
François, qui aura 87 ans en décembre, n’a jamais caché sa dévotion personnelle pour sainte Thérèse de l’Enfant Jésus. Qui sait s’il pense venir un jour à Lisieux? Le 15 août 2004, huit mois avant sa mort, Jean-Paul II s’était recueilli devant la grotte de Lourdes. Il s’agissait de son 104e et dernier voyage, le septième en France.
«La Méditerranée est un cimetière mais ce n’est pas le cimetière le plus grand»
François a justifié son déplacement dans la Cité phocéenne par sa participation à un colloque ecclésial sur la Méditerranée: «Le problème de la Méditerranée est un problème qui me préoccupe. C’est pour cela que je vais en France. Il est criminel d’exploiter des migrants. Pas en Europe parce que nous sommes plus civilisés mais dans les “Lager” (camps) d’Afrique du Nord» où sont retenus des migrants. Il a conclu: «Les évêques de la Méditerranée se réunissent avec des politiques pour réfléchir sérieusement sur ce drame des migrants. La Méditerranée est un cimetière mais ce n’est pas le cimetière le plus grand. Le cimetière le plus grand, c’est le nord de l’Afrique. Je vais à Marseille pour cela.»
François arrive à Marseille dans un contexte de crise sur l’île de Lampedusa, exposée à une arrivée massive de migrants. Par la voix de son ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, la France a annoncé mardi qu’elle n’accueillerait «aucun migrant de Lampedusa». Cette île italienne, située entre la Tunisie et la Sicile, tient au cœur du pape François. Elle fut la destination de son premier voyage papal en juillet 2013. Il y avait dénoncé la «mondialisation de l’indifférence» face à la mort de migrants en Méditerranée.
Ce même cri, il devrait le pousser spirituellement, ce vendredi en fin d’après-midi devant le Monument aux héros et victimes de la mer de Marseille, en compagnie de leaders d’autres religions et d’associations d’aide aux migrants.
Cet appel à la conscience, François devrait l’exprimer sur un mode politique et géopolitique, samedi matin lors des «Rencontres Méditerranéennes» dans le Palais du Pharo. Il s’exprimera devant une soixantaine d’évêques et soixante-dix «jeunes» issus des pays du pourtour méditerranéen. Au petit matin, il aura aussi rencontré des personnes dans la précarité, près de la gare Saint-Charles, une étape ajoutée à la dernière minute.
De fait, la première version du programme de cette visite dévoilée au printemps devait se limiter à la question migratoire. Initialement, ce voyage se déroulait sur le modèle de celui de Strasbourg: arrivé le samedi matin à Marseille, le souverain pontife prononçait son discours aux «Rencontres Méditerranéennes» avant de repartir en début d’après-midi à Rome.
Il a fallu toute la force de persuasion du cardinal Jean-Marc Aveline pour que François finisse par accepter de présider une messe au Stade-Vélodrome, samedi après-midi où près de 60.000 fidèles sont attendus. De même, il n’aurait pas rencontré les prêtres, religieux et religieuses de Marseille comme il doit le faire sitôt sa descente d’avion, vendredi à Notre-Dame-de-la-Garde. L’introduction de l’aspect religieux dans la seconde version du programme donne à cette «vraie-fausse» visite papale en France des similitudes avec le schéma habituel des déplacements pontificaux.
La visite polémique du couple Macron à la messe papale
Mais c’est un ultime caractère, politique celui-là, qui rapproche cette visite atypique d’une visite officielle, sans en être une pour autant. Cette dernière évolution du programme papale n’est pas venue du cardinal Aveline mais d’Emmanuel Macron.
S’il n’a pas obtenu tout ce qu’il désirait – il y aurait eu un projet de dîner en l’honneur de François le vendredi soir à Marseille, ce qui ne se fait pourtant jamais pour un pape – le président de la République a réussi à décrocher une petite heure de rencontre, en tête à tête, samedi en fin de matinée, avec photos, caméras et échange protocolaire de cadeaux comme s’il s’agissait d’une visite officielle. Un rendez-vous qui a tout chamboulé, contraignant le pape à arriver la veille à Marseille. Ce qu’il a accepté de bonne grâce même si le Vatican se méfie, par expérience et par principe, de la récupération possible, par les chefs d’État, de la présence d’un pape dans leur pays. François, en homme libre, déteste par-dessus tout être instrumentalisé, au Saint-Siège comme ailleurs. C’est l’une des raisons de son refus de visiter, pour l’heure, son Argentine natale.
