En accord avec le Pape, les Églises africaines ne béniront pas les couples homosexuels

Le cardinal Fridolin Ambongo, archevêque de Kinshasa et président du Sceam

En accord avec le Pape, les Églises africaines ne béniront pas les couples homosexuels

Un message diffusé par le cardinal Fridolin Ambongo, président du Sceam, fait la synthèse des positions des différentes conférences épiscopales du continent africain et répond, en accord avec le Souverain pontife, à l’inquiétude exprimée par des fidèles laïcs, des personnes consacrées et des pasteurs, après la publication de Fiducia Supplicans.

Entretien réalisé par Jean-Charles Putzolu – Cité du Vatican

La bénédiction des couples homosexuels proposée par Fiducia supplicans ne peut être mise en œuvre en Afrique «sans s’exposer au scandale», mais chaque évêque sera libre de choisir comment agir dans son diocèse. Le cardinal Fridolin Ambongo, archevêque de Kinshasa et président du Sceam (Symposium des Conférences épiscopales d’Afrique et de Madagascar), a diffusé un message jeudi 11 janvier sur les bénédictions «extraliturgiques» proposées dans la déclaration du dicastère pour la Doctrine de la foi, qui -rendue publique le 18 décembre dernier- ouvre la possibilité de bénir les couples en situation «irrégulière» au regard de la morale catholique, y compris ceux formés par des personnes de même sexe, mais en dehors de toute ritualisation et imitation du mariage.

Le cardinal Ambongo souligne une spécificité culturelle de l’Afrique, profondément enracinée dans les valeurs de la loi naturelle concernant le mariage et la famille, qui complique l’acceptation des unions de personnes de même sexe, considérées, relève le message du Sceam, «comme contradictoires aux normes culturelles et intrinsèquement mauvaises».

Monsieur le cardinal, pouvez-vous nous donner les raisons de cette inapplicabilité de Fiducia Supplicans sur le continent africain?

Fiducia Supplicans est un document qui a été signé par Sa Sainteté le Pape François, et par le préfet du dicastère pour la Doctrine de la foi. C’est un document qui s’impose à toute l’Église en tant que document qui traite des bénédictions. Il est donc applicable dans notre Église en Afrique.

Il y a seulement un point sur lequel les Églises d’Afrique sont en difficulté et ne peuvent pas l’appliquer, c’est celui qui concerne la bénédiction des couples homosexuels, tout simplement. Mais le reste du document est bon.

Est ce qu’on peut parler d’une spécificité africaine?

Effectivement, nous vivons aujourd’hui dans un monde multiculturel. Ce qui est bon pour l’Occident ne l’est pas nécessairement pour l’Asie ou pour l’Afrique. Je crois que nous sommes dans ce cas-là.

Toutes les conférences épiscopales, puisque vous avez rassemblé les différentes réactions, et vous aviez émis le souhait très rapidement après la publication de Fiducia Supplicans de présenter des lignes d’orientations communes pour tout le continent africain, sont-elles à l’unisson?

Vous avez pu prendre connaissance des déclarations des différentes conférences épiscopales d’Afrique. Mon message d’aujourd’hui est justement et uniquement la synthèse de ce que les évêques ont dit. Ils sont tous unanimes pour réaffirmer leur communion avec le Pape François en tant que facteur de communion, d’unité dans l’Église; ils sont tous unanimes pour reconnaître que ce document a créé des frustrations et des troubles chez les fidèles et en tant que pasteurs; ils ont tous estimé qu’il est impossible d’appliquer la partie de Fiducia Supplicans qui traite de la bénédiction des couples homosexuels.

Seulement ce point? Concernant, par exemple, les couples divorcés remariés, la question ne se poserait pas?

Mais pas du tout. Quand nous partons de la théologie de la bénédiction, c’est déjà une pratique. Dans toutes les églises du monde, nous bénissons tout le monde, nous bénissons même des criminels, nous bénissons même des animaux, nous bénissons des voitures, et ce n’est pas un problème. La bénédiction à accorder aux homosexuels en tant que personne n’est pas un problème. Ce qui pose problème chez nous, c’est la bénédiction du lien entre les deux, parce que ça brouille la théologie du mariage.

Il y a quand même l’expression d’une forme d’opposition à un document doctrinal, ou tout du moins à une partie d’un document doctrinal. Parallèlement, les évêques d’Afrique réaffirment leur pleine communion avec le Pape François. Ne sommes-nous pas dans une situation délicate?

