Le Vatican prépare un document spécifique sur les divorcés remariés
Le 22 avril dernier, le pape a reçu au Vatican, en audience privée, les participants à l’Assemblée plénière du Dicastère des laïcs, de la famille et de la vie présidée par le cardinal Kevin Farrell.
Avant que le pape ne prenne la parole, le cardinal Farrell lui a adressé une salutation au nom des personnes présentes. C’est grâce à cette salutation que l’on a pu apprendre que le Vatican, par l’intermédiaire du Dicastère présidé par le cardinal américain, prépare un document sur les divorcés remariés civilement.
« Saint-Père » – a commencé ainsi le cardinal Farrell – « au nom de tout le Dicastère pour les laïcs, la famille et la vie, réuni ces jours-ci lors de sa deuxième Assemblée plénière, je souhaite exprimer notre plus profonde gratitude pour le privilège de cette audience que vous nous accordez, ainsi que nos meilleurs vœux à l’occasion du 50eanniversaire de votre profession religieuse. Les membres et les consulteurs ici présents sont les porte-parole, au sein de l’Église universelle, des expériences, des préoccupations et des espoirs des fidèles laïcs, des jeunes et des familles de tous les continents ».
« Les laïcs et le ministère dans l’Église synodale » : tel était le thème de notre Assemblée, a poursuivi Mgr Farrell. « Nous avons essayé de comprendre – selon la méthode du discernement spirituel – comment promouvoir au mieux la disponibilité pour le service, qui découle des multiples dons et charismes que le Saint-Esprit suscite dans le peuple de Dieu et qui donnent naissance aux divers ministères, au profit des femmes et des hommes de notre temps. »
Il a ajouté : « Nous avons été en particulier confrontés aux défis posés par les crises conjugales de toutes sortes, qui entraînent un court-circuit dans la transmission de la foi : aujourd’hui, le besoin d’un ministère spécifique est plus urgent que jamais, pour une proximité et un témoignage authentiques de la part des couples mariés au service des familles, pour une attention pastorale à ceux qui traversent des crises et des problèmes de toutes sortes. »
Et, faisant allusion au thème central de cette rencontre, le préfet du Dicastère pour les laïcs, la famille et la vie a précisé : « Nous sommes encore dans une phase embryonnaire, mais nous voyons déjà les fruits qui peuvent naître de cette réflexion, qui est au cœur du cheminement synodal qui implique l’Église sur tous les continents. À cet égard, le Dicastère travaille également à la préparation d’un texte qui fera spécifiquement référence – comme vous le souhaitiez, Votre Sainteté – aux hommes et aux femmes qui, ayant connu une rupture conjugale, vivent de nouvelles unions. »
Mgr Farrell a conclu son discours en disant que « le ministère des fidèles laïcs, sous ses nombreuses formes, peut réellement enrichir et apporter une énergie nouvelle à la pastorale ordinaire de l’Église et à sa mission dans le monde entier ».
À la suggestion d’un type de ministère pour accompagner les divorcés-remariés, le pape a répondu que les ministères institués n’épuisent pas la ministérialité de l’Église. Il a ajouté : « Les pasteurs peuvent confier aux laïcs certaines fonctions de substitution, c’est-à-dire des services temporels, comme c’est le cas, par exemple, pour la proclamation de la Parole ou la distribution de l’Eucharistie. » Plus loin, citant le n° 23 d’un document pontifical antérieur, il a rappelé que « dans Christi fideles laici, il est affirmé qu’il y a des ministères qui ont leur fondement sacramentel dans le mariage et pas seulement dans le baptême et la confirmation. »
Le Vatican prépare un texte pour les couples divorcés et remariés, selon le cardinal Farrell
Le cardinal Kevin Farrell a mentionné le document en cours d’élaboration dans un discours prononcé en italien le 22 avril.
25 avril 2023
Le Dicastère du Vatican pour les laïcs, la famille et la vie prépare un document qui traitera des couples divorcés-remariés, à la demande du pape François, selon le préfet du dicastère, le cardinal Kevin Farrell.
Le cardinal Farrell a mentionné le document en cours d’élaboration dans un discours prononcé en italien le 22 avril, en ouverture d’une réunion du dicastère, qui promeut la pastorale familiale et la mission des fidèles laïcs. Le cardinal Farrell a souligné l’importance d’aider et de guider « ceux qui traversent des crises conjugales de toutes sortes ».