En revanche, la surprise, vue de Rome, a été d’apprendre – sans jugement du Vatican car c’est une pratique courante lors des voyages – que le couple présidentiel assisterait à la messe papale. L’annonce, très tardive, a évidemment créé une polémique laïque en France. Elle a aussi posé une question pour la majorité des catholiques: beaucoup, comme François, sont opposés à une législation qui ouvrirait le droit de décider de sa propre mort. Cette «vraie-fausse» visite officielle du pape en France avive ainsi deux débats politiques cruciaux dans l’Hexagone: l’immigration et l’euthanasie.
La voix particulière de Jérusalem résonne aux Rencontres méditerranéennes. Quatre jeunes de Terre sainte y sont représentés sur 70, et pour la première fois le vicaire latin du Patriarcat de la ville trois fois sainte, Mgr Rafic Nahra, prend part aux travaux épiscopaux. L’évêque auxiliaire de Jérusalem constate par ces riches journées d’échanges que l’État hébreu cristallise de façon concentrée et accrue les problèmes émergeants de toutes les autres rives.
Delphine Allaire – Envoyée spéciale à Marseille, France
Vue de Terre sainte, que vous inspire la tenue des Rencontres méditerranéennes?
Les relations interreligieuses ne sont jamais simples. Au regard de nos difficultés, l’influence du politique sur l’interreligieux est un problème grave, car il bloque tout. J’aimerais que l’on discute de ces questions-là ensemble et je suis heureux qu’il y ait ici des jeunes.
Certainement ceux qui viennent à nos rencontres sont des jeunes de bonne volonté, mais de voir leur regard peut donner des idées quand l’on rentre chez soi. La question de la rencontre de l’autre est extrêmement concentrée en Israël; il y a la présence des migrants et des demandeurs d’asile, mais aussi la dimension œcuménique extrêmement forte. Toutes les Églises sont présentes, côte à côte, de petites communautés qui apprennent à vivre ensemble dans l’amitié. Vivre ensemble dans l’amitié, nous y arrivons, mais collaborer, il y a encore un effort à faire. Ces Rencontres méditerranéennes font office de petit laboratoire.
Dans le contexte méditerranéen actuel, quelle est la voix particulière de Jérusalem?
C’est la ville d’où sont nées toutes les grandes religions monothéistes. En même temps, Jérusalem est le lieu qui montre de la façon la plus claire l’incapacité des hommes à s’accepter les uns les autres dans la différence. Comment le religieux, tout en gardant chacun fidèle à sa foi, sans syncrétisme, rapprochent les humains et ne les séparent pas? Jérusalem met à l’épreuve toutes les religions. Comment puis-je, tout en étant fidèle à ma foi et en étant attaché au Dieu Saint, avec les exigences du Dieu Saint, ne pas contredire l’amour du prochain. Je ne suis pas étonné que Jérusalem soit toujours un lieu difficile, car le jour où on aura surmonté cette difficulté-là, c’est que le Messie viendra.
La liberté religieuse en est-elle abîmée?
En Israël, il y a une liberté religieuse. Mais est-ce que cela veut dire qu’il y a le respect des autres religions? C’est une autre chose. Nous chrétiens, qui sommes une minorité, nous avons la possibilité d’exercer notre foi. Il n’y a pas de prosélytisme, mais nous pouvons vivre notre foi chrétienne, célébrer. Nous avons nos processions. Il faut demander l’autorisation, mais cela est possible. Par contre, apprendre le respect de l’autre, lutter contre les fondamentalismes, c’est tout un chemin.
Comment le Vicariat de Jérusalem gère les flux migratoires? Quelle est votre action et qui sont les migrants qui arrivent en Israël?