Oui, cela a créé un grand malaise, il faut le dire. Et c’est justement à cause de cela que je suis venu. Dès que le document est sorti, il y a eu une sorte de levée de boucliers partout en Afrique. Personnellement, en tant que président du Symposium des Conférences épiscopales d’Afrique et de Madagascar, j’ai pris ma responsabilité. J’ai invité non pas les évêques, les prêtres ou les fidèles individuellement, mais les conférences épiscopales, à se prononcer. Ceci nous a permis de récupérer le dossier au lieu que de le laisser aller dans toutes les directions. Ce sont les conférences qui se sont prononcées, et j’ai fait la synthèse de toutes ces réactions. Mais je ne suis pas que le président du Sceam. Je suis aussi membre du conseil des cardinaux, le C9. Je suis aussi conseiller du Pape, et c’est à ce titre, en tant que conseiller que je suis venu auprès de lui. Nous avons échangé avec lui, nous avons échangé avec le préfet du dicastère pour la Doctrine de la foi, et c’est à l’issue de tous ces échanges, en accord avec le Pape et le préfet du dicastère pour la Doctrine de la foi, que j’ai signé mon message d’aujourd’hui.

Source : VATICANNEWS, le 11 janvier 2024

La synodalité n’est pas un concept, mais une expérience d’écoute et d’inclusion

Le cardinal Fridolin Ambongo, archevêque de Kinshasa, lors du point presse du 7 octobre sur le synode.

La synodalité n’est pas un concept, mais une expérience d’écoute et d’inclusion

Ce n’est pas un lieu pour exprimer des opinions personnelles, mais un lieu pour écouter, discerner et marcher ensemble vers le rivage où le Seigneur nous attend. Telle est la synthèse du Synode sur la synodalité, selon ce qui est ressorti du point presse organisé samedi 7 octobre dans l’après-midi au Bureau de presse du Saint-Siège, à la fin de la matinée consacrée au travail des cercles mineurs. 

Paolo Ondarza – Cité du Vatican

Jésus, Église, famille, synodalité, écoute, communion, pauvres, jeunes, communauté, amour… Ce sont quelques-uns des mots qui reviennent le plus souvent dans ces premiers jours de travail du Synode sur la synodalité, qui a terminé l’examen de la première partie de l’Instrumentum Laboris. Au cours de ces premières journées, a rapporté le président de la Commission pour l’information, Paolo Ruffini, préfet du Dicastère pour la communication, lors du point presse ce samedi 7 octobre, les participants ont exprimé leur gratitude au Pape pour la beauté de ce moment où ils font l’expérience des multiples facettes de l’Église catholique.

Rapports des cercles mineurs

Après la troisième congrégation générale qui s’est tenue hier vendredi après-midi, la troisième session des cercles mineurs a eu lieu ce samedi matin avec la finalisation des rapports du travail effectué dans ces groupes de travail d’environ une douzaine de personnes, y compris les délégués fraternels qui ne prennent pas part au vote. Ces rapports, approuvés par chaque cercle à une large majorité, ont été remis au Secrétariat général du synode, qui les reprend pour les renvoyer à l’assemblée lorsque le document de synthèse sera discuté.

Thèmes des rapports

Parmi les thèmes qui ont émergé des rapports de chaque cercle: la formation à tous les niveaux, des prêtres dans les séminaires; la coresponsabilité entre tous les baptisés; la manière dont la hiérarchie peut se situer dans la communion. Les participants ont été invités à explorer le terme « synodalité » d’un point de vue lexical dans les différentes langues. Le problème mis en évidence n’est pas seulement la débureaucratisation des structures ecclésiales, mais aussi la nécessité de consacrer de l’énergie à repenser de nouvelles formes et de nouveaux lieux de participation à la communion et à l’histoire millénaire de l’Eglise. 

Les jeunes et la réalité numérique

La nécessité d’impliquer les jeunes, par exemple en considérant la réalité numérique, de passer du concept de pouvoir à celui de service, en évitant toute forme de cléricalisme, a été soulignée. Des questions ont également été posées sur le rôle des laïcs et des femmes au sein de la communion ecclésiale et sur la manière dont l’Église peut se mettre au service des pauvres et des migrants. Les travaux synodaux ont également porté sur la relation entre les deux poumons de l’Église, celui de l’Orient et celui de l’Occident.