« À cet égard, le dicastère travaille également à la préparation d’un texte qui concernera spécifiquement – comme vous l’avez souhaité, Votre Sainteté – les hommes et les femmes qui, après l’échec de leur mariage, vivent de nouvelles unions », a déclaré le cardinal Farrell dans son discours d’ouverture.
Le cardinal Farrell n’a pas précisé quand le document serait publié.
L’Église enseigne que les catholiques divorcés et remariés sans annulation ne doivent pas communier, un enseignement réaffirmé par saint Jean-Paul II dans l’exhortation apostolique Familiaris Consortio de 2005. Le pape François a déclaré au cours de son pontificat qu’il pourrait y avoir des situations au cas par cas où les catholiques divorcés et remariés pourraient accéder à l’Eucharistie, notamment lorsque les époux pratiquent la continence au sein de leur mariage.
Lors d’une récente interview, le pape François a répondu à une question sur la possibilité pour les catholiques divorcés-remariés de recevoir l’Eucharistie en disant : « Nous ne pouvons pas réduire une situation humaine à une simple question d’ordre moral : « Nous ne pouvons pas réduire une situation humaine à une situation normative ». Dans l’interview, le pape François a conseillé de se référer à ce que son prédécesseur Benoît XVI a dit sur le sujet des annulations, affirmant qu' »une grande partie des mariages de l’Église sont invalides par manque de foi ».
« Et pensez-y : Parfois, on assiste à un mariage et on a l’impression qu’il s’agit d’une réception sociale et non d’un sacrement », a déclaré le pape François. Quand les jeunes disent « pour toujours », qui sait ce qu’ils entendent par « pour toujours » ?
La volonté de puissance, c’est « le début de la fin d’une association » (traduction complète)
« Le gouvernement dans les associations de laïcs, un service »
Le désir de pouvoir, la volonté de puissance, c’est « le début de la fin d’une association, d’une congrégation », fait observer le pape François.
Le pape François s’est adressé aux participants de la rencontre des associations de fidèles, des mouvements ecclésiaux et des nouvelles communautés, organisé par le Dicastère pour les laïcs, la famille et la vie sur le thème : « La responsabilité de gouvernement dans les associations de laïcs : un service ecclésial ».
Le pape a rejoints les 80 participants dans la Salle du Synode, jeudi matin 16 septembre 2021.
Pour le pape, la volonté de puissance fait « changer la nature du service de gouvernement » et elle se manifeste par « la manie d’être partout » , annihilant toute subsidiarité.
Pour le pape, « les cas d’abus de différentes natures » ont toujours « leur racine dans l’abus de pouvoir »: « Voilà l’origine: l’abus de pouvoir ».
Au contraire le pape a recommandé de « gouverner et servir ».
Voici notre traduction rapide, de travail, de l’allocution – en italien – du pape François qui a commenté le Décret sur Les Associations internationales de fidèles, promulgué le 11 juin 2021.
AB
Allocution du pape François
Chers frères et sœurs, bonjour et bienvenus !
Je salue cordialement Son Eminence le cardinal Kevin Farrell et je le remercie pour les paroles qu’il m’a adressées. Et merci à vous tous, d’être présents malgré les désagréments dus à la pandémie – et parfois à « l’absence de bonne humeur » que ce décret a peut-être semé dans le cœur de quelques-uns ! Mais avançons ensemble. Je salue et je remercie également ceux qui participent par liaison vidéo, dont une bonne partie n’ont pas pu voyager à cause des limites encore imposées dans de nombreux pays. Je ne sais pas comment le secrétaire est réussi à rentrer du Brésil ! Il faudra que tu me l’expliques.
1 – J’ai désiré être ici, aujourd’hui, avant tout pour vous dire merci ! Merci pour votre présence en tant que laïcs, hommes et femmes, jeunes et personnes âgées, engagés pour vivre et témoigner de l’Evangile dans les réalités ordinaires de la vie, dans votre travail, dans tant de contextes différents – éducation, engagement social, etc. dans la rue, dans les gares ferroviaires, vous y êtes tous – c’est le vaste champ de votre apostolat, c’est votre évangélisation.
Nous devons comprendre que l’évangélisation est un mandat qui vient du baptême ; le baptême qui fait de nous ensemble des prêtres, dans le sacerdoce du Christ : le peuple sacerdotal. Et nous ne devons pas attendre qu’arrive le prêtre, le prêtre pour évangéliser, le missionnaire… Si, ils font cela très bien, mais ceux qui ont reçu le baptême ont la tâche d’évangéliser. Vous avez éveillé cela par vos mouvements et c’est très bon. Merci !