Nos migrants sont les Philippins, les Indiens, les Sri-Lankais, des Éthiopiens, les Éthiopiens. Les Ethiopiens et Erythréens sont des demandeurs d’asile.
L’Église a une action au service des migrants et des fils de migrants aussi. Ceux qui naissent en Israël. Nous ne parlons pas beaucoup de ce problème-là, mais c’est un problème réel.
Les enfants de migrants sont des minorités, des enfants qui n’ont pas choisi de naître dans ce pays-là, qui se retrouvent à être chez nous des minorités religieuses, ethniques, des personnes pauvres qui n’arrivent pas, qui sont pour quelques-uns d’entre eux, sans identité, un peu apatrides. Comme Eglise, nous aidons d’un point de vue humanitaire et offrons à ces personnes la possibilité de prier.
Quant aux droits aux droits humains en Israël, il y a quand même des lois qui protègent les droits de l’homme, mais il y a certaines pratiques que l’Église trouve inhumaines.
Et là, l’Église a une parole à dire. L’État est souverain, il veut accueillir ou il ne veut pas accueillir, il est libre de le faire, mais en même temps, l’Église a une parole à porter sur la valeur humaine. La vie humaine est au-dessus de tout. Il faut protéger la vie humaine, même si cela est difficile, même si cela pose des problèmes. Nous n’avons pas de pouvoir politique là-dessus, mais une parole à dire et une présence à côté de ces personnes.
À Marseille, le rêve du Pape pour enraciner la paix en Méditerranée
Le successeur de Pierre se rend dans la cité phocéenne les 22 et 23 septembre pour réaffirmer la paix et la réconciliation dans cette région berceau de l’humanité en crise. Depuis dix ans et son premier voyage à Lampedusa, François regrette que la Mare nostrum se soit transformée en Mare mortuum.
Delphine Allaire – Envoyée spéciale à Marseille, France
Buenos Aires, Naples, Marseille. Les parallèles entre ces métropoles pleines de contrastes sociaux-économiques et cosmopolites sont nombreux. Dans la cité du Vésuve en juin 2019, le Pape avait posé les jalons d’une théologie de la Méditerranée, portée sur le dialogue et la culture de la rencontre. «Quand je pense à la Méditerranée, à Lesbos, à Chypre, à Malte, à Lampedusa, je pense que les terres que cette mer baigne sont précisément celles où Dieu s’est fait homme», assurait le Pape il y a un an, le 18 septembre 2022, au quotidien napolitain Il Mattino.
Après une première venue aux Rencontres méditerranéennes de Bari entre évêques et théologiens, le Pape François a soutenu l’initiative de Florence entre évêques et maires de la Méditerranée sans y être présent. À présent à Marseille, ville du port et du phare, petit laboratoire de la Méditerranée, le Souverain pontife pour que chacun regarde avec lui la Méditerranée.
Lui qui a déjà sillonné 17 pays de ce pourtour devrait lancer un nouvel appel vibrant pour les migrants morts en mer dans le linceul des flots, délivrer sa feuille de route pour la paix en Méditerranée. Quelle autre ville-message plus pertinente que Marseille, port et porte de l’Orient, mosaïque de nationalités, cité cosmopolite depuis sa fondation il y a 2 600 ans par des Grecs d’Asie mineure, pour accueillir tel événement. Le cardinal Jean-Marc Aveline, natif de Sidi Bel Abbès en Algérie, lui-même symbole de deux rives, a donc su le convaincre de ce détour marseillais, nourrissant ce rêve de faire de la Méditerranée une mer de fraternité et un grand couloir d’humanité.
Voici le programme officiel du voyage apostolique de Sa Sainteté François à Marseille pour la conclusion des « Rencontres Méditerranéennes« , qui aura lieu les 22 et 23 septembre 2023.