François, un pasteur à la tête du synode

Le Pape, selon Paolo Ruffini, était également présent à la congrégation générale de vendredi après-midi et était généralement parmi les premiers à arriver dans la salle. François a exprimé sa gratitude pour la façon dont les médias expliquent « l’acontecimiento », l’événement du synode.

Le cardinal Fridolin Ambongo Besungu, président du Symposium des Conférences épiscopales d’Afrique et de Madagascar (Secam) et archevêque de Kinshasa, Sœur Leticia Salazar, ODN, témoin du processus synodal depuis le diocèse de San Bernardino aux États-Unis, et Sheila Leocádia Pires, secrétaire de la Commission d’information du Synode, ont eux aussi pris la parole au cours de cette réunion. 

Le point presse sur le synode samedi 7 octobre

Le point presse sur le synode samedi 7 octobre

La prière

En effet, il n’y a pas de synodalité sans prière. «En tant qu’Église, a-t-il poursuivi, nous sommes toujours en discernement et il n’y a pas de point d’arrivée». Le président du Secam, interrogé par les journalistes, a ensuite expliqué que les rapports des cercles mineurs ne seront pas publiés pour respecter la « dynamique de la synodalité »: il y aura une synthèse de tous les rapports. N’en considérer qu’un seul signifierait sortir de la synodalité.  «Ce n’est pas le secrétariat du synode qui décide ou fait le synode», a-t-il précisé : il y a une interaction entre les cercles mineurs et le secrétariat général. En outre, l’autorité des participants individuels n’est pas conférée par une nomination pontificale, mais par le baptême. À cet égard, le préfet du dicastère pour la communication, Paolo Ruffini, a rappelé qu’il y a 52 membres nommés sur un total de 364.

Une nouvelle façon de traiter les problèmes

Interrogé sur les questions liées aux LGBT et sur la manière dont elles seront accueillies par les évêques africains, le cardinal Ambongo a souligné : «Nous sommes ici pour un Synode sur la synodalité. Je ne voudrais pas m’écarter du sujet. La synodalité ne signifie pas exprimer des opinions personnelles, mais marcher ensemble vers le rivage où le Seigneur nous attend. Sur la question des LGBT, le Seigneur lui-même, par le biais d’un discernement collectif, nous montrera la direction à suivre». En outre, l’archeve de Kinshasa a exhorté à réduire les attentes exagérées de ce synode, dont la particularité est de définir une nouvelle façon de faire et de traiter les problèmes de la part de l’Église. 

Pas un concept, mais une expérience

«La synodalité n’est pas un concept, mais une expérience d’écoute, d’inclusion», a déclaré pour sa part Sœur Leticia Salazar, exprimant sa profonde gratitude pour l’opportunité de participer à un événement dans lequel toute l’Église universelle est impliquée. Elle s’est ensuite attardée sur le thème de la migration au centre du discernement synodal.  «À l’âge de 17 ans, j’ai immigré avec ma famille en Californie, et l’Église m’a immédiatement accueillie».

Événements en dehors de la salle Paul VI

Sheila Leocádia Pires a également fait le lien avec le thème, rappelant que la migration a un impact sur la structure familiale et qu’il s’agit d’un sujet très vaste qui en englobe d’autres: le changement climatique, les conflits, les guerres, etc. Le secrétaire de la Commission d’information du synode a ensuite rappelé les événements liés aux travaux: jeudi 12 octobre tous les participants sont invités à un pèlerinage aux catacombes de Sainte Domitille et de Saint Sébastien; des événements de prière tels que le rosaire sont également prévus dans la basilique vaticane. La prière joue également un rôle fondamental dans la salle de classe: entre les discours, en effet, les gens se réunissent toujours dans la prière et le silence pour approfondir et réfléchir aux contenus entendus.

Reprise des travaux lundi 9 octobre

Aucun travail n’est prévu ce samedi après-midi et demain dimanche 8 octobre. Ils reprendront lundi 9 octobre au matin, immédiatement après la messe dans la basilique Saint-Pierre, avec la quatrième congrégation générale qui abordera un nouveau point de l’Instrumentum Laboris sur le thème « Une communion qui rayonne. Comment être plus pleinement signe et instrument de l’union avec Dieu et de l’unité du genre humain ? » Ensuite, il y aura l’élection des membres de la Commission du rapport de synthèse et de la Commission de l’information.

Source : VATICANNEWS, le 7 octobre 2023