Ces derniers mois, vous avez vu de vos yeux et touché de vos mains les souffrances et les angoisses de tant d’hommes et de femmes, à cause de la pandémie, surtout dans les pays plus pauvres, où beaucoup d’entre vous sont présents. L’un de vous m’en a parlé. Tant de pauvreté, de misère… Je pense à nous, au Vatican, qui nous plaignons quand le repas n’est pas bien cuit, alors qu’il y a des personnes qui n’ont pas à manger. Je vous suis reconnaissant parce que vous ne vous êtes pas arrêtés : vous n’avez pas cessé d’apporter votre solidarité, votre aide, le témoignage évangélique, même pendant les mois les plus durs, quand le nombre des contagions était très élevé. En dépit des restrictions dues aux nécessaires mesures préventives, vous n’avez pas baissé les bras, au contraire, je sais que beaucoup parmi vous ont multiplié leurs efforts en s’adaptant aux situations concrètes que vous aviez, et que vous avez devant vous, avec cette créativité qui vient de l’amour, parce que celui qui se sait aimé par le Seigneur aime sans mesure.
Ce « sans mesure » est ce qui se produit dans ces moments critiques. Et ce « sans mesure », nous l’avons vu également chez beaucoup de religieuses, beaucoup de consacrées, beaucoup de prêtres et beaucoup d’évêques. Je pense à un évêque qui, pour avoir toujours été avec les gens, a fini par être entubé. Maintenant, il se remet lentement. C’est vous, et tout le peuple de Dieu, qui se sont engagés pour cela, et vous avez été là. Personne d’entre vous n’a dit : « Non, je ne peux pas y aller, parce que mon fondateur pense autrement. » Alors, pas de fondateur : là, c’était l’Evangile qui appelait et tout le monde y est allé. Merci beaucoup ! Vous avez été des témoins de « cette appartenance commune (bénie) à laquelle nous ne pouvons pas nous soustraire : l’appartenance en tant que frères » (Méditation en temps de pandémie, 27 mars 2020). Ou nous sommes frères, ou nous sommes ennemis ! « Non, non. Je prends mes distances : ou frères, ou ennemis. ». Il n’y a pas de moyen terme.
2 – En tant que membres d’associations de fidèles, de mouvements ecclésiaux internationaux et d’autres communautés, vous avez une véritable mission ecclésiale. Vous cherchez avec dévouement à vivre et à faire fructifier les charismes que l’Esprit Saint, grâce à vos fondateurs, a confiés à tous les membres de vos réalités associatives, au profit de l’Eglise et de tous les hommes et les femmes auxquels vous consacrez votre apostolat. Je pense en particulier à ceux qui, se trouvant dans les périphéries existentielles de nos sociétés, font dans leur chair l’expérience de l’abandon et de la solitude, et souffrent de nombreux besoins matériels et de pauvretés morales et spirituelles. Cela nous fera du bien à tous de nous souvenir tous les jours non seulement des pauvretés des autres, mais également, et avant tout, des nôtres.
Il me vient souvent à l’esprit quelque chose de Mère Teresa. Oui, elle était religieuse, mais cela nous arrive à tous si nous sommes dans la rue. Quand tu vas prier et que tu ne sens rien. J’appelle cela l’« athéisme spirituel », quand tout est obscur, tout semble dire : « J’ai échoué, ce n’est pas la bonne voie, c’est une belle illusion ». La tentation de l’athéisme, lorsque cela vient dans la prière. La pauvre Mère Teresa a beaucoup souffert parce que c’est la vengeance du diable parce que nous allons là-bas, aux périphéries, là où est Jésus, précisément là où Jésus est né. Nous préférons un Evangile sophistiqué, un Evangile distillé, mais ce n’est pas l’Evangile, l’Evangile, c’est cela. Merci. Cela nous fera du bien de penser à ces pauvretés.