Vendredi 22 septembre 2023
ROME – MARSEILLE14h35Départ en avion de l’Aéroport International de Rome/Fiumicino pour Marseille
16h15Arrivée à l’Aéroport International de Marseille
16h15 ACCUEIL OFFICIEL PAR LE PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE
À Marseille, une mosaïque de la Méditerranée pour tisser l’identité et l’altérité
La semaine des Rencontres méditerranéennes s’est ouverte à Marseille par une procession aux flambeaux et une prière mariale sur la colline de la Garde samedi soir et une messe pour les 70 jeunes de la Méditerranée dimanche soir. Après Bari et Florence, la nouveauté de ce processus méditerranéen marseillais est le tandem formé par les jeunes et les évêques. Un document final sera remis au Pape François samedi 23 septembre au Palais du Pharo et publié par la suite.
Delphine Allaire – Envoyée spéciale à Marseille
Réfléchir à faire de cette mer fragmentée et blessée une «mosaïque d’espérance», un espace de paix, de réconciliation, et de charité. C’est l’impulsion que va donner Marseille au processus méditerranéen en cours dans l’Église, alors que les drames liés aux flux migratoires, de Briançon à Lampedusa, percutent l’actualité. Cette fois, pour manifester le visage méditerranéen de l’Église, des jeunes rejoindront les évêques de Palerme, Tunis, Alep, Athènes, Chypre, Odessa, Tanger ou Alger, entre autres.
Accueillis dans des familles marseillaises pour être au plus près de la rencontre et de la fraternité, les 70 étudiants et jeunes professionnels de 25 à 35 ans, dont dix Français, proviennent de 25 pays bordant la Méditerranée, comme la Bosnie-Herzégovine, l’Italie, l’Espagne, la Syrie, le Liban, l’Algérie, ou l’Ukraine, l’espace slave englobant la mer Noire et la mer d’Azov étant parfois oublié du vaste ensemble méditerranéen. Or, «une goutte qui arrive du Dniepr finira un jour à Gibraltar», rappelle souvent le cardinal Jean-Marc Aveline, hôte de ces 3e Rencontres. La première édition avait été inaugurée par le Pape à Bari (février 2020) et poursuivie à Florence (février 2022), où François était absent.
La feuille de route du Pape pour la Méditerranée
«Le Pape ne vient pas à Marseille pour qu’on le regarde lui, mais pour, qu’avec le Pape, l’on regarde la Méditerranée, ses défis, ses ressources, ses moyens», commente le cardinal Aveline, appelant, avant la messe d’ouverture de la session des jeunes dimanche soir, «à prendre la mesure de la complexité des contextes». Un enjeu de taille pour la France, qui a une responsabilité en Méditerranée, estime l’archevêque, soulignant le rôle non négligeable joué par l’Hexagone dans l’histoire en Méditerranée, «parfois pour le meilleur, d’autres fois pour le pire». Pour cela, il ne faudrait pas que la France s’en départît. Marseille et sa population bigarrée d’une centaine de nationalités, ville française dotée du plus grand nombre de consulats, a là un rôle à jouer «de ville-message».
«Par-delà les convictions religieuses différentes, le message de Marseille est que toute identité renferme toujours une part d’altérité. Marseille le sait plus que toute autre. Les identités qui ne veulent jamais voir l’altérité deviennent des identités meurtrières», ajoute le cardinal Aveline citant l’écrivain franco-libanais Amin Maalouf, auteur en 1998 de l’essai remarqué «Les Identités meurtrières».
Réfléchir et témoigner de son histoire
Répartis en une équipe francophone et neuf équipes anglophones, les 70 jeunes vont précisément expérimenter leur identité et leur altérité à travers ces trois jours de rencontres. Partageant leur histoire personnelle, celle de Marseille et de la Méditerranée, l’objectif est de se former sur trois sujets: faire mémoire de son histoire, le dialogue dans toutes les dimensions de la vie associative et les enjeux écologiques et migratoires «pour écouter le cri de détresse poussé par la terre».
À partir de jeudi 21 septembre, les 70 jeunes formeront des binômes de travail avec les évêques pour plancher sur un document final remis samedi matin au Souverain pontife, devant un parterre d’officiels au Pharo -le président de la République française, autorités ecclésiales, politiques, diplomatiques, économiques et civiles. Dans un état d’esprit «ouvert à la surprise», ces équipes mixtes de jeunes et d’évêques exploreront différentes questions, écologiques, économiques, relatives aux conflits, à la liberté religieuse et à la liberté de conscience.
Des visagessur des rives
Priscille Riondel, Marseillaise de 26 ans, qui souhaite poursuivre des études en Italie, espère beaucoup créer du lien et nouer des amitiés cette semaine. «Pouvoir mettre des visages sur d’autres rives de la Méditerranée et dialoguer avec ces jeunes que nous n’aurions jamais rencontrés dans un autre cadre. Je pourrais mieux découvrir ma foi et mon histoire grâce à cela. La densité du programme va nous souder très rapidement ensemble comme une famille», espère-t-elle, impatiente de réaliser des projets avec ces nouvelles connaissances.
La jeune femme, également référente France du Conseil des jeunes pour la Méditerranée fondé cet été par l’épiscopat italien, explique s’être laissée interpeller par la migration depuis sa rencontre cette année avec un migrant de 16 ans à Marseille. Cette expérience fondatrice l’ayant touché au cœur lui fait donc penser «que le Seigneur l’attend là».
La Méditerranée en communion
Une première illustration des altérités méditerranéennes s’est elle vécue lors de la procession aux flambeaux à Notre-Dame de la Garde à laquelle ont participé samedi soir des jeunes issus des quartiers nord de Marseille. Suivie d’une prière mariale, elle clôturait la neuvaine en communion avec neuf sanctuaires du pourtour; tout comme le lendemain, lors de la messe d’ouverture de la session jeunes dans l’église bondée des Chartreux, l’une des plus anciennes de la ville, construite sous Louis XIV. Chants mariaux et Notre-Père en arabe, prières universelles en italien, psaumes en hébreu et en anglais ont résonné devant l’apothéose de Sainte-Marie-Madeleine signée de la main du peintre baroque marseillais Michel Serre (1658 -1733). L’archevêque de Marseille en est convaincu: «La mémoire heureuse d’une convivialité possible peut guérir les mémoires blessées des conflits d’aujourd’hui».
Le cardinal Jean-Marc Aveline, archevêque de Marseille, lors de la messe d’ouverture de la session des jeunes, le 17 septembre 2023 à Marseille.
Le stade Vélodrome de Marseille où le Souverain pontife va célébrer une messe, le 23 septembre 2023.
Le Pape François à Marseille, programme officiel du voyage
Le Pape François se rendra à Marseille les 22 et 23 septembre pour conclure les Rencontres méditerranéennes. Le Saint-Père passera un peu moins de 30 heures dans la principale ville française sur la Méditerranée. Il célèbrera une messe pour la première fois en France. Ce sera aussi l’occasion de rencontrer le président français et de prendre la parole à quatre reprises.
C’est un programme dense qui attend le Pape François les 22 et 23 septembre prochains à Marseille, dans le sud de la France. Dévoilé ce samedi, en la mémoire des saintes Marthe et Marie et de saint Lazare, patrons du diocèse de Marseille, il prévoit toute une série de rencontres à commencer dès son arrivée à l’aéroport de Marignane. Le Souverain pontife y sera accueilli le vendredi 22 septembre à 16h15 par le président de la République française, Emmanuel Macron.
Prière à Notre-Dame de la Garde
Direction ensuite Notre-Dame de la Garde, sur les hauteurs de la cité phocéenne, pour une prière mariale avec le clergé diocésain, l’occasion pour le Saint-Père de faire ses salutations.
Moment fort de ces premières heures dans la capitale provençale, le moment de recueillement avec les chefs religieux près du mémorial dédié aux marins et aux migrants perdus en mer, à 18h00. Le Pape y prendra la parole.
La journée du samedi 23 septembresera riche en rendez-vous. Tout d’abord, à 8h45, François s’entretiendra en privé avec certaines personnes en précarité économique à l’archevêché, avant de participer au palais du Pharo à 10h00 à la session conclusive des Rencontres méditerranéennes organisées cette année à Marseille. Le Pape y prononcera un discours. À 11h30, il s’entretiendra avec le président français, toujours au palais du Pharo, surplombant le Vieux-Port.