Vous êtes aussi, même avec les limites et les péchés de tous les jours – grâce à Dieu, nous sommes pécheurs et Dieu nous donne la grâce de reconnaître nos péchés et également la grâce de demander ou d’aller voir le confesseur : c’est une grande grâce, ne la perdez pas ! – même avec ces limites, vous êtes un signe clair de la vitalité de l’Eglise : vous représentez une force missionnaire et une présence de prophétie qui nous fait espérer bien pour l’avenir. Vous aussi, avec les pasteurs et tous les autres fidèles laïcs, vous avez la responsabilité de construire l’avenir du saint peuple fidèle de Dieu. Mais souvenez-vous toujours que construire l’avenir ne signifie pas sortir de l’aujourd’hui que nous vivons ! Au contraire, l’avenir doit se préparer ici et maintenant, « en cuisine », en apprenant à écouter et à discerner le temps présent avec honnêteté et courage et dans une disponibilité à une rencontre constante avec le Seigneur, à une conversion personnelle constante. Sinon, on court le risque de vivre dans un « monde parallèle », distillé, loin des défis réels de la société, de la culture et de toutes ces personnes qui vivent à côté de vous et qui attendent votre témoignage chrétien. En effet, appartenir à une association, à un mouvement ou une communauté, surtout s’ils se réfèrent à un charisme, ne doit pas nous tenir repliés dans un « tonneau en fer », nous faire nous sentir en sécurité, comme si les défis et les changements n’avaient pas besoin de réponses. Nous tous, chrétiens, nous sommes toujours en chemin, toujours en conversion, toujours en discernement.
Très souvent, nous trouvons les fameux « agents pastoraux », qu’il s’agisse d’évêques, de prêtres, de religieuses, de laïcs engagés. Je n’aime pas cette expression : le laïc est engagé ou il n’est pas engagé. Les laïcs actifs dans quelque chose. Mais il y en a certains qui confondent ce chemin avec une sortie touristique ou qui s’imaginent que cela consiste à toujours tourner en rond sur soi-même, sans pouvoir aller de l’avant. Le chemin évangélique n’est pas une sortie touristique. C’est un défi : chaque pas est un défi et chaque pas est un appel de Dieu, chaque pas est – comme nous le disons dans mon pays – « mettre la viande sur le grill ». Toujours aller de l’avant. Nous sommes toujours en chemin, toujours en conversion, toujours en discernement pour faire la volonté de Dieu.
Penser être « la nouveauté » dans l’Eglise – est une tentation qui touche souvent les nouvelles congrégations ou les nouveaux mouvements – et donc, qu’on n’a pas besoin de changements, cela peut devenir une fausse sécurité. Les nouveautés aussi vieillissent rapidement ! C’est pourquoi même le charisme auquel nous appartenons, nous devons toujours l’approfondir davantage, toujours réfléchir ensemble pour l’incarner dans les nouvelles situations que nous vivons. Cela exige de nous une grande docilité, une grande humilité, pour reconnaître nos limites et accepter de changer nos façons de faire et de penser qui sont dépassés, ou des méthodes d’apostolat qui ne sont plus efficaces, ou des formes d’organisation de la vie interne qui se sont révélées inadéquates ou carrément nocives. Par exemple, c’est un des services que nous rendent toujours les chapitres généraux. Quand [les façons et les méthodes] ne sont pas bons, tu dois les revoir en assemblée.
Mais maintenant, atterrissons au ‘donc’, ce que vous attendiez.
3 – Le Décret sur Les Associations internationales de fidèles, promulgué le 11 juin de cette année, est un pas dans cette direction. Mais ce Décret nous met-il en prison ? Nous ferme-t-il la liberté? Non, ce Décret nous pousse à accepter quelque changement et à préparer l’avenir à partir du présent. A l’origine de ce Décret, il n’y a pas de théorie sur l’Eglise ou sur les associations de laïcs que l’on veuille appliquer ou imposer. Non, il n’y en a pas. C’est la réalité elle-même des dernières décennies qui nous a montré la nécessité des changements que le Décret nous demande.
Et je vous dis une chose sur cette expérience de ces dernières décennies de l’après-concile. Dans la Congrégation pour les religieux, ils sont en train d’étudier les congrégations religieuses, les associations qui sont nées pendant cette période. C’est curieux, c’est très curieux. Beaucoup, beaucoup, avec une grande nouveauté, ont fini avec de très dures difficultés: elles ont fini avec une visite apostolique, elles ont fini avec des péchés immondes, avec des commissaires… Et ils sont en train de faire une étude. Je ne sais pas si l’on peut publier cela, mais vous connaissez mieux que moi par les cancans cléricaux quelles sont ces situations. Elles sont si nombreuses, et pas seulement les grandes que nous connaissons, et qui sont scandaleuses – les choses qu’ils ont faites parce qu’ils se sentaient une Eglise à part, ils semblaient être des Rédempteurs! – mais aussi les petites. Par exemple, dans mon pays, trois d’entre elles ont déjà été dissoutes, et toutes pour avoir fini dans des choses les plus sales. Elles étaient le salut, n’est-ce pas? A ce qu’il semblait… Toujours avec le fil [rouge] de la rigidité disciplinaire. C’est important cela. Et cela m’a conduit… Ces réalités des dernières décennies nous a montré une série de changements, pour aider, des changements que le Décret nous demande.
Aujourd’hui, par conséquent, justement en partant de ce Décret, vous vous arrêtez sur un thème important non seulement pour chacun de vous, mais pour toute l’Eglise: « La responsabilité de gouvernement des associations de laïcs. Un service ecclésial. » Gouverner et servir. L’exercice du gouvernement à l’intérieur des associations et des mouvements est un thème qui me tient particulièrement à coeur, surtout si l’on considère – ce que je viens de dire – les cas d’abus de différentes natures qui ont eu lieu aussi dans ces réalités et qui ont leur racine toujours dans l’abus de pouvoir. Voilà l’origine: l’abus de pouvoir. Souvent, le Saint-Siège a dû intervenir au cours de ces années, en lançant des processus de récupération pas faciles. Et je pense non seulement à ces situations si laides qui font du bruit, mais aussi aux maladies qui viennent de l’affaiblissement du charisme fondateur, qui devient tiède et perd sa capacité d’attraction.
4 – Les charges de gouvernement qui vous sont confiées dans les associations de laïcs auxquelles vous appartenez ne sont pas autre chose qu’un appel à servir. Mais que signifie « servir » pour un chrétien? Dans certaines occasions j’ai pu indiquer deux obstacles qu’un chrétien peut rencontrer sur son chemin et qui l’empêchent de devenir un vrai serviteur de Dieu et des autres (cf. Méditation du matin à Sainte-Marthe, 8 novembre 2016).
5 – Le premier c’est la « volonté de puissance »: quand cette volonté de puissance te fait changer la nature du service de gouvernement. Combien de fois avons-nous fait sentir aux autres cette « volonté de puissance »? Jésus nous a enseigné que celui qui commande doit devenir comme celui qui sert (cf. Lc 22,24-26) et que « si quelqu’un veut être le premier, qu’il soit le serviteur de tous » (Mc 9,35). C’est-à-dire que Jésus renverse les valeurs de la mondanité, du monde.
Notre volonté de puissance s’exprime de tant de façons dans la vie de l’Eglise; par exemple, quand nous estimons, en raison du rôle que nous avons, devoir prendre des décisions sur tous les aspects de la vie de notre association, du diocèse, de la paroisse, de la congrégation.
On délègue à d’autres des tâches et des responsabilités, pour des milieux déterminés, mais seulement en théorie! Dans la pratique, la délégation à d’autres est vidée par la manie d’être partout. Et cette volonté de puissance annule toute forme de subsidiarité. Cette attitude n’est pas belle et elle finit par vider de sa force le corps ecclésial. C’est une mauvaise façon de « discipliner ». Et nous l’avons vu. Beaucoup de supérieurs, de supérieurs généraux – et je pense aux congrégations que je connais le plus – s’éternisent au pouvoir et font mille et mille choses pour être réélus et réélus, même en changeant les Constitutions. Et derrière, il y a une volonté de puissance. Cela n’aide pas; c’est le début de la fin d’une association, d’une congrégation.
Quelqu’un pensera peut-être que cette « volonté » ne le concerne pas, que cela n’arrive pas dans son association. Ayons présent [à l’esprit] que le Décret Les associations internationales de fidèles ne s’adresse pas seulement à certaines réalités ici présentes, mais qu’il vaut pour toutes, sans exception. Pour toutes. Il n’y en a pas de meilleures ou de moins bien, de parfaites ou pas: toutes les réalités ecclésiales sont appelées à la conversion, à comprendre et mettre en oeuvre l’esprit qui anime les dispositions que nous donnent le Décret. Deux images me viennent à ce propos. Deux images historiques. Cette religieuse qui était à l’entrée du Capitole et qui disait: « Si vous votez pour moi, je ferai cela… ». Ils achètent le pouvoir. Et puis, un cas qui me semble étrange, comme « l’esprit du fondateur est descendu sur moi ». On dirait une prophétie d’Isaïe! « Il me l’a donné à moi! Je dois avancer seule ou seul parce que le fondateur m’a donné son manteau, comme Elie à Elysée. Et vous, oui, faites les élections, mais c’est moi qui commande. » Et cela arrive! Je ne parle pas d’imaginations. Cela arrive aujourd’hui dans l’Eglise.