Sainte messe au Vélodrome
Dans l’après-midi, à 16h15, le Pape présidera la messe au stade Vélodrome, haut-lieu de la vie marseillaise. Ce sera la grande rencontre entre le Saint-Père et les fidèles français, lors de la première messe célébrée sur le sol français par le Pape argentin depuis le début de son pontificat il y a dix ans. À l’issue de la célébration eucharistique, François se rendra à Marignane pour reprendre l’avion et décoller à 19h15, direction Rome-Fiumicino.
C’est la première fois que le Souverain pontife revient en France, après une journée à Strasbourg en novembre 2014 consacrée aux institutions européennes. Avec Marseille, ancienne Phocée, marquée par les figures de Marie-Madeleine, de saint Jean Cassien, des missionnaires du XIXe siècle, port ouvert sur le monde, cité cosmopolite, le Pape découvrira une cité qui porte en elle une certaine vision de paix, réfléchie et transmise à travers une «pastorale de la Méditerranée». L’Église marseillaise a d’ailleurs dédié un service diocésain à cette pastorale, dès 2021.
Marseille appelée par François à être un «port d’espérance»
Le Pape rejoindra vendredi des responsables, religieux ou civils, réunis dans le sud de la France pour promouvoir la paix en Méditerranée. S’exprimant à l’issue de l’Angélus, François espère que le défi migratoire sera relevé «ensemble», car il est «essentiel au futur de chacun».
À l’issue de la prière de l’Angélus, dimanche 17 septembre, le Pape a évoqué son prochain déplacement à Marseille, dans le sud de la France. Il participera aux conclusions des Rencontres méditerranéennes qui se sont ouvertes samedi soir par une prière mariale à Notre-Dame de la Garde, en présence de l’archevêque de la ville, le cardinal Jean-Marc Aveline.
Toute cette semaine, des responsables civils et ecclésiastiques se réunissent dans la cité phocéenne «pour promouvoir des parcours de paix, de collaboration et d’intégration» sur les rives du Mare Nostrum «avec une attention particulière accordée au phénomène migratoire» résume le Pape.
Il s’agit d’«un défi qui n’est pas facile à relever» comme en témoignent, note-t-il, les informations de ces derniers jours concernant les arrivées massives sur l’île sicilienne de Lampedusa, en Italie.
François évoque son voyage à Marseille
La dignité humaine à mettre au premier plan
Ce défi, «il convient de le relever ensemble», juge François, d’autant qu’il «essentiel au futur de chacun». Et pour le Pape, ce futur ne pourra être prospère «que s’il est construit sur la fraternité, en mettant au premier plan la dignité humaine, les personnes concrètes et, en particulier, les plus démunis». Depuis les fenêtres des appartements pontificaux, le Pape a demandé aux fidèles d’accompagner de leurs prières ces rencontres.
François a remercié enfin les autorités religieuses et civiles ainsi que tous ceux qui œuvrent à ces Rencontres méditerranéennes dans la ville de Marseille, «riche de peuples et appelée à être un port d’espérance». Il salue également les habitants de la cité phocéenne, dans l’attente de pouvoir les rencontrer en personne. Dès ce lundi, Marseille accueille les travaux de 70 jeunes, puis mercredi soir, 70 évêques des cinq rives. Il seront rejoints par le Pape vendredi et samedi prochain.
François sera le premier Pape à visiter Marseille en cinq siècles
Deux Papes ont marqué de leur empreinte l’histoire phocéenne, le Lozérien Urbain V et le Florentin Clément VII, tous deux liés à l’abbaye Saint-Victor de Marseille. Un troisième, Grégoire XI, dernier Pape français, est demeuré douze jours dans la ville avant d’embarquer pour Rome. Cinq siècles plus tard, François, premier Pape jésuite et des Amériques, revient à Marseille pour une visite apostolique historique.
Delphine Allaire – Cité du Vatican
La première venue d’un Pape dans la cité phocéenne remonte au bienheureux Urbain V (1310-1370) alors que la Provence, indépendante, n’est pas encore la France.