L’expérience de proximité à vos réalités a enseigné qu’il est bénéfique et nécessaire de prévoir une approche dans les charges de gouvernement et une représentation de tous les membres à vos élections. Même dans le contexte de la vie consacrée, il y a des instituts religieux qui, en maintenant toujours les mêmes personnes dans les charges de gouvernement, n’ont pas préparé l’avenir; ils ont permis que des abus s’insinuent, et ils traversent encore de grandes difficultés. Je pense – vous ne le connaissez pas – à un institut dont la responsable s’appelait Amabilia. L’institut a fini par s’appeler « odiobilia », parce que ses membres se sont rendu compte que cette femme était un « Hitler » en habit religieux.
6 – Il y a ensuite un autre obstacle au vrai service chrétien, et cela est très subtil: la déloyauté. Nous le rencontrons quand quelqu’un veut servir le Seigneur mais sert aussi d’autres choses qui ne sont pas le Seigneur (et derrière d’autres choses, il y a toujours l’argent). C’est un peu comme jouer double jeu! En paroles, on dit vouloir servir Dieu et les autres, mais dans les faits, nous servons notre ego, et nous nous plions à notre désir d’apparaître, d’être reconnus, appréciés… N’oublions pas que le vrai service est gratuit et sans condition, ne connaît ni calculs ni prétentions. En outre, habituellement le vrai service oublie les choses qu’il a faites pour servir les autres. Il arrive, vous en avez tous l’expérience, quand on vous remercie [que vous disiez]: « Pour quoi? » – « Pour ce que vous avez fait… » – « Mais qu’est-ce que j’ai fait? » … Et puis cela revient en mémoire. C’est un service, point.
Et nous tombons dans le piège de la déloyauté quand nous nous présentons aux autres comme les seuls interprètes du charisme, les seuls héritiers de notre association ou de notre mouvement – ce cas que j’ai mentionné auparavant – ; ou même quand, en nous croyant indispensables, nous faisons tout pour exercer des charges à vie; ou encore, lorsque nous prétendons décider a priori qui doit être notre successeur. Cela arrive-t-il? Oui, cela arrive. Et plus souvent que nous ne le croyons. Personne n’est le propriétaire des dons reçus pour le bien de l’Eglise – nous en sommes des administrateurs – personne ne doit les étouffer, mais les laisser grandir, avec moi et avec celui qui vient après moi. Chacun, là où il est placé par le Seigneur, est appelé à le faire grandir, à le faire fructifier, confiant dans le fait que c’est Dieu qui oeuvre tout en tous (cf. 1 Co 12,6) et que notre vrai bien fructifie dans la communion ecclésiale.
7 – Chers amis, par conséquent, en accomplissant la tâche de gouvernement qui nous a été confiée, apprenons à être d’authentiques serviteurs du Seigneur et des frères, apprenons à dire « nous sommes des serviteurs inutiles » (Lc 17,10). Tenons présent à l’esprit cette expression d’humilité, de docilité à la volonté de Dieu qui fait tellement de bien à l’Eglise et rappelle l’attitude juste pour agir en elle: le service humble dont Jésus nous a donné l’exemple, en lavant les pieds de ses disciples (cf. Jn 13,3-17; angélus, 6 octobre 2019).
Dans le document du dicastère, on fait référence aux fondateurs. Cela me semble très sage. Un fondateur ne doit pas être changé, il continue, il avance. En simplifiant un peu je dirais qu’il faut faire la distinction, parmi les mouvements ecclésiaux (et aussi dans les congrégations religieuses), entre ceux qui sont en processus de formation et ceux qui ont déjà acquis une stabilité organique et juridique. Ce sont deux réalités différentes. Les premiers, les instituts, ont aussi le fondateur ou la fondatrice vivant.
Bien que tous les instituts – religieux ou mouvements laïcs – aient le devoir de vérifier, dans les assemblées ou dans les chapitres, l’état du charisme fondateur, et de faire les changements nécessaires dans leurs propres statuts (qui seront ensuite approuvés par leur dicastères respectifs); en revanche les instituts en formation – et je dis en formation au sens le plus large: les instituts qui ont leur fondateur vivant, et c’est pourquoi le Décret parle de fondateur à vie – qui sont en phase de fondation, cette vérification du charisme est plus continue, pour ainsi dire. C’est pourquoi le document parle d’une certaine stabilité des supérieurs durant cette phase. Il est important de faire cette distinction pour pouvoir se mouvoir avec plus de liberté dans le discernement.
Nous sommes les membres vivants de l’Eglise et c’est pourquoi nous avons besoin d’avoir confiance dans l’Esprit Saint, qui agit dans la vie de toute association, de tout membre, agit en chacun de nous. D’où la confiance dans le discernement des charismes confié à l’autorité de l’Eglise. Soyez conscients de la force apostolique et du don prophétique qui vous sont remis aujourd’hui de façon renouvelée.
Merci de votre écoute. Et une chose: quand l’ai lu le brouillon du Décret, que j’ai ensuite signé – le premier brouillon -, j’ai pensé: « Mais c’est trop rigide! Cela manque de vie, cela manque… » Mais chers [amis], le langage du droit canonique est ainsi! Et ceci c’est du droit, c’est une question de langage. Mais nous devons, comme j’ai essayé de le faire, voir ce que signifie ce langage, le droit. C’est pour cela que j’ai voulu bien l’expliquer. Et aussi expliquer les tentations qu’il y a derrière, que nous avons vues et qui font tant de mal aux mouvements et aussi aux instituts religieux et de laïcs.
Merci de votre écoute, et merci au Dicastère pour les laïcs, la famille et la vie, d’avoir organisé cette rencontre. Je vous souhaite à tous un bon travail et un bon chemin, et une bonne réunion. Dites tout ce qu’il vous vient au coeur de dire. Posez les questions que vous voulez poser, clarifiez les situations. C’est une rencontre pour le faire, pour faire Eglise, pour nous.
Et n’oubliez pas de prier pour moi, parce que j’en ai besoin. Ce n’est pas facile de faire le pape, mais Dieu aide. Dieu aide toujours.
Le cardinal Kevin Farrell, préfet du Dicastère pour les Laïcs, la Famille et la Vie.
L’Année de la Famille, une occasion pour encourager la créativité pastorale
Cette nouvelle année thématique qui commence ce 19 mars vise à mieux faire connaître l’exhortation apostolique « Amoris Laetitia » publiée par le Pape François en 2016.
L’Année de la famille-Amoris Laetitia, qui démarre ce vendredi 19 mars, et qui se prolongera jusqu’à la Rencontre mondiale des Familles prévue à Rome en juin 2022, vise à maintenir vivante la dynamique du document avec lequel le Pape François avait tiré les conclusions des deux Synodes de 2014 et 2015, afin de relancer la pastorale du mariage et de la famille.
«Les cinq années écoulées depuis la publication d’Amoris Laetitia peuvent être un stimulant pour toute l’Église à reprendre cet important document, résultat d’un long parcours synodal.»Le cardinal américain Kevin Farrell, préfet du Dicastère pour les Laïcs, la Famille et la Vie, l’a déclaré ce jeudi lors d’une conférence de presse retransmise depuis la Salle de Presse du Saint-Siège. Il a expliqué que «l’Année de la famille – Amoris Laetitia sera une bonne occasion pour faire mûrir encore davantage les fruits de ce parcours, non seulement dans les différents secteurs de l’Église, mais aussi dans les familles elles-mêmes.»
Un texte à relire et à redécouvrir
Contrairement à certains documents théologiques plus arides et difficiles à comprendre pour le grand public, Amoris Laetitia est un texte dépourvu de toute aigreur, agréable à lire, chargé même, à certains passages, d’un certain accent poétique.
Le cardinal Farrell espère donc qu’une relecture du texte entraînera un «changement de mentalité». «Nous devrions cesser de considérer les familles comme de simples objets de soins pastoraux pour les considérer comme des sujets. Les familles sont pleines de possibilités et de dons pour toute la société et pour l’Église, c’est pourquoi elles doivent devenir des acteurs dans les paroisses et les diocèses… Il faut donner plus d’espace aux familles. Ils sont un message d’espérance pour le monde entier et surtout pour les jeunes», a-t-il souligné.
Dans ce document, le Pape écrit aussi sur les fractures et les imperfections de la famille, avec les thèmes délicats de la séparation, du divorce, du remariage, et aussi la question sensible de l’homosexualité. C’est pourquoi Amoris Laetitia avec son ton de base positif, mérite une nouvelle lecture.