Le Pape Urbain V, un abbé marseillais
Guillaume Grimoard à l’état civil, originaire de Lozère, est abbé de la prestigieuse abbaye Saint-Victor à une époque médiévale florissante pour Marseille, alors en pointe du monachisme provençal. L’abbé marseillais est élu Pape le 28 septembre 1362, alors qu’il se trouve en mission diplomatique à Naples. En ce XIVe siècle, le royaume parthénopéen entretient des liens étroits avec le comté de Provence. Le futur Pape prend immédiatement la mer, arrive à Marseille un mois plus tard, et rejoint Avignon où il est couronné, le 6 novembre 1362.
Il devient le 200e successeur de Pierre et le 6e depuis que la capitale de la chrétienté s’est déplacée à Avignon. Mais Urbain V est celui qui souhaite ramener la papauté des bords du Rhône aux bords du Tibre. Une réussite de courte durée. À la suite des guerres entre la France et l’Angleterre troublant Rome, Urbain V est contraint de revenir en Provence, où il s’éteint à Avignon en 1370. Sa dépouille est transférée à l’abbaye Saint-Victor de Marseille, mais le tombeau disparait avant la Révolution française. Une réplique du gisant d’Urbain V est aujourd’hui conservée et vénérée à Saint-Victor.
Son successeur au Siège apostolique, Grégoire XI (Pape de 1370 à 1378), séjourne lui douze jours dans le port phocéen avant d’embarquer pour Rome où il réussit à maintenir la présence des Papes.
La France de la Renaissance, Florence et Marseille
Enfin,le FlorentinJules de Médicis, également abbé de Saint-Victor à Marseille de 1517 à 1523, devient le Pape Clément VII en 1523. La dixième année de son pontificat, soignant ses relations avec la monarchie française, il débarque à Marseille par la mer pour célébrer le mariage du futur roi Henri II avec Catherine de Médicis, sa nièce. Une union politique que le Pape médicéen avait lui-même négociée. Nous sommes le 28 octobre 1533. C’est la dernière année qui témoigne de la présence d’un Souverain pontife à Marseille.
L’attrait marseillais de Karol Wojtyla
La période récente atteste toutefois du passage à Marseille de nombreux prêtres et évêques qui deviendront Papes par la suite. Cela concerne les futurs Pie IX en 1823, Léon XIII en 1843, Benoît XV en 1913, Pie XI en 1893, Jean XXIII en 1905 et Mgr Montini, futur Paul VI en 1934; mais aussi Jean-Paul II en 1947, alors jeune prêtre, il est inspiré par la Mission ouvrière fondé par le père dominicain Jacques Loew, vicaire dans les quartiers nord de Marseille.
Karol Wojtyla célèbre une messe à Notre-Dame de la Garde, signant un registre le 8 juillet 1947. L’histoire étant faite de petits signes, c’est d’ailleurs le Pape «marseillais» Urbain V qui avait fondé quatre siècles plus tôt l’université Jagellonne de Cracovie où le jeune prêtre polonais fait ses humanités quelques années avant son séjour marseillais.
Une fois Pape, Jean-Paul II se rend ensuite sept fois en France, mais sans passer par Marseille. Benoît XVI réalise lui un voyage apostolique de quatre jours en France, il y a 15 ans, en septembre 2008, se concentrant sur Paris et Lourdes.
Le Pape François, Strasbourg et Marseille
Quant au Pape François, il effectue à Marseille son deuxième déplacement dans une ville française, sans n’avoir jamais fait de visite d’État. Le 25 novembre 2014, le Pape argentin passe 4 heures à Strasbourg, réservées au Parlement européen et au Conseil de l’Europe. Et déjà, à bord de l’avion pontifical le ramenant à Rome, interrogé sur sa non-venue dans le pays, le Pape avance cela: «J’ai demandé une ville [en France] où aucun Pape n’ait jamais été, pour saluer ses habitants».
Le 6 août dernier, lors de la conférence de presse de retour des JMJ de Lisbonne, l’évêque de Rome affirme privilégier les petits pays plutôt que «les grands» comme la France, l’Espagne, l’Angleterre, qu’il «laisse pour plus tard». «C’est une politique», soutient-il, assurant qu’il n’a «rien contre» eux.