Encourager la créativité pastorale
«En tant qu’épouse et mère, comme tout le monde, je vis les difficultés de cette époque en ce qui concerne le mariage et la famille», a déclaré la sous-secrétaire du Dicastère pour les Laïcs, la Famille et la Vie, Gabriella Gambino. «Mais je dois dire qu’il est émouvant de lire à mon bureau les courriels et les lettres du monde entier qui expriment beaucoup de gratitude et d’espoir envers l’Église.»
«Ces dernières années, on a beaucoup écrit et réfléchi sur Amoris Laetitia, a déclaré Mme Gambino. Il est maintenant temps d’agir. Amoris laetitia a beaucoup à nous dire. Il contient des stratégies et des conseils pastoraux que nous découvrons avec intelligence et créativité pastorale entre les lignes. Le Pape a dit à plusieurs reprises que nous ne devions pas lire le texte uniquement à travers le prisme de « ce qui est permis et ce qui ne l’est pas ». Malheureusement, ces dernières années, le débat s’est concentré sur une seule partie du document», a-t-elle remarqué.
Il s’agit de la fameuse note de bas de page 351, dans laquelle François déclare que les divorcés remariés pourraient également recevoir l’aide des sacrements dans certaines circonstances. Ces lignes du chapitre 8 d’Amoris Laetitia ont suscité une discussion animée; plusieurs cardinaux ont communiqué par écrit leurs doutes (« dubia ») au Pape. En s’appuyant notamment sur un document pastoral des évêques maltais, le Vatican a ensuite précisé que l’ouverture prudente de François sur ce point relevait du «magistère authentique».
«Cette année, nous devrions lire « Amoris Laetitia » dans son ensemble, a conseillé Gabriella Gambino. Nous devrions examiner tous les aspects spirituels et pastoraux du document; on en a peu parlé, et pourtant ils préoccupent davantage la grande majorité des familles. Pensons aux réflexions sur les éléments émotionnels, affectifs et sexuels de l’amour; sur l’ouverture à la vie, sur les différents types de relations que l’on vit dans la famille; sur les conseils concernant l’éducation morale, spirituelle et sexuelle des enfants. Toutes ces questions sont d’un grand intérêt pour les familles», a-t-elle insisté.
Valoriser la dimension de l’église domestique
Un couple italien, Valentina et Leonardo Nepi, venus d’Arezzo, qui ont une fille de cinq ans et un engagement dans les activités de post-confirmation de la paroisse ont parlé des défis de l’amour conjugal. Conscients de l’importance de mots et de gestes apparemment simples pour exprimer au quotidien le respect, la patience, la confiance et le pardon mutuel, comme le Pape François y invite les catholiques, ils souhaitent que cette Année spéciale soit avant tout un moment propice pour cultiver de bonnes relations conjugales et familiales.
«Nous souhaitons également que la famille puisse être davantage valorisée dans la société: promouvoir la dimension sociale de la famille, sa capacité à éduquer les enfants, à animer les lieux et les communautés avec des valeurs positives et génératives, à cultiver le dialogue entre les générations.»La période d’éloignement forcé que nous vivons à cause de la crise sanitaire peut être vécue en recourant à la créativité grâce aussi à la technologie qui permet d’éviter l’isolement et de partager des résonances sur la Parole de Dieu. Faire l’expérience de la dimension d’une église domestique et favoriser le lien entre les générations, entre les personnes âgées et les grands-parents, est également un point crucial.
Le mariage en tant que sacrement est distinct des unions civiles
Répondant à la question d’un journaliste concernant les réactions à la récente déclaration de la Congrégation pour la doctrine de la foi interdisant la bénédiction des unions homosexuelles, le cardinal Farrell a fermement indiqué que «la vie pastorale de l’Église est ouverte à toutes les personnes. Il est important que les gens comprennent que nous ouvrons nos bras pour accueillir tout le monde, dans différents états de vie et quelle que soit la condition dans laquelle ils se trouvent», a insisté le cardinal, qui a toutefois redit qu’une distinction doit être faite: l’Église parle du mariage comme d’un sacrement, et non comme d’une union civile.
Ne pas pouvoir bénéficier d’une pleine participation à l’Eglise ne signifie pas ne pas pouvoir bénéficier d’un accompagnement. «Au cours de cette année spéciale, nous rencontrerons de nombreux diocèses dans le monde qui s’occupent des couples homosexuels. Il y a des situations dans lesquelles il y a des divorcés et des remariés, l’Église continue à les accompagner», a assuré le cardinal américain.